Gustav Meyrink - La Nuit de
Walpurgis - Marabout
Roman presque aussi connu que Le Golem et se situant également à Prague, La Nuit de Walpurgis raconte un soulèvement populaire alimenté par l’apparition fantomatique du célèbre chef de guerre Jan Žižka et les idées de l’anarchiste russe Kropotkine. Tout commence un certain 30 avril où l’acteur Zrcadlo apparait, comme possédé, dans divers lieux fréquentés par l’aristocratie de la cité, faisant surgir vérité et secrets enfouis au cœur des personnages interpellés.
S’ensuivent diverses séquences mettant en scène quelques
personnages pittoresques, comme le « médecin de la Cour »
Thaddée Flugbeil surnommé « le Pingouin », la Comtesse Polyxena
Lambua, l’étudiant Ottokar, amant de celle-ci. Chacun d’eux voit surgir son
double, celui de la jeunesse pour Thaddée jadis épris de le bohémienne Liesel,
celui d’un portrait pour Polyxena, le masque de l’ambition pour Ottokar.
Le récit revisite les lieux célèbres de Prague, La « Tour
de la Faim » une ancienne prison épicentre de la révolte, le quartier haut
perché de Hradschin, sorte de Cité Interdite surplombant les faubourgs miséreux
de la cité.
Bien sûr c’est de folie dont il s’agit dans ce texte tourbillonnant de 1917 écho de l'insurrection russe, et où l’on se perd parfois, mais quoi de plus déraisonnable et de plus beau que le renoncement à l’asservissement ?
88 commentaires:
Gustav Meyrink avait avec la vieille ville de Prague un rapport fantastique, tourné vers son passé, ses mythes, ses légendes. Une rêverie où les morts influencent les vivants.
Je suis heureuse de cette évocation rare de ce livre qui est plus fort quin roman, comme la été Golem. Cette nuit de Walpurgis voilà une histoire à déplier lentement. Merci Soleil vert. Mais avant j'ai quelque chose à vous écrire ire sous le billet précédent.
qu'un roman comme l'a été Golem
Le Golem s’il s’agit de Meyrink, Golem, c’est Passou. Mais je ne suis pas arrivé à adhérer à cette Nuit du Walpurgis, dont j’ai dû me délester, je pense…. MC
En fait Borges dit justement à mon sens qu’ à part le Golem, il n’y a pas grand chose dans Meyyrink, et pour l’avoir lu( ça et l’ Ange à la Fenêtre d’ Occident) Je suis assez d’accord….
Jean-Jacques Pollet écrit une préface pertinente pour ce roman de Meyrink.
Il note un paradoxe entre le grotesque, "la parodie d'un roman initiatique, prophétique " et l'invisible, entre l'humour et le terrifiant ( la nuit, l'influence lunaire, les fantômes ...) sans oublier "les noces magiques d'un amour idéal, la réalisation du couple alchimique", soit "la rencontre avec le double, que l'on retrouve dans presque tous les romans meyrinkiens".
Il analyse en quelques pages les caractéristiques du fantastique pragois,
en particulier le mythe vampirique ( se régénérer par le sang / présence de vampires) qu'il transpose à l'Histoire, aux conflits mondiaux . Il oppose deux auteurs, H.H. Ewers pour qui l'humanité a des accès de frénésie sauvage où elle a besoin de sang "pour retrouver sa jeunesse et sa vitalité" et Gustav Meyrink pour qui, au contraire, ces moments de fureur servent à la libérer de ses démons". Deux écrivains qui ont cultivé le genre fantastique dans un temps où émerge la psychanalyse, la découverte de l'inconscient, la libération du Moi, et la conviction occultiste,l'effet ésotérique.
La nuit de Walpurgis serait donc, "la nuit où les fantômes se libèrent, une nuit cosmique. Le haut et le bas vont s'inverser. Des évènements vont éclater...."
Donc un acteur somnambule....
MC
Quant à trouver que « la nuit de Walpurgis est la nuit où les fantômes se libèrent », c’est peu génial…
MC ( décidément!)
Peut être qu’à force de nourrir les Golems ils finissent un jour devant nous,je pense au retour eventuel des dictatures
"Tout commence un certain 30 avril où l’acteur Zrcadlo apparait, comme possédé, dans divers lieux fréquentés par l’aristocratie de la cité, faisant surgir vérité et secrets enfouis au cœur des personnages interpellés. "
Je reprends votre présentation, Soleil vert.
Oui, cette scène est impressionnante. Elle se passe à Prague , commence par l'irruption du somnambule Zrcadlo qui apparait dans la cour du château du baron Elsenwanger, une nuit. Un long hurlement sourd venant du jardin annonce son arrivée.
