vendredi 17 février 2023

Mon chien Stupide

John Fante - Mon chien Stupide - 10/18

 

 

 

Henry J. Molise écrivain et scénariste entre deux eaux voit débarquer un gros chien dans sa maison située au nord de la baie de Santa Monica. L’animal encombrant et au comportement bizarre est accueilli fraichement dans sa famille. Molise qui garde le souvenir mélancolique d’un ancien compagnon à quatre pattes, disparu, voit dans cette intrusion un dérivatif heureux à ses multiples préoccupations : une inspiration en déclin et quatre enfants ingérables.

 

 La fréquentation du personnage n’a rien non plus d’une sinécure. Rital de pure souche, paternaliste renvoyé dans ses plates-bandes, des convictions racistes bien affirmées à l’expression plus proche d’ailleurs d’un célèbre sketch que de Lumière d’Août, le narrateur se sent perdu dans ce coin d’Amérique libertaire qui se souvient d’Henry Miller.

  

L’impécunieux Dominic, mécanicien de la Navy passionné de poker, sa fille Tina fiancée à un ancien Marine abonné au scotch de son futur beau-père comme l’est Denny aux dissertations rédigées par sa mère donnent le tournis à Molise, tout comme les colères imprévisibles de sa femme Harriet. Seul Jamie semble provisoirement combler les espérances de ses parents … Malgré tout Fante reste dans la tonalité d’une sitcom genre Marié, deux enfants, loin des règlements de compte littéraires à la française, des souffrances d’un père Goriot, des imprécations d’un Gide, de l’emprise dictatoriale d’une Folcoche, ou de la haine Orléanaise (Yann Moix).

 

La famille est-elle d’ailleurs le sujet de ce roman ? Stupide, pas si stupide, mène les débats comme dans la nouvelle « Un gars et son chien » d’Harlan Ellison, ou dans un autre registre le Boudu sauvé des eaux de Renoir, entre dans la vie des gens comme dans un jeu de quille, en sort aussitôt au gré de ses désirs. Toutes choses que rêve d’accomplir Henry J. Molise. L’écriture de ce roman paru post mortem est absolument jouissive. Je n’en ai pas fini avec John Fante.


107 commentaires:

Christiane a dit…

Ce livre de John Fante, "jouissif", je ne l'ai pas lu mais j'ai vu le film "jouissif" aussi inspiré par ce roman :

https://fr.wikipedia.org/wiki/Mon_chien_Stupide_(film)

J'aime beaucoup votre billet qui explore magnifiquement l'impact de ce "personnage" dans la vie de ce couple en pleine crise.
J'apprécie aussi le lien avec d'autres œuvres, d'autres situations nées du hasard d'une apparition. Un peu ce qu'évoquait Paul Claudel pour le ressort du théâtre Nô (citation sous le billet précédent), car il y a glissement d'un personnage dans la présence soudaine pourtant débonnaire mais envahissante du chien Stupide.
Beau portrait d'Henri Molisse.
Hariet, personnage interprété par Charlotte Gainsbourg est l'âme du film. (Yvan Attal très bien aussi.). Cela ne semble pas être le cas dans le roman.
Le chien "entre dans la vie des gens comme dans un jeu de quille, en sort aussitôt au gré de ses désirs". C'est tout à fait cela !
Voilà un beau billet - "fiche" dirait certain - mais c'est plus qu'une fiche ... "La famille est-elle d’ailleurs le sujet de ce roman ? " Écrivez-vous dans le paragraphe final ?


Christiane a dit…

La quatrième de couverture nous apprend que le narrateur est Bandini. S'agit-il du même personnage Arturo Bandini, le narrateur anonyme de "La route de Los Angeles" et le narrateur de cet autre livre de Fante, "Ask the Dust" / "Demande à la poussière" ? Ce livre qui a bouleversé Charles Bukowski .
Fante aimait mêler réalité et fiction.

Anonyme a dit…

Christiane,vous devriez ouvrir un blog.
On viendrait vous lire.

Soleil vert a dit…

La quatrième de couverture nous apprend que le narrateur est Bandini.

Pas sur la mienne.
Mon chien stupide appartient à un cycle différent de celui de "Ask the Dust" / "Demande à la poussière"

Christiane a dit…

Ouvrir un blog ? Je préfère m'adonner à "l'écriture du moi" à travers mes lectures. Cet homme sans talent de Tsuge m'a taraudée...
Quelques mots innocents peuvent ouvrir une faille, faire surgir des voix du passé avec lesquelles on a fait la paix. Je sais que l'oubli est bruissant de mémoire tenant ses chiens fous en laisse. C'est l'obscur qui s'oppose à l'avancée de l'écriture.
La lecture me délivre et me repose. Je lis comme d'autres écrivent. La lecture ? représentation invisible de la pensée. Elle est aussi la flèche du temps. Le lieu de l'écriture est une tentation. Ici il apparaît et se dérobe comme le chien Stupide de Fante.
Dans ma bibliothèque mentale il y a tant de lectures... espace que l'écriture occupe peu à peu, bien à l'abri. Les fonds de tiroir sont un blog parfait où nul lecteur n'oserait s'aventurer de peur de devoir batailler avec des chaussettes et des mouchoirs !
(Un lieu fictif qui pourrait être à l'origine d'un roman de science-fiction. Imaginons un fantôme curieux qui aime la rumeur du monde antérieur à la fermeture du tiroir ...)
Bref, retournons vers l'écriture de John Fante.

Christiane a dit…

Notice lue sur une présentation des livres de John Fante par l'éditeur des "Nouvelles 1933-1959", Christian Bourgois, dans une postface à "Grosse faim" : "Note de l'éditeur" (certainement extraite de la biographie publiée en même temps que ce recueil de nouvelles sous le titre "Plein de vie : une biographie de John Fante".)
Sur la quatrième de couverture on peut lire encore que le double romanesque de l'écrivain est Arturo Bandini. " L'opéra du moi "...
"où les grandes espérances et amères désillusions tissent le contrepoint tragi-comique de son existence."
Voilà, voilage...

Soleil vert a dit…

Christiane, bises

Christiane a dit…

Idem

Christiane a dit…

Et voilà, "Mon chien Stupide" est sur ma tablette, traduit par Brice Matthieussent. pour Christian Bourgois 10/18 pour cette traduction française.
Document numérique réalisé par 12-21 éditeur numérique de 10/18..

Christiane a dit…

Je suis contente de lire ce roman de John Fante. C'est méchant à souhaits. Les personnages, enfants adultes, parents, ne se font pas de cadeaux ! Je retrouve le narrateur de "Dis-le à la poussière" plus égoïste, plus sombre, plus rancunier. Le film d'Yvan Attal n'était pas désagréable mais comme il mettait en scène son propre couple il a adouci les personnages. Harriet devenue Alice dans le film a le charme de Charlotte Gainsbourg. Harriet (du livre) n'a pas besoin d'avoir du charme.
Le gros chien envahissant, crade, lubrique est une vraie calamité dans le livre, beaucoup plus boule de poils à aimer dans le film.
C'est très plaisant à lire, acide et profond. Une comédie noire qui révèle peu à peu une famille déglinguée. Et quelle brillante révélation des pensées cachées des uns et des autres, parfois racistes.
C'est bien ce choix. Je ne m'y attendais pas. De plus c'est souvent drôle. On rit mais au dépend des autres !

