mercredi 29 novembre 2023

Roma Æterna

Robert Silverberg - Roma Æterna - Robert Laffont - Ailleurs & Demain

 

 

Dans les Carnets de notes de ses Mémoires d’Hadrien, Marguerite Yourcenar reproduit une phrase de la Correspondance de Flaubert : « Les dieux n’étant plus, et le Christ n’étant pas encore, il y a eu de Cicéron à Marc-Aurèle, un moment unique où l’homme seul a été. » C’est tout le sujet de Roma Æterna, une uchronie de Robert Silverberg où l’échec de l’exode des Hébreux hors d’Egypte et par ricochet celui de l’avènement du Christianisme constituent le point de divergence avec l’Histoire de l’Empire Romain telle que nous la connaissons.

 

Inspiré par les travaux d’Edward Gibbon, l’écrivain dresse en onze tableaux une chronologie imaginaire s’étalant du Vème au XXème siècle d’une « Pax » Romana affranchie des monothéismes religieux, Islam compris. Rome survit aux attaques barbares, les Empires d’Occident et d’Orient s’affrontent, se réconcilient ou fusionnent, la République leur succède. Habilement Robert Silverberg entremêle destins individuels et évènements historiques.

 

Toutes les nouvelles ou novellas ne présentent pas le même intérêt littéraire.  “1282 A.U.C. : Avec César dans les Bas-Fonds” raconte la naissance d’un destin politique. Maximilianus, fils cadet de l’Empereur Justinianus va s’encanailler dans les souterrains de Rome en compagnie de son confident Faustus et d’un diplomate grec. La mort inopinée de l’Empereur met au jour l’ambition longtemps dissimulée du cadet. “1282 A.U.C. : Avec César dans les Bas-Fonds” réunit deux ingrédients intéressants, un récit pittoresque et la germination d’une conscience, celle d’un Maximilianus fêtard soudain raide dans ses bottes comme le roi  Henri II Plantagenêt du Beckett d’Anouilh ou le roi Henry IV dans la pièce éponyme  de Shakespeare. (1) “2206 A.U.C. : Un avant-poste du royaume” est l’histoire d’une courte idylle entre une patricienne vénitienne d’ascendance grecque et un proconsul romain ; elle oppose deux visions du monde. “2543 A.U.C. : Se familiariser avec le dragon” :  Un historien met au jour le journal de bord d’un empereur qui a effectué un tour du monde. Les récits de voyage ont fourni à Robert Silverberg la matière de plusieurs textes dont le fameux Seigneur des ténèbres. Dans “2650 A.U.C. : Une fable des bois véniens”, au titre inspiré d'un ensemble de valses de Johann Strauss, l'Empire a disparu remplacé par une République. Mais sa légende perdure …

  

Roma Æterna séduit par sa construction, son écriture, des réflexions sur l’Histoire mais l’uchronie proposée n’est pas plus convaincante que celle proposée sur le même thème par Charles Renouvier dans son ouvrage Uchronie : l'utopie dans l'histoire. La Rome de Robert Silverberg ne diffère pas de celle que nous ont légué les historiens romains, la modernité n’y suinte pas. Reste le plaisir de replonger dans les Humanités Classiques et de savourer la vaste culture historique de l’écrivain.




(1) « Quand Shakespeare écrit les deux pièces Henry IV, un de ses buts est de montrer l'éducation d'un prince, et son passage d'une jeunesse turbulente à la maîtrise de soi et à la dignité d'un grand roi. Pour symboliser la société indisciplinée et égoïste dans laquelle grandit Henri, prince de Galles, surnommé Hal, Shakespeare le fait fréquenter une taverne et une bande de vauriens, ivrognes et voleurs, menée par un chevalier énorme et amoral, sir John Falstaff […]»

 « […]Falstaff et ses compagnons se sont placés sur le trajet du roi après son couronnement. À son passage, Falstaff l'interpelle familièrement, mais le roi le renie : « Je ne te connais pas, vieil homme ». Néanmoins, le roi demande au Grand Juge qu'on subvienne à leurs besoins, de crainte que leur manque de ressources ne les fasse retomber dans le mal.[…]»

Source Wikipedia

70 commentaires:

Christiane a dit…

Je maintiens mon attachement au premier et au dernier chapitre.
Silverberg lance son imaginaire sur Rome là où la philosophie pourrait prendre le dessus.. Le sens de ces religions monothéistes, la place de l'imaginaire dans ces livres de l'origine, leur impact sur la conduite des hommes. Les guerres de religion.
Je n'ai pas pu échapper à ces deux chapitres vraiment porteurs.
J'aurais aimé en parler avec lui.
Voilà. Fin de la logorrhée.