Alors que les invités arrivent pour une partie de whist.
Alors que cette société se levait pour gagner la salle à manger...
Bien sûr le pont sous lequel coule la Moldau sépare son monde, le ghetto sur l'autre rive, le monde d'en bas de celui du château...
C'est là qu'entre en scène un des personnages, le médecin de la Cour impériale Flugbeil, dit le Pingouin. Le seul qui a la présence d'esprit de soigner cet intrus blessé par sa chute du mur du jardin qu'il tentait de gravir.
Intrus reconnu par le valet de chambre. Il s'appelle Zrcadlo, ce qui signifie en tchèque miroir. Il logerait chez Lisel la Bohémienne. ( bien connue du médecin). Ils habiteraient dans la ruelle aux Morts "là où vivent toutes les filles de mauvaises vie..."
Le médecin reconnaît un cas de somnambulisme coutumier lors de la pleine lune.
Zrcadlo, est grand, maigre, possède un visage étroit, des lèvres pincées. Il est fardé comme un acteur. Le médecin trouve qu'il ressemble à un pharaon de l'Égypte ancienne.
Lisel la Bohémienne que l'on a envoyé chercher arrive. Elle est âgée mais avec assurance, d'une manière tranquille et hautaine, elle s'avance vers le somnambule, l'attrape par la main et le conduit vers la porte et disparaît avec lui.
Le médecin est gagné par une sourde angoisse.
Il les a déjà rencontrés.
Voilà un bon début de roman fantastique , on pense à Edgar Poe, à Hoffmann. Des forces obscures sont en jeu dans ce début de roman, à l'atmosphère fantastique. Prague , lieu de légendes où le passé est toujours prêt à ressurgir. Comme dans "Le Golem" deux quartiers s'opposent de chaque côté de la Moldau, l'un aristocrate, l'autre, le ghetto où règne la misère et la pègre. Le Pont de pierre entre les deux.
"Une fois chaque année, le 30 avril, revient la nuit de Walpurgis, celle où sorcières et démons de donnent rendez-vous...
Liesel la Bohémienne
Le Golem de Pierre Assouline a une particularité, c'est que son héros, le joueur d'échecs, Gustave Meyer porte le Golem en lui. Quintessence du double.
Meyer est également le patronyme de Meyrink.
"Gustav Meyer voit le jour dans une semi-clandestinité à l'hôtel Au bouc bleu (Zum blauen Bock), où sa mère, la tragédienne célibataire Marie Meyer (de) fuyant Stuttgart pour Vienne, a rejoint sa sœur aînée, la soprano alors au sommet de sa gloire Louise Dustmann-Meyer (de). Le père, alors âgé de cinquante neuf ans, est un homme marié, père de sept enfants, le baron Karl von Varnbüler (de). Ministre des Affaires étrangères du Wurtemberg, il exerce de fait les fonctions de chef d'état du royaume. À l'état civil autrichien, Marie Meyer, qui a vingt sept ans et depuis deux ans fait partie de la troupe du théâtre de la cour royale (de) de Stuttgart, déclare avoir l'année précédente épousé dans cette ville un certain Karl Berg et l'acte de naissance enregistre l'enfant sous le nom de Gustav Berg. Celui-ci est baptisé au temple luthérien.
Gustav Meyer ne se départira jamais d'un profond ressentiment nourri à l'endroit de sa mère, qui aura été négligente sinon absente. Dès 1891, il prendra pour nom de plume le patronyme d'un lointain ancêtre maternel qui fut officier dans l'armée de Saxe, Meyrink. En 1901, l'état civil de Bavière entérinera l'usage et Meyrink deviendra le nom officiel de l'écrivain. Quand en 1919 Gustav Meyrink, désormais célèbre, se verra proposer par ses demi frères et sœurs, proches de Bismarck, d'adopter leur nom de Varnbüler von und zu Hemmingen (de), il refusera poliment."
Wikipedia
Certes, il fut batard! . Cela justifie-t-il des romans médiocres?! MC
Ottokar.. l'étudiant. Ce songe qui devient réalité est bluffant. Un évènement à la fois réel et irréel. Cela se passe sur un banc à la cathédrale. Ottokar est plongé dans une contemplation méditative. Il songe à sa chimère, Polyxena. Cette jeune femme qui n'existe que dans ses rêveries. Dont le portrait le hante Quelque chose s'enclenche et fait dévier le réel. Il connaît la jeune fille assise près de lui dans l'avoir jamais vue. Elle aussi semble le reconnaître. Elle est comme un double d'une présence disparue... Polyxena... Celle dont le portrait de trouvait dans le château du baron Elsenwanger.
