lundi 25 septembre 2023

Le Golem

Gustav Meyrink - Le Golem - Le Rayon Imaginaire - Hachette

 

 

 

Le Rayon Imaginaire réédite cette année un classique de la littérature fantastique Le Golem de Gustav Meyrink. Et si l’on pouvait s’inquiéter à l’usage de la lisibilité et de la dégradation des couvertures de cette collection, il semble que Hachette se soit enfin souvenu de l’existence d’un ancêtre glorieux nommé Le Rayon Fantastique dont il était souhaitable d’honorer la mémoire.  Voyez comme les « Marie-Louise » (1) d’Albin Michel Imaginaire rendent élégamment et discrètement hommage à la défunte SF deuxième série des années 70. Prenant le taureau par les cornes, les concepteurs ont opté pour un cartonné-relié et une livrée somptueuse comportant des tranches jaspées, illustrées, un tranchefil et un signet. Le titre est inscrit au cœur d’un losange cerclé du mot hébreux אֱמֶת. Les têtes de chapitres s’ornent de représentations de diodes suggérant peut-être la filiation des robots avec la créature mythique. L’ouvrage bénéficie d’une nouvelle traduction d’Éric Faye.

  

L’action se déroule dans le ghetto juif de Prague. L’orfèvre Athanasius Pernath tente d’y rassembler ses souvenirs. Un évènement douloureux obscurcit son passé, qu’il évoque en vain. Il est malgré lui pris dans un conflit caché opposant le brocanteur Wassertrum à l’étudiant Charousek. Celui-ci par l’intermédiaire d’une tierce personne a dénoncé les agissements criminels d’un médecin fils du brocanteur.  La tierce personne, un certain Savioli, également médecin entretient une relation adultérine avec Angelina ; la jeune femme vient se réfugier chez Pernath. Ces impromptus troublent le quotidien du ciseleur qui peut néanmoins compter sur la présence rassurante du kabbaliste Hillel et de sa fille Mirjam.

  

Le personnage ou l’entité principale est absent du récit et cependant présent dans tous les esprits comme le monstre décrit par Leo Perutz dans Le Maître du Jugement dernierLe Golem qui dit-on ressurgit tous les trente-trois ans, effraye la communauté juive. La légende en fait pourtant un protecteur du ghetto, né de l’argile et de l’injonction d’un mot placé dans sa bouche ou rédigé sur son front selon les versions. Athanasius Pernath découvrira par hasard son refuge.

  

La synagogue vieille-nouvelle abri
dit-on du Golem


Le roman ne cesse de nous interpeller : « Des paroles jaillissaient d’une bouche invisible, prenaient vie, et venaient à moi. ». Un écrivain crée des personnages fictifs mais l’inverse est vrai. Des mots façonnent le réel. Un texte de loi abolit la peine de mort, un décret de 1942 ouvre la voie à un génocide. Qui sont ces Golems que nous portons en nous et délivrons au monde, porteurs de notre seule vérité ?

  

L’œuvre de Gustav Meyrink nous parvient encore étrange et fascinante, semée de mystères kabbalistiques et de phrases magnifiques  : « Le monde est là pour que nous l’anéantissions par la pensée, ai-je entendu dire mon père, un jour – c’est ensuite et ensuite seulement que la vie commence. »


(1) Un cadre blanc tramé


57 commentaires:

Christiane a dit…

Quel billet attendu... Le Golem fascine et son empreinte traverse la fiction.
Je crois que c'est Pierre Assouline qui pour moi a révélé cette entité mythique.
C'était son roman, "Golem" , qui commençait par cette citation de Samuel Beckett mise en exergue, tirée de "L'innommable" :
"Où irais-je, si je pouvais aller, que serais-je, si je pouvais être , que dirais-je, si j'avais une voix, qui parle ainsi, de disant moi ?"
Et juste après, incompréhensible, la page blanche devenue :
" Quand fond la neige où va le blanc ?", la première ligne du roman.
Merci, Soleil vert, pour ce billet si riche qui ouvre aux recherches et à la lecture.