Christiane a dit…

Dans le sens de cette recherche j'ai lu les essais de Daniel Sibony :
-Les Trois Monothéismes
-L'énigme antisémite
- Fous de l'origine -Journal d'Intifida
Une série impressionnante où l'entre-deux est béant. Entre histoire ancienne et actuelle.
Mais, Soleil vert, votre billet est excellent.
Entre le bien et le mal, la difficulté d'aimer voire l'impossibilité, je chemine depuis ce matin dans le roman de Malcom Lowry "Sous le volcan". La part du diable....La méchanceté des bons,la bonté des mauvais.

Christiane a dit…

La séquence mise en lien de "Fellini Roma", où des cinéastes découvrent dans les sous-sols de Rome lors des travaux de creusement du futur métro, est terrible car dans ces grottes après l'émerveillement de la découverte des fresques et statues antiques vient le drame : ces œuvres d'art inestimables se détruisent au contact de l'air comme si le passé était englouti à jamais .
Un lien subtil se fait avec le désir de Silverberg de plonger dans L'Histoire . "Rome, affranchie des monothéismes religieux, Islam compris. Rome survit aux attaques barbares, les Empires d’Occident et d’Orient s’affrontent, se réconcilient ou fusionnent, la République leur succède."
Pourtant, les destins individuels qu'il choisit restent dans une sphère un peu factice, celle du pouvoir.
Votre billet est honnête, Soleil vert. Vous notez : "La Rome de Robert Silverberg ne diffère pas de celle que nous ont légué les historiens romains, la modernité n’y suinte pas. Reste le plaisir de replonger dans les Humanités Classiques et de savourer la vaste culture historique de l’écrivain." Merci pour cette présentation

Christiane a dit…

découvrent des merveilles est...

Soleil vert a dit…

J'ai replongé aussi avec plaisir dans le livre de Yourcenar. Le destin du monde pèse sur les épaules d'Hadrien comme sur celles d'Atlas. Dans le livre de R Silverberg c'est Rome qui assume cette tâche.

Anonyme a dit…

Renouvier est un philosophe pas trop bête mais point un romancier. Dans le même genre, on signale d’Asimov une Histoire de la République ( Romaine) sortie en France ces temps-ci. Énormes difficultés à prendre au sérieux les Memoires d’ Hadrien.. «  Ce que vous avez cru être du marbre se révélera du saindoux ». C’est helas cruellement vrai ! Bien à vous. MC

Christiane a dit…

Extraordinaire cheminement que de relire ces "Mémoires d'Hadrien" !
Oui, Rome... mais surtout le regard d'un homme au seuil de la mort qui écrit une longue lettre à Marc Aurèle. Méditation sur la Beauté, la Vie, la Mort, le Temps, l'Amour...
Une voix qui va s'éteindre et qui dit : Je...
Une autobiographie supposée ( donc vous voilà dans votre élément !).
La mort omniprésente... comme dans le livre de Malcolm Lowry et le film de Huston.
Quelle belle idée.
Je reviens à la douceur de votre blog après l'émotion, sous le billet précédent....

Christiane a dit…

Je lirai les cinq nouvelles que vous avez retenues. Mais après la vague brûlante du roman de Malcom Lowry. Celui-là on ne peut pas le lâcher. Les pensées à vif de Geoffrey Firmin ressemblent par leur assemblage à un cauchemar où la femme aimée et presque rejetée est un supplice de Tantale où il boit sa culpabilité. Il est authentique dans son délire fait d'alcool et de nuit. C'est lui le volcan. Que son corps s'écroule dans le ravin à la fin n'est que le début : traversée de l'enfer et peut-être puisque "l'homme est une merveille" (Socrate, au début), peut-être une grande poussée de lave pour le jeter dans la lumière... Mais ça c'est une autre histoire (dernier chapitre ou nouvelle de l'oeuvre mystérieuse de Silverberg, "Roma AEterna".)

Christiane a dit…

Je le reprends en le corrigeant !
"Vous évoquez "Le Seigneur des ténèbres" de Silverberg. Étrange...
Klein évoque le mythe de Philoctète pour évoquer "Le Seigneur des ténèbres". de Silverberg.
Geoffrey Firmin dans le roman de Malcolm Lowry est aussi une évocation de Philoctète.
Deux fois ce héros de la mythologie grecque qui selon Sophocle souffre de blessures qui ne guérissent pas. La souffrance est même ce qui définit ce personnage blessé ( mordu par un serpent...), provoque son aliénation sociale, le tient prisonnier comme d'un labyrinthe ...
Ce n'est pas la première fois que ces deux oeuvres se rencontrent par leur mythes...

Christiane a dit…

Au fait, Soleil vert, pour quelles raisons avez-vous annoncé la présentation
de ces deux romans en même temps ? Quels liens faites-vous entre les oeuvres ? Les deux écrivains ?

