Don Carpenter - Un dernier verre au bar sans nom - 10/18
San Francisco fin des années 50. Un petit groupe de
jeunes gens assidu des bars de North Beach rêve de littérature. Tous espèrent
suivre les pas de la Beat Génération. L’un d’entre eux, Charlie Molène, attire
l’attention de la jeune Jaime Froward. Lui est un ancien soldat décoré de la
guerre de Corée, elle, la fille d’un journaliste alcoolique. Tous les deux
fréquentent les bancs de l’Université d’Etat de San Francisco. Une des
dissertations de Charlie remporte un prix et lui vaut une bourse. C’est
l’ébauche d’un roman de guerre. L’ex héros aimerait publier un ouvrage à la
hauteur du Moby Dick d’Herman Melville. Jaime, plus douée que son conjoint,
met un temps en veille ses propres ambitions littéraires pour se consacrer à
son nouveau foyer. Le couple marié file alors en Oregon à Portland. Ils
croisent la route de Dick Bonet, écrivain débutant qui a réussi à placer une
nouvelle à Playboy et surtout celle de Stan Winger, petit cambrioleur paumé à
qui Charlie, entre deux allers-retours à la case prison, enseigne les rudiments
de l’écriture.
Un dernier verre au bar
sans nom est un roman posthume de Donald Richard Carpenter dit Don Carpenter.
Récupéré 20 ans après le décès de l’auteur et révisé par Jonathan Lethem, il reprend
et condense des thèmes abordés dans ses précédents livres : l’univers
carcéral de Sale temps pour les braves, la confrontation des rêves
d’adolescence et de la réalité adulte de La promo 49. Plus généralement les
ouvrages de Carpenter, comme ceux de son ami Richard Brautigan et au-delà ceux
de la Beat Génération puis de la Contre-Culture mettent en scène des
personnages à la marge, éprouvant des difficultés d’intégration ou
redéfinissant à leur manière l’American Way of life.
Le destin des protagonistes d’Un dernier verre au
bar sans nom suit des tracés divers. Jaime Froward devient une romancière à
succès. Son mari échoue dans sa propre entreprise littéraire. L’échec met à
jour l’existence d’une rivalité dans le couple. Pire il casse l’image du héros,
du père substitutif que tenait Charlie dans l’esprit de Jaime. Charlie
personnage fitzgéraldien part à la dérive. A l’inverse Stan Winger à
l’isolement dans une cellule rencontre l’Illumination. Survivre c’est se
reconstruire pour sortir de soi-même. Ce qu’il entreprend avec la patience et
l’obstination du héros du film de Bresson Un condamné à mort s’est
échappé.
Avant de se noyer dans l’alcool, les recalés de l’écriture,
nous dit Carpenter, peuvent tenter leur chance auprès d’Hollywood. Cela nous
vaut des pages au vitriol sur le métier de scénariste et un peu d’humour dans ce
livre très attachant qui célèbre les écrivains.
3 commentaires:
Vendu camarade !
c'est du bon !
Je te fais confiance pour ça !
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