Anonyme a dit…

A lire sans délai, « le seul roman lisible de Meyrink, « disait Borges. Ce n’est paa faux, mais quel roman! Avec un Golem psychologise…. MC

Christiane a dit…

C'était un thriller. Un personnage, Gustave Meyer, en fuite, partait vers Prague, berceau du Golem. Suivant sa route, je decouvrais les légendes de rapportant au Golem, et même une plongée dans la kabbale.
Ses racines juives permettaient à Gustave Meyer d'en apprendre plus sur ce mythe, mythe qui a hanté l'imaginaire occidental.
Peu à peu, le thriller devenait ésotérique, me rappelant un autre mythe, celui de Frankenstein, peut-être inspiré du Golem.
Pour le Golem, il trouva dans la kabbale un psaume :
"Quand je n'étais qu'une masse informe, tes yeux me voyaient ;
Et sur ton livre étaient tous inscrits
Les jours qui m'étaient destinés,
Avant qu'aucun d'eux existât."
Une masse informe, en attente...
Puis apparaissait comme dans votre billet un rabbin kabbaliste du seizième siècle, Loew, qui donna à
cette masse une apparence humaine.
C'est là qu'apparaissait le nom magique "emet", formé de lettres hébraïques, les initiales de trois mots : aleph, mem et tav. En les inscrivant sur le front de la créature, le Golem était doté d'une intelligence et d'une force véritables. Il pouvait alors défendre la communauté juive de Prague.
Mais si on retirait la lettre Aleph de son front, "émet" devenait "met", c'est-à-dire "mort".
Mais le Golem s'échappe et sème la terreur comme Frankenstein. Alors son créateur le détruisit.
Ce Golem devint un monstre hantant la fiction , récits fantastiques (Kafka, Meyrink) ou films (dont celui de Duvivier dans les années 30.).

Christiane a dit…

Une de vos passions, n'est-ce pas ?

Christiane a dit…

Mais quand je comprends que Meyrink a un autre nom : Gustav Meyer, il me semble qu'il y a comme une réincarnation dans le roman de Pierre Assouline du personnage.

Christiane a dit…

Les cafés littéraires de Prague... Meyrink fait partie des habitués du cercle de Prague. En compagnie de Kafka, Rilke et Max Brod, ils devaient aimer echanger des descriptions des rues inquiétantes de Prague et peut-être meme évoquer leurs personnages fantastiques. Prague devient dans leur imaginaire une ville magique, fantastique, luciférienne, mystique.
Meyrink est donc le nom de plume de Meyer.... et c'est sous ce nom qu'il écrivit ce "Golem".

Christiane a dit…

Je relis votre billet, important, car je n'ai pas lu ce livre.
Pernath, un artisan, orfèvre, prend peu à peu conscience d’un tourment secret qu’il porte au fond de lui, dans son inconscient. Pernath vit dans le ghetto de Prague. A-t-il vécu dans son passé un drame ? Sa mémoire est fragile . "Une zone de son passé demeure absente. Un évènement douloureux obscurcit son passé, qu’il évoque en vain. Il est malgré lui pris dans un conflit ...."
Quel rapport avec le Golem ?
Hâte de lire ce livre.

Christiane a dit…

Cette photo que vous insérez dans votre billet, Soleil vert, de la synagogue Vieille -Nouvelle de Prague, du XIIIe siècle, est donc celle où reposeraient les restes du Golem... dans le grenier de la synagogue, dit-on.
Le monstre d'argile aux pouvoirs surnaturels, serait-il en poussière ou en attente de reprendre vie ?