Christiane a dit…

Un passage magnifique de "Sous le volcan" de Malcolm Lowry (p.388) qui lie ce roman à l'univers des mythes et de la science-fiction :
"Éternité... Le Consul avait retrouvé son calme. Accoudé au bar il fixait le liquide incolore au parfum d'éther dans son verre, son deuxième verre. Boire ou ne pas boire - Pourtant, en se privant de mescal, réfléchit il, n'avait-il pas oublié leur grand périple dans l'univers, que la Terre était un vaisseau cinglé par le fouet du cap Horn, condamné à ne jamais atteindre Valparaiso ? Ou bien c'était une balle de golf frappée en direction de la Lyre d'Hercule, qu'aurait captée au passage, avec la main, par la fenêtre de son asile, un géant des Enfers ? Ou bien que c'était un autocar accomplissant son trajet erratique vers Tomalin et le néant. Ou encore que c'était - tout ce qu'on voudrait, dans une minute, après un nouveau méscal."

Soleil vert a dit…

"Klein évoque le mythe de Philoctète pour évoquer "Le Seigneur des ténèbres". de Silverberg."

Vous avez une référence ? Je me souviens d'un long article de Rachel Tanner en ce sens pour L'homme dans le labyrinthe du même auteur dans le numéro 49 de la revue Bifrost. Elle évoque la pièce de Sophocle.

Soleil vert a dit…

JJJ : trier dans les 6000 commentaires, pas évident pour moi…

Anonyme a dit…

OK, SV !... je comprends...
Alors, pouvez-vous juste effacer celui de Janssen J-J de 12.09 de ce jour, pour voir si c'est juste une affaire de bonne volonté ou d'impossibilité, et d'y mettre à la place : "effacé à la demande de l'auteur". Merci d'avance, BAV (J J-J).

Christiane a dit…

https://www.quarante-deux.org/archives/klein/prefaces/lp27260.html

Christiane a dit…

Le livre des préfaces -Le Livre de Poche, 2021
Une compilation de près de cent-vingt préfaces écrites par Gérard Klein entre 1974 et 2018 pour des anthologies, romans ou nouvelles de science-fiction. C'est vous qui en aviez parlé !

Soleil vert a dit…

Message 12:09 de ce jour effacé à la demande de l'auteur

Anonyme a dit…

LHomme dans le Labyrinthe…pauvre Philoctete! Pour le reste, après Godfrey, Firmin de Firmianus, ferme, inébranlable. Curieuse association de deux prénoms qui vont se trouver l’un et l’ autre dépassés. L’un Paix de Dieu, l’autre, fermeté. Est-ce aussi de l’humour lawrien?!

Soleil vert a dit…

... c'est ma journée...
JJJ pourquoi vous vexez-vous ?

"Christiane a dit…
https://www.quarante-deux.org/archives/klein/prefaces/lp27260.html"

Klein associe Philoctète et L'homme dans le labyrinthe.

Anonyme a dit…

@ c'est moi toute seule qui efface mes commentaires pas l'administrateur du blog.

OK, mais comment faites-vous ?

Anonyme a dit…

Merci Soleil Vert pour 13.23. Non, pas vexé... du tout, Bonne suite (JJJ)

Christiane a dit…

La fin est grandiose et poétique.

Christiane a dit…

Dans la postface où chaque chapitre est scruté par Malcolm Lowry, je lis à propos de ce chapitre XII, le dernier :
"(...) Le sentiment qu'on est censé retirer de ce chapitre est un sentiment biblique. Est-ce que le bonhomme n'a pas suffisamment souffert ? C'est pourtant la fin, non ? Eh bien non ! Apparemment cela fait juste que commencer ! Tous les courants du livre, politique, ésotérique, tragique, comique, religieux, etc., sontici réunis. (...) Je ne pense pas que l'effet final du chapitre doive être déprimant : on peut y trouver de la catharsis, j'en suis persuadé, cependant que ce pauvre cher Consul obtient même un soupçon de rédemption en comprenant qu'il fait somme toute partie du genre humain. En vérité, le sens définitif et profond que son destin recèle est à chercher aussi dans sa relation universelle avec le destin de l'humanité.(...)
Mon livre doit être essentiellement vu comme ayant la figure d'une roue (trochal) car, lorsqu'on parvient à la fin , on devrait avoir envie de retourner au début où l'oeil tombera peut-être sur la citation de Sophocle mise en exergue et propre à redonner courage. (...)"
J'ai hâte de lire le billet de Soleil vert.

Christiane a dit…

Chez Paul Edel :
"Ce qui est caché sous l’apparence s’ entrouvre , et j’ accède aux révélations oniriques les plus sauvages du sommeil."

