jeudi 6 février 2025

Du thé pour les fantômes

Chris Vuklisevic - Du thé pour les fantômes - Folio fantasy

 

 

« L’âme rattrape toujours le visage »

 

Félicité et Egonia vivent en compagnie de leur mère Carmine dans une bergerie de l’arrière-pays niçois. Dans le village on craint les deux petites filles. L’une est familière des fantômes qui ne se gênent pas pour lui dévoiler des secrets de famille. L’autre laisse échapper des insectes en s’exprimant. Gare aussi à ses crachats qui flétrissent la végétation ou suscitent des efflorescences bizarres. Comble de malheur la petit Egonia est maltraitée ou plutôt mise à l’écart du petit cercle familial. Veuve d’un berger, Carmine reporte toute son affection sur Félicité. Celle-ci la quitte néanmoins pour poursuivre ses études dans la grande ville et exercer un métier en rapport avec ses dons. A la mort de la mère les sœurs tentent de se rapprocher.

 

Le deuxième roman de la niçoise Chris Vuklisevic a remporté un succès public et critique (GPI 2024). Servie par une écriture très alerte, l’autrice raconte, sur le mode de la confidence, une histoire de thé et de fantômes découpée en flash-back. L’existence de Félicité se poursuit à Nice dans son cabinet de « détective ». Les « étranges-thés » qu’elle sert à ses clients, suscitent des confidences qui une fois exprimées permettront à la « passeuse » d’identifier le spectre qui les hante et de l’inviter au repos éternel. Egonia s’est isolée dans un lieu encore plus reculé. La narration s’oriente alors vers une quête commune des origines - une aïeule tricentenaire, pensez donc !

 

Là se situe à mon avis la petite faiblesse de cette fantasy light. Les pages consacrées aux thés, aux théières, lors de l’internat de Félicité, nous emmènent aux portes d’un monde mystérieux, magique, vite refermées au profit d’une recherche des fantômes du passé qui s’étire à n’en plus finir.


23 commentaires:

Anonyme a dit…

Apparemment, vous n'avez pas été vraiment convaincu SV... Mais votre CR est néanmoins équitable... et donc, vous ne reniez rien de vos lectures.Après tout, elles peuvent susciter l'intérêt de certains amateurs de "fantasy light" de vos fans. Classieuse attitude. On en apprend tous les jours, (Le thé au harem d'archimède... Pourquoi me souviens-je de ce théorème, en vous écrivant cette notule ?) Bàv , JJJ.

Christiane a dit…

"Les pages consacrées aux thés, aux théières, lors de l’internat de Félicité, nous emmènent aux portes d’un monde mystérieux, magique,"

Du thé et des fantômes... Une association très britannique ! Un soupçon d'humour et ce livre serait un passe-thé parfait pour une longue après-midi froide et nuageuse, laiteuse...
Heureuse de lire, à nouveau, JJ-J.

Soleil vert a dit…

Je pense, et cela a du être le cas au vu du prix du grand prix de l'imaginaire francophone 2024 remporté par ce roman, que des lecteurs plus sensible que moi ont du apprécier ce texte.
Merci et a bientôt JJJ

Anonyme a dit…

Il y a aussi des rose-thé, à l'ombre bleue du figuier... (JJJ)

Christiane a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
Christiane a dit…

Page 19
"L'été se grime en hiver..."
Une phrase où l'on s'arrête...

Anonyme a dit…

C’est curieux. Résume, on peut-y-voir comme une réécriture du Conte de Perrault, Les Fées, au moins pour l’une des protagonistes. MC

Christiane a dit…

Effectivement, ça ressemble beaucoup à un conte de Perrault. La naissance des deux sœurs est un morceau de conte tout-à-fait extraordinaire. La griffue sera allaitée par une brebis tant elle mord le téton de sa mère. Et la sage-femme inversera deux lettres de son prénom avant de la déclarer de peur d'alourdir son destin.
Ainsi Agonie deviendra Egonia....
C'est très insolite comme écriture. Oui, un vrai conte !