Christiane a dit…

aux dépens

Christiane a dit…

Quand Stupide agresse le berger allemand redoutable et le sodomise, notre narrateur découvre le goût de la victoire. Alors je lis ce passage délirant (p.51):
"J'étais las de la défaite et de l'échec, je désirais la victoire. Mais j'avais cinquante-cinq ans et il n'y avait pas de victoire en vue, pas même de bataille. Car mes ennemis ne s'intéressaient plus au combat. Stupide était la victoire, les livres que je n'avais pas écrits, les endroits que je n'avais pas vus, la Maserati que je n'avais jamais eue, les femmes qui me faisaient envie, Danièle Darrieux, Gina Lollobrigida, Nadia Grey. Stupide incarnait le triomphe sur d'anciens fabricants de pantalons qui avaient mis en pièces mes scénarios jusqu'au jour où le sang avait coulé. Incarnait mon rêve d'une progéniture d'esprits subtils dans des universités célèbres, d'érudits doués pour apprécier toutes les joies de l'existence. Comme mon bien aimé Rocco, il apaiserait la douleur, panserait les blessures de mes journées interminables, de mon enfance pauvre, de ma jeunesse désespérée, de mon avenir compromis.
Il était un chien, pas un homme, un simple animal qui en temps voulu deviendrait mon ami, remplirait mon esprit de fierté, de drôlerie et d'absurdités. Il était plus proche de Dieu sur je ne le serais jamais...."
Un vrai tsunami ! La révélation !!! Inouï et drôle.

Christiane a dit…

Dostoïevski écrit dans "Les Frères Karamazov" : “Il n’y a point pour l’homme, livré à sa liberté, de souci plus constant que de chercher un Autre devant qui s’incliner”.
Est-ce le cas de cet homme fragile subjugué par la force de ce chien venu de nulle part pour bouleverser sa vie et pour lui donner enfin le goût d'une victoire ? C'est un véritable transfert.

Christiane a dit…

Paul Edel écrit dans son dernier billet : "Dominique me manque. Sa tête penchée, son rire, ses questions drôles, sa familiarité somptueuse, son éclat."
"Familiarité somptueuse"... Quelle création réussie que ces deux mots accolés...chacun deux métamorphosant l'autre. On glisse depuis la phrase jusqu'au trouble de l'auteur. On reste coi devant ce mouvement du langage comme si tout à coup la mémoire d'un tressaillement s'éveillait. Un moment de grâce , un plaisir de lire.

Christiane a dit…

Mais en même temps, il entre dans plus de lucidité, de courage et devient capable de dire à sa femme : "Je viens de me creuser la tête pendant une heure ou deux, et ce que j'ai découvert n'est pas très agréable. Je suis un mari pourri, un mauvais père, un écrivain minable, un raté sur toute la ligne. Pas étonnant que tu partes. Tu en as marre de moi, marre de mes coups tordus. Je ne suis pas non plus un Adonis (...) et Dieu sait que tu as le droit de t'amuser un peu. "
C'est un roman très riche psychologiquement.

Soleil vert a dit…

la phrase de Dostoïevski : Arendt a du écrire qq chose de similaire ?

Christiane a dit…

Ça serait bien si on la retrouvait. Cette pensée cible cette abdication presque désirée devant un être en qui se reposer ou dans le pire des cas par qui renoncer à sa liberté de penser (certainement l'idée d'Arendt).
Ça fait peur d'être libre, presque un vertige . On est alors au bord de la solitude et on a un peu peur de l'illimité de soi. Alors on cherche l'autre. Dans le meilleur des cas dans une distance harmonieuse (un peu le cas de Dominique Rolin dans ce billet de Paul Edel. Ils s'obligeaient à l'absence, à la distance, à la solitude pour travailler et se retrouvaient avec joie. Mais c'est rare.

Christiane a dit…

Quelques lignes d'une lettre qu'elle adressait à Philippe Sollers.
Paris Samedi 11 avril 1981, 10 heures
"(...) J’ai superbement dormi. (...) Joie d’avoir en perspective ma soirée de silence dans un Verneuil qui déjà commence à t’attendre. Ma solitude, bourrée de toi, est d’une succulence invraisemblable, un luxe que tu es seul à comprendre. Après mon excellent frugal repas, je me suis couchée avec le tome2 de la correspondance de Baudelaire et j’ai lu tard, passionnément et minutieusement. Le merveilleux travail d’annotations de Pichois fait fourmiller tout le ciel de cette époque, si peu différente de la nôtre dès qu’il s’agit de création. Les articles sur les Fleurs du mal, Les paradis artificiels sont d’une ...
Suite à venir

Christiane a dit…


Suite :
"Les paradis artificiels sont d’une insanité incroyable. Le courage foudroyant de Baudelaire est comme le tien, avec les mêmes vertiges d’angoisse et de certitude, les mêmes délires froids, les mêmes fureurs."

Christiane a dit…

C'est Sollers sur Pile/Face qui en cité quelques unes.
On sent qu'ils ont trouvé la bonne distance.

Anonyme a dit…

En fait la vie des deux chiens s’éclaire l’une par l’autre. Stupide ramène à Rocco et à la jeunesse du Narrateur. La fin de Rocco est symétrique de la disparition de Stupide , me semble-t-il. Comme si le present rendait possible l’éclairage et l’affrontement avec les souvenirs nés du Passé.,. MC

Christiane a dit…

Oui, c'est exactement cela.
Je repense soudain à un autre chien, celui du prince Salina. Empaillé.. Fin du Guépard de Lampedusa.
Lancé par la fenêtre par Conchetta il fait un vol plané jusqu'au feu à la fin du livre. Et ce moment porte fugitivement la noblesse qui a été d'un homme qui n'est plus.
Ainsi ces bêtes portent tout un passé, tout un amour.
Stupide réveille en cet immigré italien toute la douleur des années passées. Vous dites très bien cet échange entre les deux chiens.

Christiane a dit…

En symbole de la fin de la lignée des Salina, "Concetta jette par la fenêtre la dépouille empaillée du chien bien-aimé de son père, qui est vraiment trop poussiéreuse et piquée par les vers."....

Christiane a dit…

Concetta

Christiane a dit…

Bendico... Le chien du prince Salina... Qui ressemble tant à un guépard dans ce dernier envol ...

Christiane a dit…

C'est bien étrange la mémoire des livres en plein coeur de la nuit...

Christiane a dit…


Voilà, j'ai retrouvé le livre "Le Guépard" de Lampedusa. C'est comme si le chien devenait un peu du prince de Salina. Comme si vie et mort s'échangeaient mais il n'y a pas de feu ça c'est une création de ma mémoire !
"Quelques minutes plus tard, ce qui restait de Bendicò fut jeté dans un coin de la cour : au cours de son vol par la fenêtre sa forme se recomposa un instant : on aurait pu voir danser dans l'air un quadrupède aux longues moustaches et la patte droite antérieure semblait lancer une imprécation. Puis tout s'apaisa dans un petit tas de poussière livide. "
Dans "Mon chien Stupide"0, le chien aussi devient un peu du narrateur qui projette sur son comportement ses désirs inconscients de gagner sur la frustration qui le mine.
Ce roman est vraiment plein de surprises.

Christiane a dit…

Je comprends enfin pour quelle raison vous avez mis un sketch de Murielle Robin en lien. Les scènes familiales du roman sont très réussies et cyniques avec toutefois une certaine légèreté due à l'humour toujours présent.
Je passe un bon moment imprévisible avec ce roman posthume de John Fante. Ce que j'avais lu de lui était plus grave, plus proche des exclus, des migrants. Ici, il se défoule brillamment. Mon stock d'argot s'enrichit !