Ils disparaissent et réapparaissent l'un et l'autre au moment où le désir les appelle.
Le médecin de la Cour impériale vit le même dédoublement avec Liesel la Bohémienne.
L'acteur Zrcadlo, le somnambule est lui aussi hanté par une présence en lui. Son corps sous l'influence de la lune semble échapper à la pesanteur du réel. Les miroirs ne reflètent plus le réel. Comme des souvenirs qui reprennent vie.... et se déploient soudain.
Ce roman semble construit sur l'apparition du double imaginaire que les personnages portent en eux. Deux espaces-temps matérialisés par des apparitions fugitives.
C'est un peu ce qui se passe quand nous rêvons parfois et que des êtres viennent nous tenir compagnie, parlent, agissent dans des situations inconnues de nos souvenirs. Des êtres aimés qui soit ont disparu soit ont changé d'âge, d'apparence.
Ce roman est comme un film où se superposeraient des espaces temps différents. Comme si des êtres venus du passé se coulaient dans des êtres vivants pour revivre un supplément d'existence jusqu'à les faire basculer dans une folie collective..
C'est aussi l'influence de la psychanalyse. Qui sommes-nous ? Quelle part de ténèbres se cache dans nos inconscients, prête à se révéler comme un spectre.
Ainsi le médecin de la Cour impériale écoutant Zrcadlo ,
Inventer toutes les explications possibles s'interroge : "Comme c'est curieux ! Voilà que par la bouche de quelqu'un qui m'est absolument étranger, font je ne sais ni qui il est, ni ce qu'il est, me parle mon propre Moi ! Peut-on vivre sans posséder un Moi ? Ce doit être ce vin trop fort qui me monte à la tête !"
Me voici au milieu du roman, page 117, entrant dans l'univers de l'invisible... Que se passera-t-il le lendemain du 30 avril, le lendemain de la nuit de Walpurgis ? Le réel va-t-il retrouver ses assises ? Les morts cesseront-ils d'influencer les vivants ?
Que va écrire Gustav Meyrink de plus sur les êtres habitant cette ville étrange où il est dangereux de franchir le Pont de pierre qui mène au Hradschin dont l'aristocratie semble vivre hors du temps et cette tour de la Faim, hantée quand on vient de la ville "d'en bas"?
Cette ville de Prague qu'il construit par son écriture pour en faire un lieu d'un fantastique bien inquiétant.
font / dont
Là, je cale. Trop de sang, trop d'horreur, trop de violence. Ottokar se laisse gagner par la guerre qui n'a pas eu de fin pour la transporter en cette Prague imaginaire.
Je crois que je ne terminerai pas ce roman..
Donc ce roman devient de plus en plus envahi de fureur et de sang. Soulèvement populaire contre l'armée. Morts en cascade... Folie meurtrière... Soif de sang...
Zrcadlo alias Ottokar alias Jan Ziska est au centre de cette fureur.
Le traumatisme de la Grande Guerre teinte la vision de Meyrink. Il sent des forces hostiles partout.
La vision de Polyxena, page 136, donne bien la tonalité de ce roman :
"Elle ne savait même pas ce que c'était que des "eaux souterraines". Quelque chose dormant dans les profondeurs de la terre et qui, un jour, monté soudain inexorablement, envahit les caves, affouille les murs et effondré en une nuit les vieilles bâtisses...
Et de cette représentation inconsciente une image de dégagea : c'était du sang qui montait ainsi des profondeurs. Une mer de sang qui souffrait du sol, jaillissait entre les grilles des égouts, emplissait les rues pour aller se jeter en flots dans la Moldau.
Du sang : voilà ce que charriaient les eaux souterraines de Prague."
Je vais défendre ces batailles historiquement, elles ont bien eu lieu.dans le passé de cette nation. En revanche, l’ensemble ne me convainc pas. Plus convaincu par sGenefort, Tome 2, même s’il y a aussi des transpositions. Est-ce parce qu’elles sont plus modernes?
MC ( on a tort de lire qu’on ne lit pas à l’hôpital!)
"La Nuit de Walpurgis" se déroule également en 1917, l’année la plus terrible de la Première Guerre mondiale, qui vit à la fois l’exacerbation de la misère chez les civils, les mutineries dans les armées, la révolution bolchévique présidant au renversement de la monarchie russe, prélude à la fin des grandes dynasties d’Europe centrale. Le monde connu disparaît, non pas dans un tourbillon eschatologico-apocalyptique mais dans les convulsions d’un avenir encore embryonnaire, qui se croit meilleur parce que tel et qui tente de s’imposer face au spectre des grandes puissances traditionnelles, désormais obsolètes. La propagande communiste s’oppose au soulèvement populaire qui monte à l’assaut du Hradschin pour rétablir une monarchie nationale. Cette fois, Meyrink double l’insurrection contemporaine de références aux guerres hussites qui furent elles aussi des guerres pour la liberté opposant les humbles aux puissants. Mais il leur ôte toute finalité en les amalgamant à la négativité du conflit contemporain : il n’y a pas de guerre « juste », encore moins de « bonne » guerre. De manière significative, les insurgés agissent sous l’effet de l’illusion, aiguillonnés par un être double et sulfureux, possédant une identité humaine, celle d’un pauvre mime (...)"