Christiane a dit…

C'est quand même très étrange cette uchronie que tente Silverberg en modifiant le fil de l'histoire romaine. La pensée latine de Tite-Live et Virgile, la splendeur de la Rome Eternelle que des générations se transmettent presque religieusement dans des études classiques - et qu'il connaît bien, rend presque caduques les disparitions qu'il s'oblige à faire des monothéismes .
2000 ans de faits considérables pour l'origine de sa splendeur.
Cette uchronie n'est pas très efficace.
Alors il s'attarde sur l'envoûtante beauté aride du désert avec son héros exilé par l'empereur Julianus au fin fond de l'Arabie, parmi les Grecs, les chameaux, les tribus de Sarrasins basanés.
Donc, Mahmud disparaît... Et l'empereur Julianus pourra retrouver les grâces de César... Rien ne change...
C'est de ma faute , je suis une lectrice pleine d'epines.Je n'aime pas qu'on change certaines périodes de l'histoire du passé telles qu'elles peuplent ma mémoire
Je relisais hier la légende de Rémus et Romulus...
Cette lecture est un voyage. J'aime les livres de Mémoires,les fouilles...
Silverberg est un grand conteur mais quand même supprimer la traversée de la mer Rouge par les Hébreux, la nuit de Noël, la mort des chrétiens dans les arènes, les paroles et le regard de l'homme en blanc (Edith Piaf), c'est faire des trous dans nos mythes.
Bien sûr, il y a son vaisseau spatial à la fin, en partance pour l'utopie, mais quand même....

Soleil vert a dit…

Ce n'est qu'une construction mentale.
Les Grecs ne nous ont laissé aucun Empire d'orient, mais un autre, invisible.
Ecoutons le regretté Michel Serres à ce sujet:

"De l’Empire grec
Jamais la grécité ne parvint à l’unité, ni quand fleurirent les hégémonies d’Athènes, Thèbes, Sparte ni même quand les grandes puissances des quatre points cardinaux, Mèdes et Perses, Macédoniens, Carthaginois ou Romains les menacèrent de destruction. Nulle ligue ne dura longtemps parce que les Grecs, rivaux inépuisables aux rivages de la mer, se bornèrent, tel Alcibiade, à rêver un Empire unitaire. Les cités ou roitelets se détestaient aussi vaillamment que les philosophes. Cependant le littoral s’hellénise, les bords des trois continents Asie, Afrique, Europe, parlent grec. Mais la langue commune du commerce nautique meurt, comme les hégémonies brèves, les écoles, les petits dieux, comme ce que nous nommons l’économie. Rien ne restera de rien. Cet effondrement se nomme Antiquité.

Or en moins de quatre siècles, de Thalès de Milet à Euclide d’Alexandrie et qu’ils le veuillent ou non, les penseurs grecs, rivaux de villes et d’écoles, d’économie et de religion, acharnés à se contredire, fils de la terre contre amis des formes ou penseurs du mouvant contre éternitaires, ont, ensemble, construit, de façon foudroyante et inattendue, un Empire invisible et unique dont la grandeur sans décadence perdure jusqu’à nous, un bâtiment sans autre exemple dans l’histoire où ils nous amènent encore, à plus de deux millénaires de distance, à travailler selon les mêmes gestes qu’eux et sans l’abandonner sous le prétexte de la confusion de nos langues et même si nos haines croissent. L’humanité a-t-elle jamais formé un accord équivalent? Cette réussite s’appelle les mathématiques."

Christiane a dit…

Cette citation de Michel Serres est passionnante. Silverberg évoque les Grecs nombreux en Arabie dans cette nouvelle mais l'essentiel est le portrait de ce Mahmoud obsédé par son dieu unique et par l'austérité qu'il aimerait voir s'étendre dans les coutumes de son peuple.... Un désir de conquête aussi de cette partie du monde.
Les mathématiques ne sont pas la préoccupation de Silverberg dans cette nouvelle.
C'est un marchand d'idoles qui mettra fin aux ambitions de Mahmoud... Ces multiples dieux grecs font l'occasion du commerce des idoles une aubaine commerciale.
Lui, ce personnage dans nom est surtout préoccupé par son avenir. Il rêve de regagner Rome, en a assez de ce pays brûlant et de la façon dont on y vit.
C'est une analyse très fine de ces personnages.