Christiane a dit…

Un billet de Pierre Assouline me rend songeuse. Une bibliothèque monstrueuse chez Umberto Eco. Le film documentaire inclus dans le billet renvoie à chaque lecteur sa stratégie. Vivre avec des livres sans être oppressé par leur nombre.
Hier, Soleil vert vous confiez avoir loué un espace pour remiser vos livres
Cela m'avait également laissée songeuse.
Leur présence concrète m'est indispensable. J'aime les regarder fermés, assoupis, confiants. Un livre endormi avec sa charge de mots. Livres nacelles légers comme des pensées, jamais intrusifs, patients et doux comme l'est le papier sous la paume. Chacun sa poussière selon qu'il est clos depuis longtemps ou fréquemment ouvert. Papier et encre. Quel bonheur. Mariage réussi.
Être attentive à leur présence. Savoir qu'ils n'auront jamais été lus. Mystère des mots qui se livrent au fil des ans.
J'aime quand Paul Edel revient a un livre connu, zimey comme un laboureur aimant sa terre. Il creuse de nouveaux sillons, y sème ses regards et moissonne.
J'aime quand je défoule dans la colonne de droite de votre blog, Soleil vert, la cascade de billets concernant vos lectures.
Voyager, voyager dans les livres.
Lieu de courage aussi. Auteur, lecteur sur la même fragile passerelle des mots. Une courbure du corps vers l'écriture gravée sur le papier. Vibration insaisissable quand le mot porte pensée.
Et puis oublier. C'est important d'oublier de laisser le titre reposer. La laisser revenir, insoumise, même la nuit.
Surgissement comme d'une source.
L'écriture devient mentale, habite l'inconscient, coulé comme le vent ou la lumière au milieu du rien ou du froufrou de la vie.
On est bien ici. Merci l'ami.

Christiane a dit…

aimé - déroule -

Christiane a dit…

livre

Anonyme a dit…

Soleil Vert ,vous qui aimez la littérature turque je vous suggère chez Zulma La maison aux livres de Enis Batur, qui raconte l’histoire d’un éditeur romancier à qui on légue une bibliothèque avec des milliers d’ouvrages.
Une libraire.

Anonyme a dit…

Mais 3200ouvrages, ce n’est pas si monstrueux…ne pas oublier là dedans les irremplaçables qu’on achète pour quelques pages décisives sur une question . Les classiques, et les Modernes tous genres confondus. Éco ne recevant pas de romans, c’est un bon chiffre, pas un gros chiffre .Emile P. Recevait lui au milieux de pile d’ouvrages reçus’ d’ ouvrages lus, et d’ouvrages à lire, on le suppose du moins. Et c’était impressionnant que d petit bonhomme un peu sourd vous recevant au milieu de ses jouets, les livres. Je dois ajouter aussi un penchant à dérober ses propres ouvrages


ouvrages chez son éditeur, ce dernier le laissant faire,il y avait de l’enfant, chez ce grand chercheur….



Christiane a dit…

Ayant terminé la lecture, je revois à la baisse le film que Yvan Attal a tiré de ce livre. Il s'est appuyé dessus pour écrire son propre scénario . Si on retrouve cette calamité ahurissante et poignante du chien, les enfants égoïstes et un peu loufoques, le couple parental est loin du portrait acide et cynique que John Fante fait du sien.

Votre billet Soleil vert met bien les problématiques en place. Le racisme du couple est heureusement balancé par les critiques acerbes du fils et son choix délibéré d'aller... hors de l'opinion de ses parents.
Ce chien devient le révélateur du père qui naissant à la tendresse pour son plus jeune fils fera tout pour récupérer le chien enfui, tenu par la promesse qu'il lui a faite.
La fin du roman triste est expédiée en une page. Pas le temps de sortir son mouchoir, là où Atall ne peut se passer du sourire de Charlotte.
Le chien devient symbolique, n'en faisant qu'à sa tête.
Le rêve d'Italie est beau et poignant surtout quand Henri / Fante y renonce pour le chien de "son" fils.
Bref un livre séduisant que j'ai aimé mais loin de la force des nouvelles de "Grosse faim ", loin surtout de "Ask the Dust" / "Demande à la poussière ", plus âpre, plus violent, plus déchirant. Peut-être lirais- je "Bandini", la source...

Christiane a dit…

"Bibliothèque monstrueuse"... C'est ma réaction face au film documentaire mis en lien. Bien pour une bibliothèque publique , trop vaste pour un seul lecteur. Je préfère la tour de Montaigne avec ses petites fenêtres ouvertes sur le paysage et les maximes peintes sur les poutres.
Bien sûr il y a la "bibliothèque infinie" de Borges
ou le cabinet de lecture Labrouste
ou maintenant celle de la grande bibliothèque ( je préférais Richelieu)
et puis toutes celles ouvertes dans les villes, baptisées maintenant médiathèques puisque réunissant divers supports de lecture et d'information. Mais plus que tout mes livres, chez moi
et
les librairies où je pénètre avec avidité, pour fureter et happer au passage quelques lignes d'un roman, d'un essai ou d'un livre d'art.
Puis rentrer chez moi avec la joie proche d'ouvrir le livre.

Anonyme a dit…

Voir aussi de Umberto Eco ”N’espérez pas vous débarrasser de livres”,très drôle.
Prenez soin de vous Soleil Vert.

Re La libraire.

Anonyme a dit…

Maintenant, il est des livres avec lesquels vous choisissez de ne pas continuer, qui se séparent de vous. Que ferais-je de « Ferdinand Furieux », qui contient les lettres de Céline? A l’opposé, je crois que les Satires de Pierre Petit, ( Dix-Septieme, et pas lues, un comble!) vont m’occuper au moins le temps de leur lecture. Je crois qu’il faut délester de temps en temps, en faisant la part de la rareté et de ce qui n’intéresse plus…MC . Je ne pose pas le pb des Manuscrits !

Christiane a dit…

Tout à fait d'accord. Mon nombre de livres est quasi constant. Parfois il m'arrive de racheter un livre dont je me suis séparée dans le cas d'un prêt devenu un don. Parfois je déleste d'une façon ou d'une autre.

Christiane a dit…

Délicatesse voluptueuse d'un texte de Paul Edel. Un café tout proche de l'hôpital où ces jeunes infirmières travaillent. Une joie immense habite son regard, se réjouissant d'une blouse échancrée sur la naissance d'un sein, des rires ,des papotages même si la chute du texte et ces "saisons" m'évoque la scène de bal du Guépard et le prince Salina vibrant et nostalgique s'éloignant discrètement de la belle fiancée de son fils après un tour de valse...

"(...) C’est vertigineux d’être à la fois si proche d’elles, dans le parfum musqué et orientale de leurs chevelures, la tasse de café à la main, au beau milieu de cette cargaison magnifique de jeunesse et de maturité, et quand même séparé d’elles par tant de saisons. Volupté(...)"

Belle écriture gourmande gonflée vde désir et de vie.

Anonyme a dit…

Bien vu pour la comparaison avec le film de Renoir ”Boudu sauvé des eaux ”. Michel Simon étant au top,mieux que le remake de Gérard Jugnot.

Anonyme a dit…

Mais peut-on refaire Boudu, pense pour Simon, meme avec Jugnot? Surtout avec Jugnot qui est Monsieur tout le monde là où il faut, nolens bolrns, comme le Stroheim de la Grande Illusion, un monstre sacré ?! MC

Christiane a dit…

https://www.dvdclassik.com/critique/boudu-sauve-des-eaux-renoir

Christiane a dit…

Cette note d'Antoine Royer(lien dvdclassik) est éblouissante et donne à la remarque de Soleil vert (boudu) une amplitude nouvelle.

Christiane a dit…

Je tente une exploration. Bandini. C'est là que tout commence. Et c'est très très beau. Ce John Fante est surprenant. C'est rocailleux et tendre. C'est féroce et poignant.

Christiane a dit…

Dans la préface de "Bandini" John Fante écrit : "(...) Parfois, avant de m'endormir, une phrase, un paragraphe, un personnage de cette œuvre de jeunesse m'obsède ; alors, dans une sorte de rêve les mots émergent et tissent autour de cette vision le souvenir mélodieux d'une lointaine chambre à coucher du Colorado, de ma mère, de mon père, ou de mes frères et soeur. Je ne peux imaginer que ce que j'ai écrit il y a si longtemps réussisse à m'apaiser dans ce rêve éveillé, mais je ne peux pas davantage retourner aussi loin en arrière, ouvrir ce premier roman pour le relire. Je redoute d'être mis à nu par mes propres œuvres. Je suis certain de ne jamais relire ce livre. Mais tout aussi certain que les personnages de mes romans ultérieurs trouvent leur origine dans ce texte de jeunesse. Pourtant, il s'est définitivement détaché de moi, et seuls demeurent le souvenir des anciennes chambres à coucher, le bruit des pantoufles de ma mère qui entre dans la cuisine." (John Fante - 1983.)

