vendredi 5 août 2016

Vostok


Laurent Kloetzer - Vostok - Denoël Lunes d’encre








Après avoir entraîné ses lecteurs sur les chemins spéculatifs de Cleer et d’Anamnèse de Lady Star dont l’ écriture brillante à deux mains fut plusieurs fois récompensée, Laurent Kloetzer, cette fois en solo, leur propose une excursion au fond de l’Antarctique. Rien de plus passionnant que la relation de ces expéditions an bout du monde, purs témoignages à l’image de Seul de l’amiral Byrd, ou fictions hallucinantes comme Les aventures du Capitaine Hatteras de Jules Verne. Là-bas, une nature hostile brise l’acier comme la volonté. Plus terribles que le froid, l’homme y livre des combats intérieurs insensés. La neige efface les détails, écrit l’auteur. De fait on dirait que l’univers s’emploie inlassablement à gommer la verrue humaine, au profit d’une éternité en forme d’horizon blanc sans limite ou comme dans Vostok, symbolisée par un lac souterrain immémorial.

Le roman de Laurent Kloetzer est tiré d’un récit du glaciologue Jean-Robert Petit. Vostok, en effet, existe. Il s’agit d’une base russe fondée dans les années 50, située au pôle sud magnétique. L’écrivain a ajouté des protagonistes imaginaires dont le journal d’expédition fait écho aux aventures contemporaines des héros.    L’ imprégnation glaciaire n’en est que plus forte dans l’esprit du lecteur et contraste avec le récit rocambolesque de membres d’un cartel chilien venus dans l’Antarctique récupérer un mot de passe verrouillant l’accès à une banque de données d’un gang adverse.

Trois narrations structurent Vostok, comme autant de paliers d’un escalier descendant dans l’enfer neigeux. La première a pour cadre un Valparaiso légèrement futuriste où le gang des Andins, maître de la météo, s’oppose au Cartel et à ses dirigeants, Juan Albornoz et sa sœur Léonora. Il y a un peu de Scarface dans la description des liens privilégiés unissant ces deux-là. D’ autres personnages s’invitent lors de l’épopée antarctique : Veronika Lipenkova, l’auteure fictive et décédée du journal de l’expédition soviétique des années 50, Vassili, rescapé de l’époque héroïque et spécialiste des carottages glaciaires, embarqué de force par les chiliens, et enfin un ghost confident de Leonora.

Les fantômes, comme la folie, s’invitent dans le derniers tiers du roman, où comme attendu un hiver impitoyable s’amuse à casser hommes et projets et soumet les protagonistes au jeu ultime de la survie. Tout cela, action, personnages, se tient et aboutit une fois de plus à une réussite romanesque.

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