La Grèce, plus que les mathématiques, son cadeau, pour moi est aussi littéraire même si la beauté des temples laisse sans voix...
Serres oui. Merci pour cetteeditation.
Suarès aussi ( "Temples grecs - Maisons des dieux")
"Les dieux invisibles font vendange de l'homme.
La lumière seule habite le temple. Quel que soit le nom qu'elle ait pris, elle seule dans la maison. Si elle dort entre les murs, ou si elle médite, nul ne le sait. Le sanctuaire est pieux, le sanctuaire est muet. Elle triomphe au fronton, et elle joue entre les colonnes. Surtout, elle chante. Le nombre des colonnes bat la mesure du chant. Ici, l'harmonie est le logarithme de la proportion. Elle ignore la dissonance. C'est la grandeur plane qui se développe sans courbes, la certitude absolue de l'espace, où l'onde n'a rien à voir, la colonne dorique est le plus statique de tous les signes. Toute son énergie est interieure. Le temple des dieux est le triomphe de la ligne : l'horizon est posé sur six, sept, dix, cent repères de la verticale. Ce style est éternel. (...)
O colonnes, Pindare vous a vues ; il vous a touchées ; et vous l'avez entendu, ce grand-prêtre entre les poètes.(...)
Tout est fini. Les Puniques, les Romains, les Sarrasins, les Barbares, tous les peuples de la mer antique ont conquis tour à tour Agrigente et la Sicile ; ils sont passés par là. Vous êtes seules encore vivantes pour rendre à l'homme abusé la présence des dieux, colonnes roses et dorées, toutes chaudes de soleil, frémissantes dans la lumière."

Christiane a dit…

cette citation

Christiane a dit…

A moins que vous ne parliez de la construction du livre... Un peu comme dans "Auto-uchronia de Francis Berthelot.

Anonyme a dit…

Mais c’est vrai ce que dit Serres. Je l’ai physiquement éprouvé en exhumant chez un bouquiniste les équations d’ Aristoxene ?) de Cyrene, comme si, derriere l’ apparat litteraire, et peut-être à cause de lui, une voix des plus fortes venait dire « Nous sommes aussi là. C’est par nous qu’´existe le Parthenon, le canon de Phidias, et celui de Praxitele, il a peut-être exagéré, celui qui disait « Que nul n’entre ici s’il est géomètre ! » Reste qu’ avec ce que nous laissons, et notamment avec ce livre , on ne peut pas trop lui en vouloir » . Après, dans votre monde on est litteraire ou Matheux. Mais dans le notre , on pouvait être l’un et l’autre. Il me semble d’ailleurs qu’ un certain Victor H, beaucoup plus connu chez vous que chez nous, était de formation mathématique » . La voix s’est tue sur ces entrefaites, je n’ai pas acheté l’ Aristoxene ( ?) mais ce jour là, pas si vieux, j’ai compris quelque chose. La dualité du génie grec, à la fois littéraire et mathématique. Je devrais ajouter même musical car ces textes requièrent une ou plusieurs mélopées qu’ils n’ont plus. Nous en avons rêvé de Monteverdi à Wagner. L’Opera est né de cette musique perdue. De la part du monde antique, ce n’est pas rien non plus! MC

Anonyme a dit…

Et Valéry, autre Matheux autrement moins besogneux que Suares, dans son Cantique des Colonnes, alors??

Soleil vert a dit…

Je ne connais pas le Grec ancien mais il me semble qu'il y a un equivalent calcul et cailloux

Anonyme a dit…

C’était un Bude, avec traduction, ce qui est d’autant plus remarquable, car le scientifique qui s’y est frotté n’ à pas eu je crois la partie facile! MC

Anonyme a dit…

Il faut bien connaître le calcul de l’époque, type second degré. Et comme le manuscrit n’est pas arrivé complet, à peu près…. MC

Anonyme a dit…

C’est la qu’on se rend compte que les Grecs, ce n’est pas que de la littérature, si j’ose dire! MC



Soleil vert a dit…

C'est là que je me trompe calcul vient du latin calculus , cailloux, mot qui garde sa signification première en médecine.

Christiane a dit…

https://fr.wikipedia.org/wiki/Calcul🙂

Anonyme a dit…

”Enfin! pensa le caillou,on me remarque”

Corinna Bille ”Le caillou pesant ”

Soleil vert a dit…

Je vais lâcher Sous le volcan

Christiane a dit…

Ce n'est pas grave. Je l'ai relu avec plaisir ce qui ne serait pas arrivé dans vous.
Cherchez dans les anciens billets de Paul Edel. Il avait mis en ligne une réflexion tout à fait intéressante sur ce livre.
Merci aussi pour ce roman de Silverberg. Le prologue et le dernier chapitre m'ont fait réfléchir. Je ne crois pas que la chute de Rome puisse être imputée aux chrétiens. Ce qui est certain c'est qu'il y a eu un affrontement silencieux entre l'empire romain et la Grèce pour moi plus essentiel que les traces de la civilisation Romaine. Et puis j'ai relu le Voyage du Condottiere malgré les réserves de MC. De très belles pages. Il n'y a pas que Valéry dans ma bibliothèque.
J'aime votre liberté d'aller et venir, de lire ou de ne pas lire, même le caillou pe(n)sant. Ça change des roseaux...
Très très bonne journée.