Soleil vert a dit…

Merci libraire.

J'essaye de prendre soin de moi comme de mes livres.
Hier j'ai paniqué une heure dans la crainte d'avoir perdu Une porte sur l'été. Un livre honorable de SF de Robert Heinlein (édition 1973 en J'ai lu) avec un titre à la Sagan. J'en traine certains sans aucune valeur depuis un demi-siècle.
Je note La maison aux livres de Enis Batur. Quant au recueil de nouvelles de Fante il est sur ma pile.

Christiane a dit…

Damien (RdL) : "Le désert et les livres". Oui.

Christiane a dit…

Soleil vert, je vais poser une question... stupide...
Qu'attendez vous de l'espace commentaire de votre blog qui pourrait être un site sans intervention de vos lecteurs.
Qu'écrire après vos billets, selon qu'on connait le roman que vous chroniquez ou pas, selon qu'on est familier de la science-fiction ou pas ?
Souvent naissent ici des conversations proches de la problématique de vos choix littéraires, souvent aussi qui s'en éloignent.
Ces échanges m'interpellent, j'abonde en interventions peut-être encombrantes, proliférantes, envahissantes. Mais je ne les vois pas hors de votre blog puisqu'elles sont motivées par votre regard analytique sur ces livres ou celui d'un des intervenants.
Surtout, si un jour, ce trop de commentaires vous devient pénible, dites-le, je comprendrai et ne vous en tiendrai pas rigueur. J'irai comme Stupide ou Boudu au fil du chemin...
Quant à ouvrir un blog... J'aurais l'impression d'être dans le tableau de Van Gogh "La ronde des prisonniers".
Donc, écriture personnelle de fond de tiroir ou venir ici avec plaisir si vous le tolérez.
C'est chouette qu'un libraire vienne chez vous. Il doit être dans son élément.
Pour quelles raisons, M.C., vous conseille-t-il de prendre soin de vous ? Êtes-vous souffrant ?

Soleil vert a dit…

Christiane, ceci est votre espace libre

(et merci MC)

Christiane a dit…

Merci, Soleil.

Christiane a dit…

La lecture de "Bandini" est essentielle pour comprendre l'oeuvre de John Fante. Ça arraché le coeur la vie de cet Arturo Bandini entre sa mère vaillante mais souffrante, la misère, la maison déglinguée, la fratrie écorchée vive, houleuse, le père plus au bistrot qu'au travail. Alors le gamin pique des sous à sa mère. Et va en douce au cinéma et un peu comme dans La rose pourpre du Caire de Woody Allen, il se rêve dans les histoires projetées sur l'écran. Oublié le noir de la vie échangé contre la tiédeur de nid de la salle, même si dans ces premiers chapitres, la neige rend la vie blanche, froude et difficile et le poêle en fonte trop gourmand de bois et de charbon.
Comment ce môme est arrivé à l'écriture ?
C'est très prenant le récit de son enfance, cette famille d'immigrés italiens. C'est écrit rudement (pas le soyeux sensuel , raffiné et léger de Paul Edel !). Ici c'est plein d'insanités, de violence verbale, de bagarres, de tendresse aussi. Vous évoquiez Dickens. En plein dans le mille, le côté pathos en moins !
C'est bien Fante sur votre blog-bibliotheque,. Ici, on navigue entre SF et littérature très proche du réel, des rêves nés du réel. De l'encre née du réel. J'aime que ce soit sur les traces de Stupide !

Christiane a dit…

Ça me rappelle la vie cabossée de Galeux, ce si beau personnage de Stephen Graham Jones ( le sang et les crocs en moins) mais la solitude, oui. Ja vais bien aimer votre présentation de ce grand roman délirant et réaliste.

Christiane a dit…

j'avais bien aimé

Christiane a dit…

J'ai relu Galeux en cachette de mon surmoi et j'ai beaucoup aimé. Je hais mes effarouchements face à la violence dans certains romans. Un réflexe venu de loin...
La lecture ou le cinéma les mettent à mal !

Christiane a dit…

"Thé Ghost writter" de Polanski d'après le roman de Robert Harris. Un film
noir rappelant ceux d'Hitchock,.
Plaisir de le revoir ce soir.




Christiane a dit…

Writer.
Le livre c'est L'homme de l'ombre

Christiane a dit…

Hitchcock

Christiane a dit…

Comme Thornhill / Cary Grant dans La mort aux trousses ( Hitchcock) qui devient malgré lui agent du contre-espionnage, ....Thornhill

Anonyme a dit…

Disgression. Jean Richer attire mon attention en traitant un autre sujet . ( Hugo et l’ Astrologie) sur ce qui peut-être un texte-source de Maurice Renard et du « Péril Bleu. » Il s’agit des Travailleurs de la Mer; et peu s’en faut qu’on y trouve la donnée du « Roman de Renard! » « il ( Gilliatt)!concluait que puisque des transparences vivantes habitaient l’eau, d’autres transparences, egalement vivantes, pouvaient bien habiter l’air. Les oiseaux ne sont pas les habitants des airs, ils en sont les amphibies. G ne croyait pas à l’air désert. Il disait: Puisque la Mer est remplie, pourquoi l’atmosphère serait-elle vide? Des créatures couleur d’air s’effaceraient dans la lumière et échapperaient à notre regard; qui nous prouve qu’il n’y en a pas? L’analogie indique que l’air doit avoir ses poissons comme la mer a les siens; Ces poissons de l’air seraient diaphanes, bienfait de la prévoyance créatrice pour nous comme pour eux; laissant passer le jour à travers leur forme et ne faisant point d’ombre, et n’ayant pas de silhouette, ils resteraient ignorés de nous et nous n’en pourrions rien saisir « …. Sacré Totor! Il ne lui suffit pas d’écrire de maîtres romans, il faut qu’ils suggère ceux des autres, et dans un genre des plus inattendus! Faites-en ce que vous en voulez, Soleil Vert! Bien à vous tous. MC

Christiane a dit…

Il y a beaucoup d'eau dans ce film. Mais une eau menaçante. Polanski ne devait pas aimer l'eau qu'il met dans ce film.
Cela me rappelle cet autre roman dont je vous dois la lecture : " Rendez-vous demain" de Christopher Priest. Ça c'est un roman qui m'a envoûtée (jusqu'à la plaque...).
J'avais noté : " La mer était au centre de tout. La menace qu'elle representait était omniprésente." Puis le raz-de-marée qui détruit la côte.
Je me souviens plus des atmosphères, des paysages sur des histoires. Et là vous aviez choisi un livre remarquable.

Christiane a dit…

Le ciel serait donc un vaste océan qui recouvre la planète terre comme une peau liquide dans Le peril bleu de Renard.
Pêcher des poissons dans les hauteurs de ce vivier d'étoiles est un beau passe-temps.
Merci M.C. d'avoir fait ce cadeau à Soleil vert. J'en profite ! mais quel est le rapport avec Victor Hugo et Les Travailleurs de la mer ? Et pourquoi Jean Richer ?

Christiane a dit…

Ah mais oui, les signes du zodiaque comme les globes de Vincenzo Coronelli à la Grande Bibliothèque de France dans le hall ouest. Une merveille..
Le globe celeste. Ce ciel tel qu'il devait être pour le géographe poète le jour de la naissance de Louis XIV. 2000 étoiles, des centaines de constellations des animaux fabuleux des signes du zodiaque. Un bleu très foncé. Des comètes avec des traînes dorées.