Anonyme a dit…

Le rapport c’est qu’il n’y en a pas vraiment, Meyrink ayant modernisé le mythe…

Anonyme a dit…

MC

Christiane a dit…

Vous voulez dire, comme Soleil vert, que l'on parle peu du mythique Golem dans ce roman ? Ce qui induit une autre recherche. Peut-être une tentation d'être un autre comme le Faust de Goethe ? Ou le personnage du roman Golem de Pierre Assouline qui porte en lui "un autre" à cause de cette opération du cerveau ? Le transhumanisme ?
Il me semble aussi, en attendant le roman de Meyrink que Prague devient un lieu où rôde le démon. Retrouverions nous certains de nos échanges sur Satan ? ( cf "La fin de Satan" de Victor Hugo)
Soleil vert s'attarde aussi sur un postulat psychanalytique : sommes-nous comme "ces Golems que nous portons en nous et délivrons au monde, porteurs de notre seule vérité ?"
Donc, un personnage ressemble au Golem dans ce roman, suffisamment pour être à l'origine du titre et des fictions qui ont suivi.
Soleil vert indique aussi cette image récurrente en tête des chapitres qui évoque un robot. Les robots sont-ils des interprétations du Golem ?
Les évènements historiques qui se préparaient à l'époque où Meyrink écrit ce roman : la guerre qui allait ébranler le monde austro- hongrois et l'Europe, sont-ils aussi une motivation expliquant la violence des évènements du récit ?

Soleil vert a dit…

Le monstre d'argile aux pouvoirs surnaturels, serait-il en poussière ou en attente de reprendre vie ?

Rassurez vous on a fait des recherches dans la synagogue sans le trouver :)

Christiane a dit…

Très drôle ! Je pensais at la fiction. :)

Christiane a dit…

à

Christiane a dit…

Meyrink a commencé son roman en 1907 . Ce livre a été publié en 1915. Il n'est donc pas impossible que la guerre ait marqué Meyer / Meyrink.
La bande dessinée "Superman" paraît en 1930, une créature de science-fiction, venue d'ailleurs pour protéger les hommes.
Y a-t-il eu une influence de la créature du Golem ?

Anonyme a dit…

Je veux dire qu’il n’est pas là ou vous auriez tendance à le chercher !

Christiane a dit…

Ah, c'est une piste. Où donc peut-il se cacher ? Je verrai cela demain en lisant le roman.

Christiane a dit…

Il y a aussi cet étrange roman de erri de Luca : "Le tort du soldat" qui contient des méditations sur le Golem (pages 31-32) :
"En hébreu "èmet" est féminin, mais devient masculin en yiddish, perdant en consistance. En hébreu elle est absolue, en yiddish elle est relative. C’est pourquoi le vieil homme qui prononce la phrase dit : « pure vérité ». Il doit la renforcer par un adjectif. En hébreu, elle existe toute seule et c’est tout. Il est des mots qui exigent le féminin, vérité en fait partie.
Mon esprit vagabonde sur ce genre de pensée qui me laissent interdit. "Èmet" est le mot écrit sur le front du Golem, l’homme d’agile qui, par cette formule, se transforme en automate vivant. La légende hébraïque de Prague inspira ensuite le personnage de Frankenstein.
Plongé dans mes divagations, le mot "èmet" monta à mes lèvres et sortit de ma bouche. Comme dans le sommeil qu’un bruit interrompt et qui réveille.".

Erri De Luca, "Le Tort du soldat", récit, Éditions Gallimard, Collection Du monde entier, 2014,
pp. 31-32.
(Traduit de l’italien par Danièle Valin.)

Christiane a dit…

"Dans les livres d'Erri de Luca, les références aux écritures saintes sont nombreuses, pourtant, il est non-croyant. Il exclut la divinité de sa vie.
"J'ai, dit-il une admiration pour le format hébraïque du monothéisme et une dette comme citoyen d'Europe pour la destruction des Juifs d'Europe. C'est pour cela que j'ai appris le yiddish. J'ai le sentiment d'affection de celui qui est venu après et n'a pu faire comme réparation de la destruction de ce peuple qu'apprendre sa langue. . C'était une époque de persécution, où des gens devaient se réfugier ailleurs."