Anonyme a dit…

C'est drôle, Ch, je viens de retrouver ce message sur la RDL... Je le copie-colle (JJJ)
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christiane dit: 15 février 2017 à 6h58
Un bon petit conte à relire… de Charles Perrault Les Fées /Contes de ma mère l’Oye :
« «… Vraiment, dit la mère, il faut que j’y envoie ma fille ; tenez, Fanchon, voyez ce qui sort de la bouche de votre sœur quand elle parle ; ne seriez-vous pas bien aise d’avoir le même don ? Vous n’avez qu’à aller puiser de l’eau à la fontaine, et quand une pauvre femme vous demandera à boire, lui en donner bien honnêtement. – Il me ferait beau voir, répondit la brutale, aller à la fontaine. – Je veux que vous y alliez, reprit la mère, et tout à l’heure. » Elle y alla, mais toujours en grondant. Elle prit le plus beau Flacon d’argent qui fût dans le logis.
Elle ne fut pas plus tôt arrivée à la fontaine qu’elle vit sortir du bois une Dame magnifiquement vêtue qui vint lui demander à boire : c’était la même Fée qui avait apparu à sa sœur, mais qui avait pris l’air et les habits d’une Princesse, pour voir jusqu’où irait la malhonnêteté de cette fille. « Est-ce que je suis ici venue, lui dit cette brutale orgueilleuse, pour vous donner à boire ? Justement j’ai apporté un Flacon d’argent tout exprès pour donner à boire à Madame ! J’en suis d’avis, buvez à même si vous voulez . – Vous n’êtes guère honnête, reprit la Fée, sans se mettre en colère ; hé bien ! puisque vous êtes si peu obligeante, je vous donne pour don qu’à chaque parole que vous direz, il vous sortira de la bouche ou un serpent ou un crapaud. »
D’abord que sa mère l’aperçut, elle lui cria : « Hé bien, ma fille ! – Hé bien, ma mère ! lui répondit la brutale, en jetant deux vipères, et deux crapauds. – Ô ciel ! s’écria la mère, que vois-je là ? C’est sa sœur qui en est cause, elle me le paiera » ; et aussitôt elle courut pour la battre… »---------------
ex / la vie dans les bois dit: 15 février 2017 à 7h07 (Marie Sasseur)
cricri fait crôa, crôa, dans l’immensité du cyberespace.

Anonyme a dit…

Bien vu ! SV

Christiane a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
Soleil vert a dit…

Dans" La ligne verte de Stephen King", le prisonnier absorbe le mal et le recrache dans la bouche sous forme de mouches.

Christiane a dit…

J'avais adoré ce film - pas lu le roman. Un mystère très crédible . La grande bataille du Bien et du Mal. Certains Justes ont lourd à porter. Le mal rôde autour d'eux. Il faut beaucoup de lumière intérieure pour que, même broyés, une bonté ineffable les envahit au moment de la mort.
Soleil vert, vous avez toujours des réminiscences justes. Vos lectures construisent en votre mémoire des bifurcations étonnantes.

Christiane a dit…

Voilà, je reprendrais bien un peu de thé avec les fantômes. Les deux autres livres étant lus et les ayant appréciés. J'en étais donc à cette naissance des jumelles tellement surprenante. Comment vont-elles grandir ?

Christiane a dit…

Il est bien ce roman, Soleil vert.
Ainsi, je lis page 46 : "Seulement parfois, une histoire n'existe pas dès son premier moment. Elle trouve ses racines plus tard, plus haut dans l'arbre, et il faut descendre ensuite le long du tronc, grimper encore quelques branches, repartir vers les noeuds du bas, ramasser les feuilles mortes et cueillir les nouveaux fruits pour en saisir tous les contours et la mesure