Anonyme a dit…

Richer note avec pertinence la conception d’Hugo-Giliatt, mais il le fait dans un ouvrage à prétentions astrologiques. Ce qui l’intéresse ici,c’est le thème du transparent marin, et la conception du reve hugolien opposé au reve Nervalien . En très gros, il faut à Hugo un appareillage scientifique ( l’observatoire dans Promontorium Somnii), ou le monde, pour que le rêve s’enclenche , tandis que le rêve Nervalien est ouverture des portes d’ivoire ) Aurélia) et transmutation conséquente du réel. Et de fait, la rêverie hugolienne dans les Travailleurs part des méduses, des etres transparents qui vivent dans la mer, de la pieuvre, réalité, dont Hugo fait une déesse avec son sanctuaire. J’ajouterais une autre différence, plus profonde, relevée dans les Misérables sans que Nerval soit cité, son « Dieu est peut-être mort » contre lequel s’arccboute la Preface Philosophique des Misérables. Mais restons en aux rêves. Au delà du parti-pris astrologique, assez pénible car on ne peut s’empêcher de penser à des horoscopes faits à posteriori pour ces grands hommes, il y a là une réflexion intéressante sur le symbolisme du rêve, et certains symboles tout courts à condition de les rapporter au texte. Des fulgurances qui rappellent le grand Richer, éditeur de Nerval dans la Pléiade, que le Jésuite Guillaume n’a certes pas remplacé !

Christiane a dit…

Je relis cet extrait des Travailleurs de la mer. Oui, Gilliatt revêt à partir d'un raisonnement déductif de ce qu'il sait des oiseaux et des poissons.
Quant au Dieu, à la fin de Booz endormi, Ruth regardant le ciel ouvre aussi les portes du rêve au dieu moissonneur...
"Tout reposait dans Ur et dans Jérimadeth ;
Les astres émaillaient le ciel profond et sombre ;
Le croissant fin et clair parmi ces fleurs de l'ombre
Brillait à l'occident, et Ruth se demandait,
Immobile, ouvrant l'œil à moitié sous ses voiles,
Quel dieu, quel moissonneur de l'éternel été,
Avait, en s'en allant, négligemment jeté
Cette faucille d'or dans le champ des étoiles."

Merci, M.C. pour toute cette rêverie transparente émanant des Travailleurs de la mer. Le sacrifice de Gilliatt m'avait bouleversée quand au creux de ce rocher qui va bientôt être recouvert par la marée montante , il va mourir, noyé, regardant sa bien-aimée s'éloigner avec celui qu'elle a choisi dans ce fameux bateau.
Ce que vous dites de Nerval est tellement juste aussi. Le rêve, il est vrai, n'avait pour lui nul besoin du réel, il lui suffisait d'ouvrir son coeur.
Vous semblez lire un bel essai de Richer , le spécialiste de Nerval, avec cette océane. bleue et ses poissons transparents des grands fonds. Nerval est peut-être plus proche du globe céleste de Coronelli et Hugo de celui de la terre....
Il vous reste à nous parler de ce roman SF de Maurice Renard "Le péril bleu"...

Christiane a dit…



revêt / rêve

Christiane a dit…

Je reviens au film de Polanski vu hier au soir que je regarde à nouveau ce matin tant il est complexe. Tant ce personnage, ce rédacteur qui n'a rien ni d'un héros ni d'un grand écrivain, est, comme le spectateur, perplexe, se demandant quel est le sens de cette réécriture de l'autobiographie d'Adam Lang ? Pour quelles raisons ce dernier s'enferme par un isolement mystérieux dans ce bunker de luxe construit dans une île battue par les vents et les orages et gardée par de nombreux gardes du corps.
Or, au début du film, je retrouve la séquence que je cherchais. Pourquoi ce plan surréaliste sur cet employé balayant sur la terrasse des feuilles mortes tourbillonnant dans le vent pour les verser dans une brouette d'où elles s'envolent aussitôt et lui, imperturbablement, recommençant paisiblement à les balayer ? C'est un indice, mais lequel ? Une entreprise vouée à l'échec ? Le même plan que Polanski choisira pour la fin du film où les feuilles du manuscrit s'envolent dans une rue de New York (superbe affiche du film) alors que l'écrivain a tout deviné et qu'on ne sait ce qui suit l'accident et si c'est un accident ? Comme si réécrire ce manuscrit n'était vraiment pas la chose la plus importante mais y trouver un message caché, oui.
C'est diaboliquement bien construit. Ewan McGregor est épatant dans le rôle de l'écrivain, pas si naïf que cela, très observateur,, très à l'écoute des scandales liés au une éventuelle collaboration de Adam Lang avec la CIA (crimes de guerre).
Pierce Brosnan n'en fait pas trop. On est loin de ses rôles d'espion 007 dans d'autres film mais alors qui est l'espion ? Le meurtre du précédent écrivain qui a rédigé le premier état du manuscrit devient pour l'écrivain une piste à remonter comme le temps. Qu'avait-il trouvé d'embarrassant pour celui ou celle qui l'a éliminé ?
C'est une mise en scène très fine comme dans beau texte lu sur la RdL où un promeneur regarde, débonnaire, un jour de manifestation dans Paris.
Les deux femmes du film sont vénéneuses et belles mais froides. Je n'ai pas retenu le nom des actrices.
C'est un film très littéraire qui ne doit guère s'éloigner du roman d'espionnage de Robert Harris "L'homme de l'ombre". De belles trouvailles cinématographiques pour ce créateur tant contreversé à cause des dérapages graves de sa vie, loin des caméras

Christiane a dit…

controversé

Anonyme a dit…

J’ai peut-être tort, Christiane, mais je considère le Péril Bleu et Renard comme du ressort de Soleil Vert! MC. PS le Richer: « l’Astrologie comme source d’inspiration chez Nodier, Hugo, Nietzsche, Lorca, « chez Tredaniel. Plaquette qui comporte un peu trop de thèmes astraux, mais aussi des fulgurances pour qui connaît bien les romantiques et un peu Nietzsche

Christiane a dit…

Soleil vert, connaissez-vous , avez-vous chroniqué "Le péril bleu" de Maurice Renard ? M.C. l'avez évoqué dans cette atmosphère aquatique des Travailleurs de la mer de Victor Hugo. Le peu que j'ai glané sur internet évoque un roman dont la fin est poétique et imaginaire : la terre baignant dans une galaxie aquatique où se croisent, alanguis, poissons oiseaux cétacés... Une sorte de matrice, donc....

Christiane a dit…

Peut-être nous en parlera t'il. Mais merci pour cette rêverie hugolienne et l'ombre de Nerval.

Anonyme a dit…

Vous avez un moteur de recherche sur les blogs en haut. C’est bien pratique.

Christiane a dit…

"sans oublier le fameux Péril Bleu de Maurice Renard, auteur qui fut avec son manifeste le Breton du merveilleux scientifique"

Sauf, s'il y a une autre page que je n'ai pas trouvée, vous ne dites pas grand chose sur ce fameux Péril Bleu...

Christiane a dit…

C'est indiqué comme une des recherches de Maîtres du vertige de Lehman.

Christiane a dit…

J'avais trouvé ceci sur Noosfere : "(...) Au-dessus du Bugey, dans l'Ain (...) une force mystérieuse entre en activité, qui attire dans l'atmosphère bêtes, objets, gens. On accuse les «Sarvants» — les esprits — jusqu'à ce qu'un astronome découvre qu'à 50 000 mètres d'altitude, plus haut qu'aucun aérostat ne peut aller, une structure mystérieuse et fixe plafonne dans le ciel. Par déductions, ainsi que par le carnet d'un captif céleste redescendu sur Terre avec son cadavre, l'humanité apprend que la planète est en réalité composée de deux enveloppes concentriques et qu'au-dessus des hommes, à cinquante kilomètres de haut, vit et prospère une civilisation arachnide d'êtres intangibles, invisibles, des créatures « pétries de gaz ou formées de rayons X, comme nous sommes faits de substance charnelle ». Pour eux, l'atmosphère est, comme pour nous, une mer profonde, où glissent d'étranges poissons lourds. En fait, les «Sarvants » ne sont pas nos ennemis, ce sont des pêcheurs d'hommes, qui abandonneront leurs activités quand ils en viennent à comprendre que les humains sont des êtres pensants, avec qui toutefois toute communication est impossible, chacun des deux mondes existant dans un plan différent : c'est Le péril bleu de Maurice Renard."