Il regrette que le gouvernement italien essaie d'empêcher les manoeuvres de sauvetage des migrants perdus en mer : "Le naufrage le plus prolongé de l'histoire de l'humanité se produit régulièrement dans notre mer Méditerranée. C'est une infamie contre laquelle j'oppose toute ma résistance, toute ma dénonciation.
La fraternité, ajoute-t-il, est une énergie qui permet à l'humanité de surmonter les obstacles, les tragédies. "
Propos recueillis par Fabienne Pasau pour la RTBF


Anonyme a dit…

Essai.

rose

Christiane a dit…

Bonsoir, Rose.

Christiane a dit…

Surtout laissez ce que j'écris ici, ici....

Christiane a dit…

Dans le domaine de l'écriture, dans l'exigence critique, les moteurs de recherches mettent à disposition des informations qui circulent avec une vitesse de plus en plus rapide, créant un savoir sans distance critique.
Un retour au livre, aux mots du livre, à l'analyse dans le calme de la lecture a une saveur incomparable.
C'est un risque car il faut oublier l'urgence.
Ainsi la façon d'interroger "La Chute de Satan" de Victor Hugo, par MC. Il fait des arrêts sur le texte qui aiguisent le discernement, font découvrir l'ellipse, les sous-entendu, les associations incongrues ou bienvenues,
la construction du poème, l'alliance des mots contradictoires.
Ainsi, Soleil vert ou Paul Edel aiment reprendre la lecture d'un livre, longuement, permettant de superposer plusieurs lectures.
Je suis heureuse, Soleil vert, que vous me permettiez d'aller lentement dans mes lectures, de faire le point au jour le jour, de lire, de relire, de lier, de délier, de m'y retrouver dans un réseau de correspondances littéraires. Votre blog devient un atelier d'écriture, de lecture, un lieu d'exploration du livre par les mots.
Ensemble nous construisons du lien, des liens, transformant la lecture en aventure - parfois pleine d'humour ou d'imaginaire.
Et toujours avec bienveillance... sans pour autant évacuer les contradictions, les certitudes et les incertitudes.
Un lieu, ici, où j'apprends à me questionner, à m'étonner, à connaître les autres et aussi moi-même, à partager.
C'est quoi un livre ? Une chance. Des mots fragiles posés contre ce qui est fermé, sans issue, la finitude du monde. Un livre, c'est ouvert, ça ouvre librement. Il prend forme et présence sous le regard du lecteur.
Nous sommes toujours différents après la lecture d'un livre.
Qui va apparaître dans celui-ci ? Qu'est-ce qui va se dévoiler ?

Christiane a dit…

Très beau billet de Pierre Assouline en ce 27 septembre. Un choix de livres vraiment intéressant.

Christiane a dit…

Surtout pour la chronique des livres de Nicolas Chemla . J'avais apprécié le recit : "Murnau des ténèbres", faisant revivre le dernier tournage de ce grand réalisateur expressionniste allemand ( Nosferatu), son art de nous faire voyager dans le surnaturel, l'imaginaire. Ce récit qu'un narrateur nous raconte est ce tournage catastrophique de "Tabou" dans les îles Marquises où Murnau subit toute une série d'accidents pour avoir paraît-il déranger les coutumes et les esprits de l'île.

