Peter Watts - Starfish - Fleuve Noir/Pocket
Peter Watts appartient à cette catégorie d’écrivains qui transposent directement leur vécu professionnel dans leurs œuvres. Il tire de ses travaux de biologie sous-marine des récits en huis clos dans lesquels les personnages placés dans des environnements extrêmes affrontent davantage leurs démons intérieurs que des dangers extérieurs.
Starfish et les deux romans qui forment le cycle des « Rifteurs » ont été publiés à l’origine avant Vision Aveugle, alors que l’ordre de parution a été inversé en France. Bonne décision des éditions Fleuve Noir, puisque Vision Aveugle s’est imposé comme un ouvrage de science – fiction de référence. Qu’en est t’il de Starfish ?
Quelque part dans les abysses du Pacifique, une poignée d’hommes et de femmes assure l’exploitation et la maintenance de Beebe, une station géothermique. De profondes modifications génétiques leur permettent de survivre et de travailler au quotidien dans cet enfer silencieux. Plus inquiétant, leur profil psychologique laisse entrevoir de sérieuses altérations : Lenie Clarke le chef d’équipe a subi dans le passé des violences physiques, Fischer est un pédophile, Brader souffre de tendances suicidaires … Cependant, entre horaires décalés et stratégies d’évitement, un équilibre relationnel s’établit entre les occupants de la station. Jusqu’au jour où deux d’entre eux prennent un peu trop le large et ne reviennent pas, ce qui incite leur employeur à dépêcher un psychiatre.
Abyss vient bien entendu à l’esprit lorsqu’ on résume Starfish. Pourtant le roman de Peter Watts est à cent lieux du blockbuster hollywoodien. Semblables en cela à l’équipage du capitaine Nemo, les personnages coupent le contact avec la surface, avec « les sécheux ».
Vivant dans une semi obscurité permanente, les yeux perpétuellement couverts d’une membrane protectrice, ils offrent le spectacle de vampires. Dès qu’ils en ont la possibilité, ils sillonnent le rift, leur nouveau domaine.
L’exploration des failles psychologiques et en premier lieu celles de Lénie Clarke occupent les deux premiers tiers du roman. Le souvenir de violences sexuelles et une forme de dépendance à la maltraitance perturbent son activité de chef d’équipe en particulier dans la gestion des conflits. L’intrigue proprement dite démarre dans le dernier tiers du livre et se prolonge dans les romans suivants. Mais cela ne déséquilibre pas Starfish, malgré une fin (provisoire) en point d’interrogation.
A ces qualités romanesques somme toute traditionnelles s’ajoutent des incrustations sciences fictionnesques comme les gels intelligents et d’autres que nous … ne dévoilerons pas, le tout étayé par la lecture d’ouvrages et de revues scientifiques dont la liste est obligeamment fournie en fin de volume. Les parallèles entre ce livre et Vision Aveugle ne manquent pas. Le premier a certainement servi de prototype au second.
Peut-on rédiger un ouvrage de science-fiction alliant les vertus du genre et l’élaboration de personnages consistants ? Peter Watts répond par l’affirmative.
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