Suite de l'article :
"celle d’un pauvre mime ambulant nommé Zradclo, mais qui subitement dévoile des attributs démoniaques (...)"
Le mime se suicide après avoir ordonné à l’un des insurgés, le tanneur Havlic, de l’écorcher une fois mort et de tendre sa peau sur le tambour qui rythmera la progression des insurgés. Mais c’est son double ésotérique, le Diable/Lucifer, qui est, à l’insu des insurgés, l’âme, le moteur et l’image véritable du soulèvement : trouble, sanglant, infiniment mutable." Il est vain de chercher un sens à cette histoire.
Oskar et Polyxena, qui croient être mus par l’amour, ne font que réitérer le destin de deux de leurs ancêtres qui furent tous deux des meurtriers tragiques."
Suite les références de l'article.
https://books.openedition.org/pur/49996
C'est un passage de l'article passionnant intitulé "La conversion dans l'œuvre romanesque de Gustav Meyrink" livrant les réflexions d'Anne-Marie Baranowski (p 123-141).
Il ne tentait pas de gravir le mur puisqu'on apprend plus tard qu'il était en lévitation dans un état second.
Heureusement, le roman semble se terminer au matin du 1er mai ( j'ai regardé la dernière page.) et tout sera certainement redevenu calme.
"Il (?) arrache les feuillets périmés jusqu'au "1er juin", y compris la date de : "La nuit de Walpurgis. "
Qui c'est ce "il" ?
Le 1er juin... C'est la première date que l'on repère dans le roman. Elle évoque un voyage coutumier du médecin de la Cour impériale, suivie de près par une autre date : le 1er mai - "qui apparaît en caractères rouges sur l'éphéméride accroché au-dessus de son lit."
Enfin apparaît la date du 30 avril, "avec en bas de la feuille l'annonce terrifiante : "Nuit de Walpurgis".
"Il note, comme l'avait fait son père, chaque matin tous les évènements de sa vie dans un lourd in-folio relié en peau de porc. Le journal de tous les Flugbeil de la gent mâle. La page de ce jour portait le chiffre 16117."
Le feuilletant il trouve sa vie monotone !...
Comme il s'ennuie il s'approche de son télescope pour regarder la ville. Et que voit-il ? "Le visage de Liesel la Bohémienne dont les traits sont déformés par un rire sardonique. Il est effrayé et s'attend à voir la vieille sorcière surgir en chair et en os devant lui, éventuellement à cheval sur un balai."
C'est une façon originale de commencer ce roman horrifique. Un repas , des convives, dans un vieux château... Un somnambule qui tombe dans le jardin... Un éphéméride... Un télescope... Une bohémienne...
On voit presque Gustav Meyrink devant son manuscrit, une plume à la main, consignant les premières pages de son roman, peut-être même griffonnant les visages de ses personnages...
C'est pas mal du tout ce roman d, juste un peu embrouillé. Il faut se reculer pour y voir clair.
Prague... le Pont de pierre... le monde d'en haut... le monde d'en bas.... la nuit... la legende... le soulevement... la guerre de 1914...
J'imagine découvrir cette histoire dans un manuscrit couvert de poussière, dans une malle au fond d'un grenier, au milieu de vieilles choses du temps passé ....un grenier... M'asseoir dans un rayon de lune et découvrir les premières pages...
Pendant ce temps, ici, on n'a toujours pas de gouvernement... le Président marche le long de la Seine encadré à bonne distance par ses gardes du corps... Le premier ministre démissionnaire transpire à grosses gouttes... les politiques se réunissent fébrilement... c'est la crise... Heureusement nous ne sommes pas le 30 avril ( ni le 1er ! ). Pas de sorcière en approche sur un balai volant ni de drone russe.
Bon, une fiction valant l'autre, je retourne au roman...
Vers la fin du roman , un passage poétique, hors du temps...
"Elle n'aperçoit, autour d'elle, que des images fantomatiques : une foule furieuse qui prend d'assaut le palais, un cheval renversé sur le sol, les sabots fixés à une planche verte - un jouet qui aurait pris une taille gigantesque.