Christiane a dit…

Et bien sûr, Rothko et Dürer (Melancolia)

Christiane a dit…

En attendant le livre, j'ai fait des recherches sur ce Golem.
Donc créé par le rabbin Loew quand l'empereur voulait chassait les Juifs du Ghetto de Prague.
Ce qui est intéressant c'est que le récit transmis fait état d'une fabrication imitant celle de Dieu dans la Bible (terre malaxée, souffle et paroles). Une protection toutefois car la créature était impressionnante : pouvoir le détruire si elle devenait dangereuse (en ôtant la première lettre du mot emet, la mort appelée, met, détruisait la créature.)
Pas de problème de conscience pour la détruire puisqu'elle n'était pas humaine.
Ce qui arriva quand, s'échappant elle devint menaçante.
On dit que dans cette synagogue , le rabbin et la créature se seraient mêlés en poussière.
Donc plus de Golem pour défendre les Juifs massacrés en camp d'extermination... La Shoah fut implacable.
L'histoire de cette entité mythique continue... elle devrait reprendre vie tous les Trente trois ans... poussière ou terre, qu'importe.
Dans le roman de Pierre Assouline, "Golem", ce qui est intéressant c'est la perspective de l'homme augmenté. Un mélange entre la machine (robot) et l'homme. Ce qui est une suite aux créations de Mary Shelley et Gustave Meyrink...
Dans ce roman de Meyrink, où se cache le Golem, sous quelle nature ? Passionnant.

Christiane a dit…

Quel livre magnifique. La couverture cartonnée imprimée sur papier pelliculé argent, puis couverte d'un vernis mat, puis embossée pour lui donner du relief est magnifique . Pauline Ortlieb a fait un travail magnifique.
Bravo au "Golem" Florent Salaün pour la maquette
J'ai trouvé le signet de satin.
La tranche ocre-rouge ornée de la formule magique qui donne vie au Golem est magique.
Bref, j'ai hâte de lire le texte traduit par Éric Faye et la préface de Jérémy Zucchi.
Que du bonheur !

Christiane a dit…

La préface de Jérémy Zucchi est brillante. Elle ouvre tant de perspectives....

Christiane a dit…

Déçue par les critiques du nouveau livre de Chemla. Rien à voir avec le précédent (Murnau des ténèbres ) qui était une sorte de documentaire très fouillé sur cette dernière tentative de création de Murnau.
Là, ( L'enfer) il semble s'agir d'une descente dans le pire d'une passion humaine pour le morbide. Je ne me sens pas attirée par ce livre

Christiane a dit…

Le roman, commence par une curieuse atmosphère de mystère autour d'un homme qui semble avoir des hallucinations avec une difficulté à cerner son identité.
L'arrivée d'un inconnu porteur d'un mystérieux livre est aussi insolite que l'échange involontaire d'un chapeau ayant provoqué un changement d'identité...

Anonyme a dit…

Ce qui est écrit ici ne doit pas se retrouver copié sur un autre blog sans l’autorisation de Soleil Vert.On vient pour lire les chroniques sur ce blog.

Christiane a dit…

Merci.

Christiane a dit…

Ce roman est vraiment habilement construit. Ainsi, quand le personnage qui raconte cette étrange histoire, Athanasius Pernath, s'interroge sur les voisins qui l'entourent, il ne peut le faire qu'en évoquant la légende du Golem, "cet être artificiel qu'un rabbin kabbaliste a façonné autrefois, dans le ghetto" et surtout par rapport à "cette mystérieuse syllabe" qui, si elle lui était enlevée, lui retirait la vie.
Ainsi imagine-t-il que les êtres humains pourraient s'effondrer, inanimés si "on éteignait dans leur esprit quelque minuscule concept".
Insidieusement, Meyrink déplace l'étrangeté du Golem à celle des êtres humains pouvant être manipulés à leur insu, jusqu'à être pénétrés par la présence, les pensées, les gestes d'un autre.
On retrouve les obsessions de Kate Wilhelm et même celle de Pierre Assouline quand il imagine qu'on a trafiqué le cerveau de Gustave Meyer, son personnage. Celui qui, à la fin du roman, exprime ce regret : "Je ne reconnais pas cet homme que je fus, cet étranger qui portait mon nom" ou encore, ce refus : "Non, il n'avait pas été créé à partir d'une poussière dans vie. Il n'était pas d'argile et d'électrodes mais de chair et de sang. Il se sentait déjà s'éloigner de sa vie."
Je reviens à l'excellente préface de Zucchi qui lance dans le roman de Meyrink un postulat : "chacun des habitants de l'ancien ghetto juif de Prague peut voir sa volonté aspirée afin que l'être d'argile puisse s'incarner."
C'est une écriture envoûtante, un récit fantastique que l'on a du mal à lâcher.

