samedi 2 mars 2019

Helstrid


Christian Léourier - Helstrid - Le Bélial’ - Une Heure Lumière






Happé par l’espoir de gains substantiels et fuyant un passé douloureux, Vic échoue à vingt-cinq années lumières de la Terre dans un enfer planétaire nommé Helstrid. La Compagnie y recrute des prospecteurs miniers. On ne peut trouver plus mauvaise escale pour prendre un nouveau départ. La température plafonne à  - 150 °C, les vents interdisent pratiquement toute progression hors d’un véhicule blindé et des séismes engloutissent parfois les équipages. Dans ces conditions les machines animées par des I.A sophistiquées exercent un rôle essentiel. Vic est envoyé à la tête de trois camions dans l’avant-poste N/2 pour recueillir les minerais extraits par les foreuses.


« Christian Léourier est l’un des secrets les mieux gardés de la science-fiction française ». A ma grande honte je ne démentirais pas Pierre-Paul Durastanti à ce sujet. Outre les prix reçus pour ses romans et nouvelles, la parution de deux ouvrages (Les montagnes du soleil et La planète inquiète) dans la prestigieuse collection Ailleurs & Demain impressionne. La présente novella devrait lui attirer de nouveaux adeptes.
                                                                                                    

Helstrid se lit tout d’abord comme un récit d’exploration de tous les dangers qui évoquera à certains Le salaire de la peur (merci Jean-Daniel Brèque !) et une nouvelle peu connue d’Arthur Clarke « Marche dans la nuit ». Déployant une écriture à la fois sèche et d’une étonnante richesse lexicale l’auteur immerge le lecteur dans un monde de roches basaltiques et de mousses spongieuses. Le ciel sombre et toxique, saturé d’hydrocarbures gazeux s’illumine parfois d’étranges aurores boréales. « L’homme n’est pas adapté au réel » On ne saurait mieux exprimer l’étrangeté et l’hostilité de l’Univers.


Solus in solis, seul parmi les solitaires, Vic est un homme perdu, hanté par un amour ancien, une enveloppe vide. La métaphore placée en page 3 explose dans l’épilogue. Réinterprétant les conventions de la tragédie grecque, l’écrivain exerce à la fois le rôle de l’oracle et de l’exécuteur. Rejoindre Helstrid signifie rompre définitivement avec le passé. Or le héros en est prisonnier. L’ambigüité des rapports entre Vic et Anne-Marie, l’IA du camion, ne fait rien pour arranger les choses. L’apparente sollicitude de ces machines, voulue par les concepteurs, place les passagers humains dans un environnement utérin. Fausse sécurité et impuissance c’était déjà le cocktail servi par HAL l’ordinateur du Discovery One, très très loin de la bienveillance des Mentaux de la Culture.


Récit plaisant qui se lit d’une seule traite, Helstrid m’a paradoxalement donné l’envie de me replonger dans l’excellent « Descente » de Banks.

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