Avec, à côté, le visage d'Ottokar qui semble dormir ! "Il est en train de rêver, comme un enfant qui rêve de la nuit de Noël, de dit-elle. Comme son visage est calme ! C'est à cela que ressemble la mort ? Et le sceptre ! Comme il va être content, en de réveillant, de voir qu'il l'a encore !... Mais pourquoi le tambour reste-t-il si longtemps muet ?"
Hergeisons: première apparition connue du « Sceptre d’ Ottokar » chez Gustav Meyrînk. ! Or les deux eurent en commun le même état…Et d’ici que l’un se situe intéressé même lointaine ment à l’autre pour cette raison la…. MC
Intéressant.
La nuit de Walpurgis de Gustav Meyrink parut en 1917.
Le sceptre d'Ottokar, d'Hergé en 1938. (Première version en noir et blanc)
Hergé situe cette aventure de Tintin en Syldavie, petite péninsule balkanique menacée d'annexion par la Bordure. Deux pays fictifs. Mais juste avant eut lieu l'annexion de l'Autriche par l'Allemagne nazie...
Et Hergé et Meyrink ont tous deux des origines complexes…
Comme si écrire , inventer une histoire, plusieurs histoires aboutissait mystérieusement à un dévoilement progressif de leur être par l'écriture chercheuse. Comme si le passé de leur vie à peine dévoilé était lié au devenir des aventures de leurs héros.
Le passé à été, l'avenir est dans les fictions qui n'ont pas de fin. Dans la littérature. Une vie par procuration. Ils voyagent par les livres qu'ils écrivent. "Tintin" n'a pas de parents. Les personnages de "La nuit de Walpurgis" se cherchent un double qui serait leur mémoire.
Peut-être que leur vie finit par être dans leurs fictions....
« Se cherchent un double qui serait leur mémoire ». On pourrait dire la même chose du Golem…
Mais c’est plus réussi…
MC
Je préfère aussi le Golem. Je relisais la page (lien bleu) concernant ce roman dans le billet de Soleil vert.
Je l'ai découvert grâce au roman de Pierre Assouline (Golem)qui est à l'origine de mes recherches.
C'est intéressant ce possible pour le Golem d'une recherche de l'origine.
Ne sommes-nous pas tous un peu préoccupés par la généalogie ? Un puits sans fond.
Et tant de hasards... cette nostalgie que nous avons parfois, non de ce qui a été mais de ce qui aurait pu être. De toute façon, la mémoire transforme tout ce qu'elle cherche à atteindre. Il faut si peu pour inventer un souvenir et croire que tout s'est passé ainsi....
Je ne suis pas sûr que la mémoire invente. Mais elle peut embellir! MC
Nous ne mentons pas quand nous nous souvenons, quand nous témoignons. Par exemple, être témoin par hasard d'un accident. Ce dont nous nous souvenons est vrai pour chacun des témoins, filtré par sa sensibilité. Une autre personne ayant assisté au même événement s'en souviendra différemment. Elle ne ment pas non plus. Où est la vérité ? Peut-être un peu dans les deux souvenirs. Peut-être, quelque chose d'important aura échappé aux deux observateurs justement parce qu'ils n'observaient pas, Il ne faut pas oublier l'effet de surprise, l'état émotionnel dans lequel ces deux passants étaient, ce à quoi ils pensaient au moment où c'est arrivé.
Il en est de même du passé. Nous nous souvenons à partir de nous. Embellir ? Dramatiser ? Transformer ? Oublier ?
La mémoire est un château de cartes qui n'attend qu'un souffle pour s'écrouler...
Les écrivains explorent souvent ce terrain propice aux fantasmes...
Seulement pour Meyrink ou Hergé, je ne suis pas sûr qu’ils le fassent toujours en connaissance de cause….
Commence à lire le Walton. Seigneur! Au delà des premières pages, ça sent le faux a plein nez! Ah, le coup de l’Histoire de l’ Histoire via l’un des historiens, ou les deux ! Et cet « ami imaginaire » bien commode pour dissimuler autre chose. Non, non , et non!
Bien sûr, l'inconscient ne demande pas de permission d'entrer dans le psychisme d'un être.
Voilà un mot que vous aimez répéter : non !
Vous ne trouvez pas agaçant de lire un bouquin d’un auteur estimé qui se révèle un franc ratage?!
Avec ce côté Baedeker pour vieilles anglaises?!
Et le traducteur pourrait se renseigner, qui écrit Bede avec deux accents pour Bede le Vénérable, qui n’en comporte qu’un seul!