Christiane a dit…

Pierre Assouline - "Golem" - Gallimard

Anonyme a dit…

Quand on vous le disait…cela dit, qu’elle est la différence avec l’édition Marabout? Ou la Colombe? Bien à vous. MC

Christiane a dit…

Oui, vous le disiez sans le dire ce qui attirait ma curiosité !
(Pour la comparaison avec les autres éditions, ne les connaissant pas, je ne peux répondre.)
Toujours Zucchi dans sa préface. Selon lui, le Golem annonce bien des personnages de SF :
Frankenstein bien sûr mais aussi " les replicants de Blade Runner, Douglas Quaid dans Total Recall,... il écrit que "le roman de Gustav Meyrink semble contenir en lui bien bien des récits de la seconde moitié du XXe siècle, comme s'il avait été leur matrice ".
Il cite aussi Nexus 6 Philip K. Dick.
Pour lui, c'est "la confrontation des personnages avec leur programmation et leurs programmateurs, en quête d'identité et d'amour ."
(Un peu le noyau de "La Chute de Satan" de Victor Hugo.)
Que d'êtres inachevés ... et que de rivalités...

Christiane a dit…

Beaucoup de neige et de glace dans cette vieille ville de Prague. Les ruelles sombres et la nuit comme une opposition nécessaire.

Christiane a dit…

une poussette SANS vie

Christiane a dit…

Je viens enfin de comprendre pourquoi la neige est présente dès la première page du "Golem" de Pierre Assouline et pour quelles raisons Gustave Meyer se demande où va le blanc quand la neige fond.
Il y a tant de transmissions d'un lecteur à un auteur, comme de se passer le témoin dans une course de relais.
Ce n'est pas grave de chercher le sens de sa vie entre la naissance et la mort, il peut y avoir tant de bifurcations...

Anonyme a dit…

Gustav Meyer, ou Gustav Meyrink? Il y a de quoi se tromper!

Christiane a dit…

Gustave Meyer (Golem -Pierre Assouline). Eh oui, c'est troublant ! Surtout quand on est plongé dans le Golem de Meyrink.
Au début du roman on n'y pense pas. Une clinique... la neige... un homme , Gustave Meyer, attend d'être reçu par son neurochirurgien, le professeur Robert Klapman. Il souffre de migraines terribles depuis son opération..
En attendant, il regarde la neige... et sa bibliothèque. Surpris par certains livres sur la kabbale, une anthologie de Borges, les essais d'un philosophe sur le transhumanisme, des traités d'échecs, deux volumes de primo Levi
..
Il regarde aussi un Rothko dans la salle d'attente..

C'est un champion d'échecs..

Christiane a dit…

Oui, Pierre Assouline s’est emparé de cette vieille légende du Golem pour en donner une version très contemporaine, où se mêlent des considérations médicales et philosophiques, liées aux théories du trans-humanisme.
Que va-t-il découvrir en mettant la main sur son dossier médical ?
Roman policier ou de science-fiction ?

Christiane a dit…

D'autant plus que lorsque j'ai lu ce roman, je n'avais pas lu "Golem" de Gustav Meyrink et ne connaissait rien de Gustav Meyer...