Christiane a dit…

Pour laisser le dernier mot à Dieu, grand joueur... je laisse la parole à Philip K. Dick.
"Disons que sur l'échiquier - notre univers espace-temps - le contre-joueur de l'ombre instaure une situation réelle en déplaçant une pièce. Étant donné qu'il est le joueur des ténèbres, ses plans produisent ce que nous ressentons comme le mal : le pouvoir du mensonge, la mort (...) Mais le programmateur-Reprogrammateur (Dieu) a d'ores et déjà fait sa parade, les coups ont d'ores et déjà été joués. (...) En gagnant chaque séance de jeu, il obtient certains de nous comme pièces prises. (...) Car il n'est pas raisonnable de penser que Dieu substituerait un monde en allant vers le pire - en termes de liberté, de beauté, d'amour ,d'ordre - quelles que soient nos normes effectives."
Extraits d'une conférence prononcée lors du festival international de la science-fiction de Metz cités dans un article d'Éric Naulleau pour la revue "L'atelier du roman" juin 2001.
Numéro consacré à : "Philip K. Dick - La science comme fiction, l'humain comme réalité"
Eric Naulleau commente : "Il faut reconnaître que le conférencier paraissait avant tout soucieux de prendre son auditoire à rebrousse-poil. Puis il évoque "Substance mort" (A Scanner Darkly").

Christiane a dit…

Dans la même revue, un article intéressant de Gérard Klein : "Paradoxes de Philip K. Dick".

Christiane a dit…

Mais mon article préféré est celui de Francesco Forlani qui pour s'approcher de Philip K. Dick passe par Federico Fellini. Car Fellini imaginait Dieu comme un atome de Plutonium ou d'Uranium qui dégagerait des millions de rayons de lumière tel qu'il l'avait vu représenté dans une revue de BD entièrement consacrée à la science-fiction, "Métal hurlant".
F.F évoque la tradition philosophique des "simulacres" qui relie l'antiquité de Démocrite et Platon, Lucrèce, Dante, Hobbes,Spinoza, Kant au monde du roman par la tentative de répondre t une question centrale : y a-t-il une vérité ultime, universelle en mesure de restituer un sens à la vie, à la mort, de nous révéler la nature profonde du monde ? Il écrit que Philip K. Dick réduit l'expérience de la réalité à son évocation par la parole et que, pour vaincre la peur, il pensait qu'il vallait mieux croire aux histoires que nous-mêmes nous avons inventées, un voyage dans le non-temps qui hantait son imaginaire comme dans son roman "La Vérité avant-dernière" (1964) où il donne comme but à l'Histoire d'unifier le monde de la famille à la tribu, de la cité libre à la nation et de là à l'hémisphère.... Un très beau développement.

Anonyme a dit…

Mes réserves ne valaient que pour ce Cantique des Colonnes en prose, ici d’une insigne médiocrité. J’ai vu mieux chez Suares, chère Christiane! Bien à vous. MC

Anonyme a dit…

La cosmologie de Fellini est-elle à prendre au sérieux ? Il y a un côté Teilhard là dedans…

Christiane a dit…

J'ai réouvert cette revue à cause de "Minority Report", le film de Spielberg revu hier (comme "Blade Runner" de Ridley Scott tiré de son roman : "Les androïdes rêvent ils de moutons électriques" ? vu il y a quelques semaines..)
Tom Cruise y est très credible. Se faire implanter des souvenirs, découvrir que le monde n'est pas ce qu'il croyait. Dans cette nouvelle de Philip K. Dick tout est altéré au niveau des perceptions. Où est le réel dans toute cette étrangeté ? Tout un monde vertiges, de vacillements. Un dérèglement des sens...
J'avais aimé "Le Maitre du Haut Château". Une contre-Histoire... Dystopie dîtes-vous. L'Axe ayant remporté la deuxième Guerre mondiale, la zone neutre... Drôle de rencontre pour les personnages du roman. Un partage du monde bien différent de notre Histoire...
Des mondes possibles comme pour Silverberg. Ces romanciers se retirent dans le passé pour rêver...

Anonyme a dit…

Ceci dans Massillon, Avent, Disposition à la Communion, prononcé 1700, publié 1742: p 347 « Enfin c’est un Dieu si pur que les astres sont souillés devant lui. Si Saint, qu’ a la Chute de l’ Ange, il fallut que le Ciel s’écroulât, que les abimes s’ouvrissent, et qu’il mît un chaos éternel entre le Péché et lui. ». Et du même, p 366 «  Que suis-je à vos yeux, mon Dieu? Si je ne suis pas un Saint, je suis un monstre, si je ne suis pas un vase d’honneur, j’en suis un d’ignominie; Si je ne suis pas un Ange de Lumière, il n’y a point à balancer je suis un ange de ténèbres « . P 366 Ainsi trouve t on quelque cent ans avant une exploitation ecclésiale de thème de chute et d’ Anges noirs et blancs qu’on reverra dans la FdS…. MC