Le ratage... C'est une notion intéressante. Ainsi, en dessinant, il ne me viendrait pas à l'idée de gommer des tracés que je trouve "ratés". Ils approchent de la forme à venir qui elle sera juste.
Mais là vous parlez d'écriture. Vous, lecteur, jugez que c'est un ratage. L'éditeur de l'a pas pensé, d'autres lecteurs non plus mais certains lecteurs, oui. C'est une question d'appréciation. Vous évoquez "Comme tu voudras" ? Il me semble que Soleil vert avait eu une réaction un peu semblable. Je ne retrouve plus le billet. Ce qui m'avait plu était lié à ce dôme, à la rencontre du passé. L'ami imaginaire ne m'avait pas convaincue.
Mais est-ce pour autant un ratage ? Peut-être...
Il me reste des pages en mémoire que j'avais aimées.
"Ou ce que vous voudrez"
"Or what you will."
"La couverture d’Aurélien Police est une réussite, qui nous fait entrer dans le tableau, en mélangeant les époques et les mondes, et en attirant notre regard fasciné par le dôme de Brunelleschi, la clef d’entrée dans l’histoire."
(Les critiques de Bifrost / Le Belial)
Je me souviens de cette couverture. Comme elle m'avait plu !
Anouk Arnal, dans le même article , écrit aussi : "Ou ce que vous voudrez" est donc avant tout une ode à la littérature, mais aussi à la culture et à la langue, sous une influence prégnante et revendiquée de Shakespeare et de son Italie imaginaire, avec une érudition gourmande et explicite. C’est aussi une déclaration d’amour à Florence, dont l’autrice nous dévoile les petits plaisirs au quotidien, du glacier de quartier au restaurant gastronomique associatif, et ses coups de cœur parmi les nombreux chefs-d’œuvre de la cité."
Oui, cela aussi m'a plu. Elle est reposante car elle exprime très bien ce que j'ai ressenti.
Pour Noosphère", René-Marc Dolhein écrit aussi une note brillante :
"(...) "Ou ce que vous voudrez" n’est pas un roman comme les autres, c’est d’abord un tour de force littéraire. Livre dans le livre, le roman de fantasy que Sylvia écrit est fortement inspiré de "La Nuit des rois", ou "Ce que vous voudrez" ("Twelfth Night, Or What You Will") de William Shakespeare, auquel Sylvia et son ami imaginaire ajoutent différents éléments fantastiques et incongrus comme des personnages d’autres pièces de Shakespeare (Caliban de "La Tempête") ou des visiteurs d’autres siècles. Alternant les chapitres où l’ami imaginaire raconte la vie de Sylvia et ceux qui déroulent ce roman de fantasy, Jo Walton se plait à les mélanger, provoquant des irruptions du réel dans la fantasy, mêlant la vie de Sylvia, depuis sa jeunesse, ses rapports difficiles avec sa mère qui ont provoqué une première disparation de son ami imaginaire, jusqu’à ses deux mariages, le premier catastrophique, le second merveilleux, transformant au passage cet ami imaginaire en véritable conscience à la Jiminy Cricket qui sauve Sylvia d’une situation effroyable, et pose la question ultime : celle de l’immortalité, de la survie d’un auteur ou d’une autrice à travers son œuvre et ses personnages.
Tout cela donne un roman rempli de pistes de réflexion, faisant feu de tout bois, parfois au détriment de la narration (les chapitres consacrés au roman de fantasy peuvent par moment paraître décousus) mais toujours stimulant et extrêmement touchant, voire bouleversant par moment. Une grande expérience de lecture."
Vous voyez, MC, je ne savais pas tout cela. J'aime les critiques qui m'agrandissent les pensées. C'est mieux que "total ratage".
Un livre , parfois, ça dérange, ça gratte. C'est compliqué. On a envie de le refermer. Et puis on se dit, - allez, encore un peu... Juste pour voir où ça mène, cette drôle d'histoire...
Une impression de marcher dans un sentier plein de broussailles, de se griffer, d'en avoir assez...
Mais je ne vous en veux pas. Par exemple, l'ami imaginaire me paraît superflu. Le pays imaginaire aussi. Mais le dôme, Florence, ces passages-là... m'ont enchantée.
Le souvenir que j'ai encore de ce roman, c'est celui d'un personnage imaginaire qui intervient souvent dans le récit. Il a peur de disparaitre si la femme qui l'a inventé meurt.
La mort de personnages célèbres a la mort de leur auteur c'est aussi un chagrin que j'ai éprouvé à la mort de certains auteurs. Ainsi Tintin à la mort d'Hergé, les personnages d'Agatha Christie, Sherlock Holmes, Hercule Poirot, Peter Pan, les personnages des contes d'Andersen, de Perrault, de Grimm. Les personnages de Virginia Woolf...