Donc, les poissons ce serait, nous, les humains et les bêtes peuplant la terre... C'est gai !
Je n'suis pas un poisson !!!!

Christiane a dit…

Hier, j'écrivais : "Ça me rappelle la vie cabossée de Galeux, ce si beau personnage de Stephen Graham Jones . J'avais bien aimé votre présentation de ce grand roman."
Aujourd'hui, grâce au commentaire de M.C., je relis "Les travailleurs de la mer" de Victor Hugo. Je retrouve ce passage qui est très proche de l'univers de Galeux. C'est sur Gilliatt enfant et sa mère.
"Qu'est-ce que c'était que cette femme ? Et pourquoi cet enfant ? Les gens du pays n'aiment pas qu'il y ait des énigmes sur les étrangers. (...)
D'où vient qu'il vivait solitaire ? Le Bû de la Rue était une sorte de lazaret ; on tenait Gilliatt en quarantaine (...) et qu'on le rendît responsable de la solitude qu'on faisait autour de lui. (...) Il hantait le dolmen de l'Ancresse et les pierres fées qui sont dans la campagne ça et là. (..) il jouait dans les rochers au bord de la mer, à la nuit tombante. (...) On n'était pas sûr que Gilliatt ne fît pas des charmes, des philtres et des "bouilleries". Il avait des fioles.
Pourquoi allait-il se promener le soir, et quelquefois jusqu'à minuit, dans les falaises ? Gilliatt, selon toute apparence, faisait œuvre de nuit. Du moins, personne n'en doutait. (...)
Généralement on le croyait marcou, quelques-uns allaient jusqu'à le croire cambion. Le cambion est le fils qu'une femme a eu du diable."

Oui, très proche du Galeux....

Anonyme a dit…

Et qu’est ce que le Marcon, mon presque homonyme?!

Christiane a dit…

marcou....
Celui qui a hérité de ses ancêtres la maîtrise du feu

Christiane a dit…


Ou, plus en détail :

https://fr.wikisource.org/wiki/Les_Travailleurs_de_la_mer/Partie_1/Livre_1/5

Christiane a dit…

Vous me faites rire, M.C. avec vos questions.
Je redécouvre ce roman si magnifiquement écrit.

Christiane a dit…

Et voilà à la fin du livre premier, chapitre XII et suivant, ce que je cherchais. Gilliatt pour remettre à flot la Durande pénètre dans une grotte sous-marine. C'est là ces pages qui ont dû passionner Richer.
"Une fois, Gilliatt, furetant, s'aventura dans une de ces fissures. L'heure de la marée s'y prêtait. (...) Les embranchements de ce souterrain sous mer communiquaient par plus d'une issue, lunes béantes au niveau du flot et autres profonds entonnoirs invisibles. (...) Un pas de plus, Gilliatt tombait dans une eau peut-être sans fond. Tout cela était éclairé d'en bas à travers l'eau. C'était on ne sait quel resplendissement ténébreux. (...) une sorte d'arche noyée. C'est par ce porche submergé qu'entrait dans la caverne la clarté de la haute mer. Jour étrange donné par un engloutissement. On pouvait croire qu'on venait d'enjamber dans une autre planète. La lumière était une énigme. L'eau toute pleine de cette lumière mouillée, paraissait de l'émeraude en fusion.
Une impression spectrale s'en dégageait.(...)
Il était désormais dans un songe.
A chaque gonflement de la vague, ces fleurs, baignées, resplendissaient, à chaque abaissement elles s'éteignaient ; mélancolique ressemblance avec la destinée. C'était l'aspiration, qui est la vie ; puis l'expiration, qui est la mort. On pouvait rêver de Prométhée embauchant pour Michel-Ange. (...) C'était de la lumière d'apocalypse. On avait devant les yeux une réalité d'impossible
(...) Il y avait de la chimère dans cette chose ; c'était un être, à moins que ce ne fût une apparence. Elle semblait se diriger vers le côté obscur de la cave et s'y enfonçait. Les épaisseurs d'eau devinrent sombres sur elle. Cette silhouette glissa et disparut, sinistre. "

Christiane a dit…

Un autre passage attendu, plus métaphysique qui éclaire votre remarque sur l'absence de Dieu.
"Nous sentons dans cette obscurité le mal, démenti latent à l'ordre divin, blasphème implicite du fait rebelle à l'idéal. Le mal complique le vaste ensemble cosmique. Le mal est présent à tout pour protester. Il est ouragan, et. tourmente la marche d'un navire, il est chaos, et il entrave l'éclosion d'un monde. Le Bien a l'unité, le Mal a l'ubiquite. Le mal déconcerté la vie, qui est une logique.
Qui l'approfondit s'y submerge et s'y débat. C'est l'étude d'un effacement. (...) Toutes les questions se développent dans l'obscurité sans bornes (...).
On est sous l'ombre. On regarde. On écoute.
Cependant la sombre terre marche et roule (...). Dans d'autres profondeurs, la goutte d'eau se fait monde, linfusoire pullule, la fécondité géante sort de l'animalcule, l'imperceptible étale sa grandeur, le sens inverse de l'immensité de manifeste (...).
L'irréductible est là.
On est contraint à la foi.
Croire de force, tel est le résultat. Mais avoir foi ne suffit pas pour être tranquille. La foi a on ne sait quel bizarre besoin de forme. De là les religions. Rien n'est accablant comme une croyance sans contour.(...)
L'ombre est un silence ; mais ce silence dit tout. Une résultante s'en dégage majestueusement : Dieu. Dieu, c'est la notion incompressible. (...)
L'univers pend ; rien ne tombe. (...)
Le ciel étoilé est une vision de roues, de balanciers et de contrepoids. C'est la contemplation suprême, doublée de la suprême méditation. C'est toute la réalité, plus toute l'abstraction.. on se voit dans l'engrenage, on est partie intégrante d'un Tout ignoré, on sent l'inconnu qu'on a en soi fraterniser mystérieusement avec un inconnu qu'on a hors de soi. Ceci est l'annonce sublime de la mort.. Adhérer à l'infini (...) Regarder l'obscurité et dire : je suis un abîme comme toi ! "


Bon, ce sera tout pour ce soir. Ce Victor Hugo devait être passionnant mais invivable !

Anonyme a dit…

En effet, il la cite comme un exemple d’onirisme hugolien, tout en insistant sur l’emprunt du mot Cave par Hugo, mais il ne s’avise pas que c’est un emprunt à l’anglais cave égale caverne. Ce qui est bien normal chez un homme qui pense que « «  l’ anglais est du Français mal prononcé « ( Journal d’ Adèle) .Je note, quant à moi, d’étranges ressemblances entre ce temple et celui d’ Isis Lilith dans la Fin de. Satan et les dessins spirites: « Son temple était mure, son prêtre était ( etc) . Et cette espèce de pieuvre-Kali, du incarnation du Mal Absolu. Il ne vous aura peut-être pas échappé, non plus Qu à Richer, que Giliatt est aussi une espèce rare: une figure de « Job-Promethee »… Bien à vous. MC. PS. Le Péril Bleu se savoure, il ne se résume pas….MC

Christiane a dit…

On y passerait la nuit avec ce livre et vos commentaires lumineux.

Christiane a dit…

Eh bien, passer du Stupide de John Fante aux Travailleurs de la mer était imprévisible ! Votre disgression Richer a introduit une atmosphère de science-fiction dans notre conversation.
Des espaces infinis où se meuvent des êtres transparents et des oiseaux amphibiens ont recouvert les mots de noir et d'infini . L'écriture et les dessins de Victor Hugo de cette épopée de l'amour perdu des Travailleurs de la mer nous a entraînés loin de la table de travail..... L'évocation de ce gouffre, cet abîme nous ont donné l'ivresse des profondeurs . D'une nébuleuse à l'autre., des formes ont surgi de ces ténèbres.
Nuit de Hauteville House... J'imaginais Hugo écrivant sous la verrière, fixant la violence lumineuse de l'océan, tel un capitaine au poste de commande. Le Promontoire du songe. ... L'océan investit l'écriture.

