Richard Matheson -
Le jeune homme, la mort et le temps - Folio
SF
Atteint d’une tumeur cérébrale ne lui laissant que quelques
mois de répit, Richard Collier liquide toutes ses affaires et quitte Los
Angeles sans but précis. Il échoue à San
Diego dans l'Hôtel Del Coronado, vénérable station balnéaire en bois datant de
l’époque victorienne. Séduit par les lieux il découvre dans un petit musée le
portrait d’une comédienne disparue il y a une vingtaine d’années dont il tombe
instantanément amoureux. Lui vient alors l’idée folle de la rejoindre.
Publié en 1971 ce roman du célèbre Richard Matheson présente
la double caractéristique d’être à la fois le grand format le moins original -
comparativement à Je suis une légende et l’homme qui rétrécit -
et le mieux écrit d’un auteur renommé pour ses nouvelles. L’intrigue s’appuie
sur les ressorts du romantisme initié par Chateaubriand : désespérance
d’une génération et exaltation des passions.
Pas de machine temporelle, pas de deus ex machina. Le jeune
homme rejoint sa bien-aimée par une forme d’autosuggestion hypnotisante
alimentée par la consultation de nombreux livres ou archives de l’hôtel
retraçant l’existence de cette Sarah Bernhardt américaine et la découverte
fondamentale de la signature d’un R. Collier dans un registre de l’hôtel datant
de 1896. On apprend en outre que Richard avait croisé jadis dans son collège la
vieille dame. Elle l’avait fixé alors avec intensité. Cet épisode fournit le
point de départ du film Somewhere in Time tiré du roman, tourné en 1980
avec Christopher Reeve et Jane Seymour dans les rôles titres.
Acteur et spectateur, dans le temps et hors temps, le héros
vit quelques heures de bonheur partagé dans une sorte de rêve qui contraste
avec la description minutieuse par Matheson des lieux. Elise McKenna,
hypnotisée par l’irruption de cet homme annoncée par des chiromanciennes,
franchit le pas vers un territoire commun où chacun, entre desserrement du
corset victorien et adoption de nouvelles convenances, accorde sa liberté sur
celle de l’autre.
L’amateur de littérature de genre froncera les sourcils. Mais une romance au pays de la romantasy, pourquoi pas ? Tout le monde au moins pourra s’accorder sur la beauté du titre français affranchi du peu satisfaisant quoique shakespearien Bid time return. Pour ma part cette illustration de l’Eternel retour et des espaces-temps contrariants m’a donné envie de relire certains ouvrages de Christopher Priest. Signalons également dans cette thématique Le voyage de Simon Morley de Jack Finney.
4 commentaires:
Belle proposition ! Un livre à ouvrir.
Cette phrase de la pièce de théâtre Richard II de Shakespeare :
"O call back yesterday, bid time return."
ouvre délicatement le roman :
"Ô revienne le temps jadis
Recule la marche du temps."
Richard II - acte III, scène 2
J'aime le contenu de la deuxième valise !
Un électrophone, dix symphonie de Mahler... et comme bagage à main, son bon vieux magnétophone !
Enregistrer un commentaire