Christiane a dit…

Dans le chapitre X, j'apprends beaucoup de choses sur le Zohar , le «livre de la splendeur», un traité ésotérique juif, dont l'influence égalerait celle du Talmud, sur sa doctrine ésotérique. Un texte rare écrit en chaldéen, en araméen, en hébreu.
Une vie entière en questions. Dont une : pour quelle raison les textes hébraïques sont écrits seulement avec des consonnes ?
Et une réponse possible : "il incombe à chacun de trouver lui-même les voyelles secrètes lui permettant d'accéder à un sens destiné à lui seul."
Son rapport avec "le jeu de tarot qui contient 22 atouts - soit exactement le nombre de lettres de l'alphabet hébreu".

Anonyme a dit…

Le chapitre X d’Assouline? Pas de souvenir de ça dans Meyrink!

Christiane a dit…

J'ai retrouvé la citation que Soleil vert présente à la fin de son billet :
"Le monde est là pour que nous l'anéantissions par la pensée, c'est ensuite seulement que la vie commence."
Cette pensée éveille en ma mémoire les années philo : il y a quelque chose que l'on ne peut voir ni faire voir, qui ne peut pas être vu. Quelque chose d'informe, d'imprésentable. Une sorte d'abstraction vide à la recherche d'une image negative de l'infini.
On pense au "carré blanc" de Malevitch... au blanc de la neige qui entoure les personnages du Golem. Faire voir en interdisant de voir.
Une sorte de retrait du réel.
Je crois que c'est cela qui m'a attirée dans le dernier billet de Pierre Assouline, non pas les trois livres présentés mais le Rothko et la "Melancolia" de Dürer qui me ramenaient inconsciemment à son roman "Golem". Comme s'il participait à nos lectures, ici, à travers deux œuvres d'art.
A Proust, Joyce, Beckett, Borges qui tous se heurtent à quelque chose qui ne veut pas se rendre présent.
Trop de temps...
Ce Golem qui ne cesse de se réincarner dans tant de personnages romanesques finit par être la conscience intérieure du temps.
La réponse est : anéantissons, témoignons de l'impresenté de l'homme en interaction avec tout ce qui constitue l'univers malgré la blessure de la fin du XXe siècle.
Le mythe est le genre originaire qui met au jour les terreurs secrètes de chacun dont celui du Golem.
L'écriture fait ce même travail d'exploration. Elle veut dire ce qu'elle ne sait pas dire, l'enfance de l'événement, le visible et l'invisible.

Christiane a dit…

Mais non !!! Le chapitre X du Golem de Meyrink !!!

Christiane a dit…

Page 236.
"Allez-y, posez-moi votre question, monsieur Zwakh.
- - - Savez-vous des choses sur la doctrine ésotérique du judaïsme - la kabbale, Hillel ?
- Un peu, seulement.
- J'ai entendu dire qu'il existait un ouvrage permettant de s'instruire sur la kabbale : le "Zohar" - -
- Oui, le Zohar - le Livre de la Splendeur.
(...)
- Donc ce texte (...) En un seul exemplaire, qui plus est au musée de Londres (...) Et par dessus le marché, écrit en chaldéen, en araméen, en hébreu (..)"
Le Golem - Gustav Meyrink. Chapitre X.

Christiane a dit…

Et il n'y a que neuf chapitres dans le roman "Golem" de Pierre Assouline.

Anonyme a dit…

Et elle ne le dit que partiellement, ou incomplètement en certains cas.,. Bien à vous. MC

Christiane a dit…

Attention, le fou-rire me guette !

Christiane a dit…

Oui...

Christiane a dit…

Fin du roman de Gustav Meyrink, parfaite.

Anonyme a dit…

Beau travail, non ? MC

Christiane a dit…

Oui, absolument.
Revenez à "La fin de Satan" (sous le billet aux nombreux commentaires). J'ai compris quelque chose d'important grâce au billet de Paul Edel.

Anonyme a dit…

Volume de qualité bibliophilique, compte tenu de ce qu’on trouve actuellement….MC