Je me souviens mieux de livres sur j'ai lus durant mon enfance que de mon enfance, incertaine. Certains jours, d'une façon inattendue, elle revient par éclats fugitifs. Je ne sais même pas si j'ai été cette enfant-là. Ce ne sont que frôlements du passé , des peurs parfois... Mémoire obscure... Une épaisseur ouatée que je n'ai pas envie de déchirer car elle me protège... Sinon je rétrécirai !
C'est justement l'époque où je m'imaginais un ami imaginaire, où les contes peuplaient la solitude. Les mots contribuaient à mettre la peur à distance. Mais je ne sais plus de quoi ou de qui j'avais peur.
En cela, le roman de Jo Walton avec tout ce qui était embrouillé, palpitait comme si elle racontait quelque chose qu'elle n'atteindrait jamais. Comme un retour vacillant vers l'enfance , un surgissement né de l'écriture. Lire c'est parfois comme une éclosion.
Proust, dans Le temps retrouvé écrit : "Quand nous avons dépassé un certain âge, l'âme de l'enfant que nous fûmes et l'âme des morts dont nous sommes sortis viennent jeter à poignée leurs richesses et leurs mauvais sorts (...)"
que j'ai lus
Nous nous sommes tous imaginés des amis imaginaires. Et quand nous sommes anglais, il ne faut pas s’étonner de voir poindre ou la Tempête, nombreuses allusions, ou Comme il vous plaira, ou même Le Soir des Rois. Mais mêler ça à une ratatouille romanesque, c’est ce que je ne pardonne pas.. car ce n’est plus le roman de l’ami imaginaire, c’est une imagination de roman , qui ne va nulle part à force d’aller dans toutes les directions. Gennefort a une direction, un sens, une construction. La, il. N’y a rien, et croyez que j’y mets du moins. Mais non. Cela fait Lady Galloise cultivée, dédoublée si vous voulez, mais sans plus. MC
J’y mets du mien!
Oui, je vois ! C'est très agréable.
Il y a du vrai dans ce que vous notez.
Je n'ai pu lire son roman que par sauts et gambades. Comme un puzzle dont les morceaux seraient difficiles à ordonner.
Peut-être s'est-elle perdue dans son plaisir d'écrire
Mais la couverture est vraiment belle, représentant ce que j'ai aimé lire. Le reste j'ai oublié..
Parfois je pensais à un autre roman, "Léonard et Machiavel."
https://editions-verdier.fr/livre/leonard-et-machiavel-3/
Le dossier de Presse en bas de l'article est vraiment intéressant ;:
Collateral, 9 décembre 2024, entretien réalisé par Johan Faerber
D’accord sur la Couverture, qui est belle, mais c’est un peu léger. Non, pas vu Leonard et Machiavel. Verdier est d’ordinaire une bonne maison…
Nous avons dérivé vers d'autres livres, d'autres écrivains à partir de votre rapprochement de Meyrink et Hergé pour "Le Sceptre d’ Ottokar »
. Mais c'était bien intéressant.
Puis il y a eu "Où ce que vous voudrez" de Jo Walton. Là, votre mouvement d'humeur qui méritait qu'on l'explore. Et nous voilà partis pour la Renaissance italienne avec le roman mi-historique mi-fiction de Patrick Boucheron, "Léonard et Machiavel". C'est comme si nous bavardions dans une immense bibliothèque et que chacun de nous saisisse un livre puis un autre et que nous prenions le temps d'en parler.
Il n'y a pas que "la couverture" du roman de Jo Walton. Il y a ce qu'il indique : Florence et ce dôme magnifique. Florence...
"Léonard et Machiavel"... De Patrick Boucheron.
Un récit historique qui nous plonge dans la Renaissance italienne.
Se trouve rectifié l'éparpillement du roman de la prolixe Jo Walton.
Florence... Cette ville toscane qui a abrité ces génies : Léonard de Vinci, Michel-Ange, Dante Alighieri , Sandro Botticelli, ceux qui ont laissé dans le monde de l'art, de la littérature de l'architecture, de la pensée cet héritage essentiel.
Le Ponte Vecchio, le Duomo le Palazzo Vecchio, la cathédrale Santa Maria del Fiore et son campanile... Les musées, les églises, la ville...
C'est cela qui m'a attirée dans la création de ces écrivains si différents. S'approcher et rêver...
Faisons un rêve. Promenons-nous dans la Galerie des Offices à Florence...