Au matin, soleil et bleu du ciel. J'entends que la terre souffre de sécheresse. Un mois sans pluie. L'été va être dur pour ceux qui vivent de la terre.
Au loin , Poutine s'enfonce dans sa folie de guerre.
Le ciel politique se couvre de noirs nuages.
Après ce maelstrom hugolien, je ne sais plus quel livre j'étais en train de lire...
Un peu de ménage va me remettre les idées en place.
Que devient Soleil vert ? Dans quel livre est-il plongé ? J'aimais bien, cet été, quand, allongé, il regardait le ciel bleu entre les pins.

Anonyme a dit…

Sur France Cul,un podcast sur Le péril bleu .mai 2019.

Christiane a dit…

Ah, chic alors.

Christiane a dit…


Magnifique ! Quelle belle lecture et commentaires sur ce roman de Maurice Renard.
Merci, merci, merci.

https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-nuits-de-france-culture/le-peril-bleu-un-chef-d-oeuvre-oublie-de-maurice-renard-du-genre-merveilleux-scientifique-1959927

Anonyme a dit…

Je reviens sur le parallèle Fin de Satan, travailleurs de la Mer pour observer qu’à la fin, l’Ange Liberté dissout proprement par sa lumière Isis-Lilith. Le Mal lui-même se métamorphose en lumière, la Transparence de l’une venant à bout des ténèbres de l’Autre…

Christiane a dit…

"L’ange continuait de descendre, splendide,
Dans cet effarement immense de la nuit."

Et Satan dormait...

Christiane a dit…

"L’étoile aux feux divins, plus large à chaque instant,
Météore d’abord, puis comète et fournaise,
Fondait le monstre ainsi qu’un glaçon dans la braise.
Quand l’astre fut soleil, le spectre n’était plus.”

C'est un combat immobile. Le mal fond, se vaporise....

Mais dans l'histoire humaine, le mal est puissant.
Voir le poème désespéré de Fondane mort en 1944 à Auschwitz que notre ami a exilé sur la RdL....
Franchir l'épaisseur du temps....
Je pense à son ultime solitude. :
"C'est à vous que je parle, hommes des antipodes,
je parle d'homme à homme,
avec le peu en moi qui demeure de l'homme.
avec le peu de voix qui me reste au gosier,
mon sang est sur les routes, puisse-t-il, puisse-t-il,
ne pas crier vengeance !"
( Pierre Seghers, La Résistance et ses poètes)

Christiane a dit…

La mort de Victor Hugo. Extrait d'un article du Figaro.

"Son Dieu n'est pas le Dieu caché de Spinoza, étranger au développement de l'univers; c'est un Dieu qu'il est peut-être inutile de prier, mais qu'il adorait avec une sorte de tremblement. C'est l'abîme des gnostiques. Sa vie s'est passée dans la puissante obsession d'un infini vivant, qui l'embrassait, le débordait de toutes parts, et au sein duquel il lui était doux de se perdre et de délirer."

Christiane a dit…


Voici l'article...

https://www.lefigaro.fr/histoire/archives/2015/05/21/26010-20150521ARTFIG00312-le-22-mai-1885-victor-hugo-meurt-a-paris.php

Christiane a dit…



On dit que dans la nuit du 22 mai, à 1h30, le poète s’éteint. Avant de mourir, il déclare : "C'est ici le combat du jour et de la nuit… Je vois de la lumière noire".

Anonyme a dit…

La deuxième partie de la phrase n’est pas attestée, et l’alexandrin (« C’est ici le combat… ») a pu etre fabriqué a posteriori.Decaux, dont le Hugo represente un gros effort de. Documentation sous l’influence de l’équipe de Jean Gaudon , le pense. Plus pres de nous, Judith Perignon , in La Mort de Victor Hugo ,ne le cite pas. C’est égal, il correspond bien à un homme pour qui l’antithèse est le moyen d’envisager conjointement « les deux faces de la réalité » ( Journal d’ Adèle, et Table tournante: « Homo duplex est vrai à tous les points de vue, Parle. »Hugo gnostique est une thèse qui a été soutenue par Denis Saurat. Je ne suis pas sûr qu’ils les ait lu ( Nag Hammadi, c’est dans les annees 1950! ) mais , avec son opposition monde du bien, monde du mal , il pouvait aisément recréer ce type de cosmologie. En ce sens il se détache de Milton qui n’a pas prévu d’apocatastase, et lui même d’ailleurs échoue à la rédiger. Les vers de Dieu sur la conversion de Satan sont le point faible du poème.Peut-être parce que Satan est Hugo à un point indicible. Qu’est le morceau du Déluge sinon l’exorcisme par un cataclysme de la Noyade de Villequier. ( «  le crâne décharné de la noyée immense/ Apparut, » qu’est celui de Nemrod, sinon le règlement de compte avec Dieu d’un homme qui ne trouve plus de places à conquérir comme Hugo se trouve débordé par Sa réaction poétique, qu’est celui du Christ, sinon celui du juste sublime qui hante à cette époque les dessins de Hugo, dont le. John Brown inspire par la guerre de Sécession, et qui porte comme devise « pro Christo sicut Christo? Les morceaux les moins réussis sont aussi les moins vécus ( la Prison) mais l’inverse est vrai, même si Hugo ne s’en rend pas compte….bien à vous. MC

Christiane a dit…

Incroyable, MC. ! Votre réponse est incroyable. Tout ce que vous dites de de poème et de Hugo est né , c'est évident, d'une longue fréquentation de d lectures des écrits et des biographies diverses. C'est un plaisir de vous lire.
Je pense aux encres de Hugo vues lors d'une mémorable exposition dans sa maison parisienne : "Les arcs en ciel du noir " avec beaucoup de citations, de lettres entre les salles. La lumière noire, cet homme l'avait trouvée.
Merci infiniment pour ce beau témoignage et cette superbe analyse du poème. Bien d'accord aussi sur ses faiblesses.
J'aime aussi beaucoup "Les chansons des rues", recueil moins grandiose, très fin.
Et bien sûr comme Rose qui connait le livre par cœur, "Les Misérables". nous avions longuement échangé sur les frères de Gavroche dans l'éléphant pendant que les barricades gagnaient Paris....
C'est st vraiment bien quand vous parlez d'Hugo.
Un jour, il faudra que vous me disiez pour quelles raisons vous admirez tant Malraux. Clara, plus modeste me paraît plus profonde.
Bonne. nuit très cher ami.
Pourquoi cette tension permanente entre JJJ et vous ?

Anonyme a dit…

Pas des frères, plutot des adoptes! Dans FDS, il faut aussi prendre garde aux mouvements. Chute de Satan aux connotations très nettes de tombe. « « Quelqu’un d’en haut lui cria Tombe! Les soleils s’éteindront autour de toi Maudit! ». A quoi répond la circularité ( « conquit deux fois le monde »puis l’ascension criminelle et folle de Nemrod., rendue possible par les anciens Dieux, Orphee et Melchisedech. Deux ascensions sont a noter, celle de l’ Ararat, qui est utilisé comme témoin du déluge antérieur, puis l’impossible quête d’un Dieu qui se dérobe toujours. Ascension qui se clot par une chute cosmique. On a là une sorte de réutilisation du mythe du Titan foudroyé. Même schéma dans Ténèbres avec l’ scension du Mont des Oliviers et le face à face sur fond de terreur cosmique du Christ et de Barrabas Dans la Bastille, la Liberté devait descendre sur Paris. Passons. Dans ce qui est écrit du troisième chant, Liberté descend vers le centre de la terre via le Pôle. Le Satan de Hugo semble un Satan ctonien. On l’entend rire sous le Mont des Oliviers, c’est dans le texte.Ainsi a-t-on ici une reprise du mythe titanique structurée par un ensemble de chutes, d’as.censions , de descentes, qui donne son rythme et sa puissance au poème.Et c’est tellement evident, que je ne l’avais pas remarqué !Bonne nuit! MC

Christiane a dit…

O je vais relire tout cela demain. je sens que c'est passionnant mais là je dors encore et suis un peu au ralenti. Chic alors. Du grain. à moudre. Mil mercis. Joie joie.joue.