Christiane a dit…

C'est terrible la solitude et la douleur d'Agonie/Agonia, sa solitude, le rejet de sa mère, la jalousie qu'elle développe -si explicable - pour sa jumelle Félicité qui, elle, est choyée par sa mère.
Symboliquement c'est très très fort pour donner une image des tourments qui se cachent dans une fratrie. Ces phénomènes de jalousie, d'envie, de colère rentrée ou exprimée. L'attitude des parents aussi, ressentant, manifestant , parfois une préférence pour un de leurs enfants.
L'amour s'apprend très tôt, le désir d'être aimé aussi. La mort aussi.
Et brusquement me traverse l'actualité, un petit Émile, mort sans que ses parents sachent pourquoi, comment. Une fillette de onze ans , Louise, martyrisée en plein jour à deux pas de son collège, de sa maison. Morte.
La férocité, la cruauté, le crime, la folie sont dans ce monde. Les contes, les romans ou nouvelles par le langage de la fiction permettent d'affronter ces peurs, ces souvenirs, ces solitudes.
A part ces sensations je ne comprends pas tout de cette histoire car l'écriture est heurtée, tranchées, violente n'entrant jamais dans la complaisance, n'expliquant pas tout. Et puis , il y a plein de sortilèges. Ainsi les cheveux de Félicité qui blanchissent inexplicablement et que la mère teintera en rouge.
Effectivement, Soleil vert, cette cérémonie quotidienne du thé est très mystérieuse.
Est-ce un roman de science-fiction ? Je dirais plutôt un conte terrifiant et poignant...
Je crois qu'arrivée à la page 90, je vais être transportée 30 ans plus tard, après la disparition d'Agonie la mal aimée.

Anonyme a dit…

C’est la version versifiée des Fées, la première, à laquelle je faisais référence. MC ( les Fées ou les Souhaits ridicules!)

Anonyme a dit…

Jamais pu terminer la Ligne Verte! MC

Christiane a dit…

Du thé pour les fantômes... Je laisse le livre dans lequel je n'habite pas. J'ai regardé le début des chapitres restants. C'est trop long, trop fermé sur une façon de raconter qui me sème en chemin. D'autres livres m'attendent. Bonne soirée et merci pour la découverte. J'ai aimé les 50 premières pages....

Anonyme a dit…

Pareil. SV

Christiane a dit…

Mais c'est important, aussi, SV de se lancer à l'aventure sur un chemin d'écriture et d'aller jusqu'à cette bifurcation où on se sépare parfois du livre non entièrement lu. C'est comme se centrer sur un territoire se rapprochant le plus de nos énigmes. Territoire différent pour chacun de nous.
Ainsi, MC, qui aime votre blog puisqu'il y revient régulièrement, est comme égaré dans vos choix de lectures mais pas au point de ne plus vous lire. C'est intéressant. Chacun de vos billets - ou presque - éveille chez lui d'autres lectures. Je me demande souvent quels mots, quelles images ont éveillé à la fois son désir de rejeter ou de dauber et son désir d'occuper l'espace avec le rappel de ses lectures avec parfois l'impression que ses choix sont meilleurs. Un peu avec condescendance.
J'ai lu parfois certains ouvrages dont il parle. Ils sont assez pointus. Je les termine rarement. Par contre on partage des goûts pour Hugo, Bernanos, Racine... Il déteste des écrivains et des poètes que j'aime. Ça m'est égal. J'aime bien quand même lire ses soubresauts.
Quand je m'éloigne des livres que vous chroniquez c'est souvent parce que je me sens mal à l'aise dans l'univers de l'écrivain ou dans son écriture. Il arrive aussi l'inverse. Je m'attarde alors dans le livre, relis votre billet, essaie de comprendre ce qui m'attire dans le livre : l'univers de l'auteur , son écriture ou, plus étrangement, ce que le livre éveille en moi et qui n'est pas dans le livre. Une mémoire que je ne devrais pas avoir.
Il y a aussi les chroniques de Paul Edel. J'ai beaucoup d'attirance pour les livres qu'il chronique, la façon dont il les chronique.
Chez Pierre Assouline, c'est une rencontre avec la culture dont des livres, surtout des romans. Le fait qu'il fasse partie d'un jury teinte certaines de ses chroniques d'une autre aventure que celle d'un lecteur sans cette attache. Mais P.A et P.E écrivent aussi. Ce sont de sacrés romanciers mais ils évoquent rarement leurs livres. M.C fait des recherches. Il en parle parfois.
Bon, tout cela pour vous dire que j'apprécie votre réaction quant à ce roman de Chris Vuklisevic.

Anonyme a dit…

Je veux bien parler de La France contre les robots mais pas ici sv

Christiane a dit…

Oui, je respecte votre choix. Cet article est très intéressant :


https://www.philomag.com/articles/la-france-contre-les-robots-bernanos-visionnaire