Arrêtons-nous devant la "Madone" de Giotto, la "Bataille de San Romano" d'Uccello, "La Naissance de Vénus" de Botticelli,
"L'Annonciation" de Léonard de Vinci... "La Vierge au chardonneret" de Raphaël... La si sensuelle "Vénus d’Urbino" du Titien....Les toiles du Caravage, de Piero della Francesca.
Ô, la joie....
à l'hôpital ?
Certes mais il y a tromperie. Nous sommes en fait dans une Illyrie de carte postale, avec quelques gloires florentines dont Pic et ses 900 Thèses, moins complexes à lire qu’il n’est dit ici….👈
J'aime bien le doigt qui dit sans mots ce qui est dit ici !
Mais où sont les voleurs d’Art.🙊
Celui de La Joconde ? le 21 août 1911 au musée du Louvre par Vincenzo Peruggia - un vitrier italien souhaitant voir ce chef-d'œuvre revenir dans son pays d'origine ?
Je ne sais pas...
Y en a-t-il eu d'autres ?
12h39:pas moi! MC
Lui au moins c'était pour une bonne cause contrairement aux nazis qui ont spolié tous les biens des Juifs qu'ils exterminaient, dont les oeuvres d'art.
Robert Badinter et sa pauvre famille ont subi et cette injustice et l'assassinat de bien des leurs. La cérémonie d'hier, symboliquement était forte. Je n'éprouve pas pour le Panthéon une attirance particulière, c'est bien que son corps doit resté dans sa tombe au cimetière de Bagneux. Là, le cercueil ne contenait que des objets symboliques dont sa robe d'avocat, un livre de Victor Hugo, son discours sur l'abolition de la peine de mort.
C'est la grandeur et le courage et les souffrances de cet homme qui étaient rappelés , honorés sans oublier son humanisme, et l'amour pour les siens.
Voler de l'art...
Je pense aussi au musée des Arts Premiers. Tous ces biens volés aux peuples par les conquérants...
Et ces momies qui reposent au Louvre loin de leurs tombeaux...
Oui, l'art peut être volé...
Le petit singe est le symbole, je crois, de celui qui ne veut ni voir ni entendre ni savoir.
Voilà une halte qui me laisse songeuse.
Très drôle !
C’est en effet peut-être trop ambitieux. Un écrivain en fin de vie vue par son amie imaginaire tente de mettre sur pied une fiction qui sera son refuge contre la mort. Il ne se passe pas grand chose dans ladite fiction qui peut se résumer à deux stades. Les Dieux agissent. Ce qu’ont dit les Dieux est eclairci. Aussi entetient-elle des liens œdipeens avec le réel. Florence est l’Illyrie , et cette Illyrie en est une version modifiée; le David de Michel Ange n’y trône pas. Parce que cette Illyrie repose sur une Uchronie: le Sacrifice de Pic de la Mirandole, mort dans son lit dans la réalité , cautionne de la part des Dieux un prolongement et un développement de la culture magique de la Renaissance, que l Occident a bien failli connaître. L’Histoire y est statique, le progrès arrête. ( considérations de Tisch sur l’ Italie et les Guerres Mondiales) On peut penser que l’Histoire s’inspire vaguement de souvenirs de la « «Narratrice » dont elle offre une version magnifiée. Mais tout n’est pas si simple. L’ apparition de quatre personnages romanesques dans la Florence du Vingtième Siècle a lieu lorsque Sylvia n’écrit pas! C’est souligné dans le texte par le double, et cela donne à ce penser aux à personnages du roman; Ficin , seul personnage au double statut, du XVI eme siècle et « Illyrien-Florentin » dit « Nous étions dans la tête d’ Hecate », belle approche d’une romancière par un platonicien..Et il ira plus loin au dernier chapitre. L’inversion du mythe de la Temoete est destinée à camper une atmosphère Renaissance de Fantasy autour. En revanche, il se peut que le livre noyé de Prospero trouve ici son pendant par l’assomption finale du Livre qui accueille Sylvia que Ficin appelle précisément Narrateur, ce qui la sauve , elle et son double. La répétition du Sacrifice de Pic comme voie d’un progrès modéré rejoint la conversation de l’Armando; On ne peut pas priver l’ Illyrie de l’ Histoire, à condition qu’elle se déroule lentement . ) conversation entre Sylvia et son Double dont ce sacrifice est la traduction (?).. Cette intrigue a triple niveau irrite et séduit tour à tour. Les chutes de. Niveaux ne sont pas rares, et, même voulues, on voudrait qu’elles n’existent pas. La partie Fantasy est plus convaincante, mais ne peut être dissociée de l’autre. Il faut donc se résigner à des longueurs, et souhaiter que ce chemin ne soit plus celui de Walton. À cet égard, une comparaison avec Lent, non traduit , serait souhaitable. MC
Magnifique !
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