Soleil vert a dit…

"Extraits d'une conférence prononcée lors du festival international de la science-fiction de Metz "

1977. Dick y tint un discours hallucinant :" Si vous pensez que ce monde est mauvais, vous devriez en voir quelques autres".

https://www.youtube.com/watch?v=RkaQUZFbJjE

Fellini dans son studio 5 de Cinecitta recreant le monde " Dans les studios de Cinecittà, Fellini récré tour à tour l’Antiquité rêvée du Satyricon (1969) ; le quartier populaire du Trastevere et 500m d’autoroute pour Fellini Roma (1971) ; la vieille ville de Rimini pour Amarcord (1973) ; Venise et sa lagune à l’époque des Lumières pour Le Casanova (1976) ; ou encore le paquebot mortuaire d’Et Vogue le navire (1983), sombrant dans une mer de plastique." France-Culture

Anonyme a dit…

L’Histoire est parfois un éternel recommencement, surtout si l’infrastructure y commande la superstructure, pour marier St Augustin et Marx! La notion de culpabilité est moins « pratique et ecclésiale « . Elle domine le clivage hugolien qui n’a pas grand chose à voir avec elle, stricto sensu. On la trouverait aussi chez bien d’autres, de Milton à Verlaine ! Et que dire d’une culpabilité qui est aussi , quand on la reconnaît, une avance dans l’Etre. A ce moment là, il faudrait condamner les poètes et Siegmund Freud…

Christiane a dit…

Oh, chic alors. Je vais ouvrir le lien. Oui, à lire Éric Naulleau, Fellini n'est pas prévisible dans cette conférence. Dans "Fellini Roma" ce qui m'avait frappée comme dans "Roma AEterna" c'est que ces œuvres sont à elles-mêmes leur propre réalité. Malgré la fiction c'est le monde réel qui les intéresse tel qu'ils le voient. Mais aussi, ils parlent d'autre chose les romanciers et ce cinéaste dont des intercesseurs.
Ces personnages commencent à exister seulement lorsqu'ils apparaissent sur l'écran ou dans le livre. Avant ils n'existent pas. Leur existence ne dure que le temps de la projection ou de la lecture. C'est dans la tête du spectateur ou du lecteur que l'histoire se construit.

Christiane a dit…

C'est dommage la traduction est zappée au profit de l'anglais. Mais quelle joie de le voir. Merci Soleil vert. J'essaierai de trouver le texte... traduit en français.
C'est vraiment intéressant ce que vous dites de Fellini.

Christiane a dit…

Pour vous, Soleil vert :

https://pauledelblog.fr/2022/07/26/au-dessous-du-volcan-de-malcolm-lowry-une-difficile-ascension/

Christiane a dit…

Vous avez offert Philip K. Dick. Je vous offre Fellini :

https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-chemins-de-la-philosophie/tous-les-chemins-menent-a-rome-4-4-fellini-roma-9378313

Anonyme a dit…

17h 46: «  c’était pratique, la peur et la culpabilité pour diriger les consciences ». Je ne le crois pas, non , vu la force de l’englobant religieux, et ensuite.

Christiane a dit…


Soleil vert,
Vous devez être un peu devin dans le choix de vos romans.
Je me régale à écouter sur France culture une émission formidable qui évoque La capitale des Gaules sous le règne des empereurs romains ( fouille, évocation de le vie à Lyon lors de l'occupation romaine et cette histoire s'arrête, devines comment : lors de la christianisation de Lyon avec Irénée. Ça alors c'est extraordinaire !

https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-cours-de-l-histoire/incontournable-lugdunum-lyon-a-la-confluence-des-gaules-2402376

Christiane a dit…

Ah.... Je suis peu sensible à ces questions de culpabilite déversées à pleins boisseaux pat l'Eglise.

Anonyme a dit…

Mais c’est vous qui m’en parlez, cependant , et assez mal!

Anonyme a dit…

C’est pourquoi je vous recommande Massillon et son Avent prêche devant Louis XIV

Anonyme a dit…

Plutôt que d'essayer d'atteindre le haut du Volcan, je conseillerais aux soleils verts l'ascension du Mont Analogue, grimpette certes plus facile mais qui offre, en ses brumes sommitales, bien plus de délices fantasmatiques que l'âcre parfum des fumées échappées de la calenda mexicaine. Bàv /JJJ/

Anonyme a dit…

Si vous voulez. J’essayais seulement de
Vous faire comprendre que cette réflexion sur les fins dernieres ne part pas de rien, n’a pas pour seul but la volonté de puissance, et s’ adresse tout de même à Louis XIV qui a su l’apprécier. «  Mon Père, j’ai invité de grands prédicateurs. J’ai été content d’ eux. Mais, vous écoutant, je suis pour la première fois mécontent de moi » Et de fait, encore aujourd’hui…

Anonyme a dit…

L’homme fuit la solitude , c’est vite dit. L’homme doit fuir la fausse philosophie de la solitude. Moyennant quoi participant à une cérémonie par usage, il n’est jamais sur d’en être digne. Il y a du « pharisaïsme » dans ces cérémonies, pharisaïsme que Massillon est le premier à dénoncer.