Anonyme a dit…

Pour être complet: Satan: chute. Déluge: montée » le gouffre d’eau montait sous cette voûte d’ombre » puis arrêt. Car l’élément connaît son mystère et sa regle / le dernier flot avait noyé le dernier aigle « Decrue sur ordre Divin. isis-Lilith: circularité, invocations, déesse ctonienne en fin de poème . Nemrod Circularité ,ascensions, ( 2)
chute. Liberté: suspension de tout mouvement, stase , métamorphose. La Fille-Ange est au coeur du dispositif . le titre , Hors de la Terre II indique une sorte de préservation qui s’oppose à La Malediction initiale ( Hors de la Terre, I, chute de Satan. Le Gibet: Entrée à Jérusalem, immolation, ascension du mont des Oliviers. Face-à face Christ Barrabas, imprecations du dernier. Sur l’injustice du monde. Montée pourtant du Christ, «  et l’œil du genre humain, fremissant, continue / De regarder monter cet homme dans la nue » Hugo ici rejoint Renan. Bastille: circularité, descente. Plainte de Satan-Hugo en reprouve de ce Dieu qui est supérieur à son jaillissement poétique, ce qu’il ne peut concevoir. Et c’ est peut être pourquoi cette plainte mobilise toute le puissance lyrique de VH. Descente de Liberté . Duel avec Isis, pardon de Dieu qui tombe sur Satan. Bref un ensemble très structuré, ou ne s’intègre mal que le Chant des Oiseaux, tandis qu’on y trouve la plus belle paraphrase du Cantique des Cantiques.,,.MC

Christiane a dit…


Quel trésor ! Je vais y revenir mais d'abord pour les deux gamins recueillis par Gavroche. Les Thénardier ont eu cinq enfants : Eponine, Azelma, Gavroche, mais après lui, deux garçons. Dans la misère, les Thénardier se sont débarrassés des deux derniers. De Gavroche aussi du reste.
Quand Gavroche les recueille, il ne sait pas que ce sont ses frères et eux ignorent qu'il est leur frère.
Bien, je reviens at la fin de Satan.

Anonyme a dit…

On est tellement loin de Fante..Je ne comprends pas .

Christiane a dit…

Alors, "La Fin de Satan".
Déjà je suis étonnée que Hugo se passionne pour Dieu et Satan et méprise la religion et les prêtres.
Il est obsédé par la lutte du bien et mal, donnant comme vous le notez beaucoup de puissance au mal ( guerre (Nemrod), bois des gibets ( le Christ), pierre des prisons)
Après sa chute, il reste Lilith/Isis et l'Ange lumineux du bien.
Mais la fin est euphorique. Dans ce combat, je dirais qu'il y a match nul.
Un Dieu absent et partout le long combat du bien et du mal qui continue, parfois dans l'âme humaine, parfois dans les éléments.
La fin est difficile à imaginer...
Les romans de science-fiction sont plutôt pessimistes. L'humanité survit toujours, un peu primitive, devant faire face à des entités plutôt menaçantes et d'énormes dérèglements climatiques.
Mais vous avez raison ce poème est magnifique dans ses mouvements et les images qu'il donne à voir.
Hugo était un créateur puissant . Il nous a laissé par sa poésie, ses romans, son théâtre, ses encres, un peu , son portrait. Homme interrogeant le bien, le mal, la création, la misère, l'injustice. Un révolte, un exilé, un homme au grand coeur, dévasté par des deuils.
Dans "les Chansons des rues et des champs" il y a beaucoup de fraîcheur, de légèreté, de mélancolie aussi, des accents que j'ai retrouvés dans la poésie de Verlaine pour certains poèmes. D'autres un peu nunuches...
Quant aux tables tournantes, même si elles étaient à la mode, j'y vois le chagrin d'un homme endeuillé prêt à croire à ces balivernes pour frôler l'espérance de pouvoir communiquer avec ses êtres chéris. disparus.
Merci de cette exploration magnifique du poème "La fin de Satan" et pour "Les Travailleurs de 5 mer"

Par vous, un insert Hugo se glisse dans les belles pages de ce blog dont Soleil vert fait une bibliothèque infinie.

Christiane a dit…

Les Travailleurs de la mer

Christiane a dit…

"Anonyme22 février 2023 à 09:09
On est tellement loin de Fante..Je ne comprends pas ."
Bonjour,
C'est peut-être le chemin qui mène au billet magnifique que Soleil vert vient de mettre en ligne.


Anonyme a dit…

La fin du Satan est inimaginable parce que touchant à des zones très sensibles de la Psyché d’ Hugo qui peine à imaginer un Dieu superieur à lui pardonnant au surdoué ( Lucifer) qu’
Il est . Dieu ne peut être qu’´absent devant Hugo-Job, c’était déjà le cas dans A Villequier ; « Je viens à vous Seigneur/ Père auquel il faut croire « . Et dans l’article nécrologique sur le Suisse Imbert Gallois, avant l’exil, il lui fait dire «  je crois en Dieu parce qu’il est nécessaire » ça ne va pas plus loin. Le prouve a contrario l’échec de « Dieu », tentative de théologie apophatique qui manque son but. Là aussi la scénographie est révélatrice puisqu’elle s’intitule « Ascension dans les Ténèbres » et se clôt par la mort, mais pas par l’expression du Divin . Hugo n’est pas Jean de La Croix. « Dieu est nécessaire « parce que Hugo. Croit à la survie des âmes. Pas de manière metempsychotique avec oubli de l’identité première, comme le théorise à Jersey le « filousophe » ´Pierre Leroux, qu’il n’aime pas et déteste pour ce motif. Et d’un autre côté, Dieu ne peut être supérieur à Hugo. Voilà en deux mots les raisons de l’échec du Satan. Il existe un Dieu qui a le pouvoir de ressusciter Léopoldine , il existe un père qui en crève d’envie ; c’est dans « À celle qui est restée en France; « , à la fin des Contemplations: «  et quand , ce qu’un Dieu fit ( résurrection de Lazare)!un Père le ferait? »’et ce n’est pas Lazare qu’ Hugo ambitionne de ressusciter! Le texte est formel. Opposition donc, qui déséquilibre le texte au profit du pôle noir, mais pour notre plus grand plaisir.., MC

Christiane a dit…



"Opposition donc, qui déséquilibre le texte au profit du pôle noir"

Gilliatt dans les "Travailleurs de la mer" en donne une belle approche dans la deuxième partie, livre 1, chap.5 :
"L'oeil ouvert sur le noir. Situation lugubre ; anxiété.
La pression de l'ombre existe.
Un indicible plafond de ténèbres ; une haute obscurité sans plongeur possible ; de la lumière mêlée à cette obscurité, on ne sait qu'elle lumière vaincue et sombre ; de la clarté mise en poudre ; est-ce une semence ? Est-ce une cendre ? Des millions de flambeaux, nul éclairage ; une vaste ignition qui ne dit pas son secret, une diffusion de feu en poussière qui semble une volée d'étincelles arrêtée, le désordre du tourbillon et l'immobilité du sépulcre, le problème offrant une ouverture de précipice, l'énigme montrant et cachant sa face. L'infini masqué de noirceur, voilà la nuit. "

Anonyme a dit…

Y ajouter’autrefois chez Herscher le livre des encres polychromes du Ms des Travailleurs, qui ajoute tous ces prolongements là et plus encore….MC

Christiane a dit…

John Fante...

https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-nuits-de-france-culture/les-nuits-de-france-culture-7078708