Anonyme a dit…

Et au cas où mon éclectisme serait suspecté, je lis Massillon le matin , et Dénis Lehane l’après-midi ! « Un Pays à Aube/ The Day Given / est un roman grisant , même si pas SF…

Christiane a dit…

Soyez sympa, MC, Massillon, Bossuet et cie m'irritent au plus haut point. Parlez-moi de la liberté de vivre et de penser comme on le veut en rejetant toutes ces scléroses. Je ne suis pas à convertir.... Mais je ne vous empêche pas de les apprécier.

Anonyme a dit…

Au fond, c'est un peu l'exact itinéraire de Bossuet... Personne n'invente jamais rien en matière de pratique théologique. Et reste en vieillissant sur son Kant à Foi !
Perso, j'aime beaucoup la formule : "Puis les études en philo. Joie de retomber sur terre".
Je ne sais trop pourquoi, elle m'a fait hurler de rire.
Bien à vous..., cher.es ami.es rayonnant de vert
JJJ (tendance espiègle)

Soleil vert a dit…

Plutôt que d'essayer d'atteindre le haut du Volcan, je conseillerais aux soleils verts l'ascension du Mont Analogue, grimpette certes plus facile mais qui offre, en ses brumes sommitales, bien plus de délices fantasmatiques que l'âcre parfum des fumées échappées de la calenda mexicaine. Bàv /JJJ/

Je vieillis, et dire que je m'attaquais à Pynchon quelques années auparavant !!!! Je me contenterais de Vera Cruz (le film). BAV

Christiane a dit…

Pynchon ? Je ne connais pas du tout. Pouvez-vous nous en parler, Soleil vert ?

Anonyme a dit…

IL N'EST JAMAIS TROP TARD POUR PYNCHON...

Mais c'est encore trop "fort" à nos âges et toujours aussi déroutant, si on ne l'a pas "entamé" plus tôt. J'aimerais bien l'évoquer, mais c'est devenu bien difficile car mes fiches de lecture d'amateur ont toujours été mises à l'abandon, désarçonnées qu'elles furent par tant de complexité (un peu comme dans le roman Jérusalem du britannique Allan Moore). Quand je les relis au fur des trente dernières années depuis "l'arc en ciel de la gravité", je les trouve erratiques, ces fiches, échevelées, ayant apparemment toujours suscité mon enthousiasme et pas mal de mes incompréhensions.
C'est un écrivain fou, ce Pynchon, secret, borderline, mystérieux, énigmatique, fuyant les journalistes comme Glenn Gould, la peste, accroché à son piano... On a toujours prétendu qu'il était mort, disparu, et ceux qui l'approchent et le disent encore vivant se taisent... Ils sont très respectueux de sa solitude, comme les membres d'une secte mormone à l'égard de leur gourou. Son univers historico-gothique a toujours désarmé les meilleures volontés. Comment vous en parler, du reste, Ch... ? Je m'effacerais volontiers devant Grine Sun mieux capable de lui rendre sa justice. ( à suivre)

Anonyme a dit…

(suite sur Pynchon)
Tant pis, j'essaie un peu quand même..., il faut vous dire que ses grands sujets de prédilection déjà 0 L4OEUVRE dans ses premières nouvelles des années 50 furent toujours ceux de la cohabitation des espaces visibles et invisibles avec leurs lieux de passages bizarres, les théories scientifiques qui permettraient d'expliquer, qui sait ? le fonctionnement chaotique du monde, et l'absurdité des situations sur fond de sessions musicales improvisées.
Dans les notes retrouvées au sujet du dernier roman fou que je lus de cet auteur en 2008, lors d'un long séjour au Canada (c'était au moment de l'élection miraculeuse d'Obama), j'avais noté ceci :
/// "Contre-jour" - Tenter de résumer les 1200 pages de ce roman-fleuve serait à peu près aussi vain et prétentieux que de vouloir synthétiser en quelques phrases la Recherche du temps perdu. Disons que l'un des nombreux axes de ce roman est l'histoire de Webb, un mineur anarchiste, assassiné par deux tueurs à gages, lesquels ont été embauchés par un ploutocrate du nom de Vibe. Hantés par la mort de leur père, les enfants de Webb ont juré de se venger du clan Vibe. Commence alors un voyage étourdissant et déjanté, en forme de vrai-faux roman d'aventures, qui nous conduit du Colorado à Venise, de Chicago en Angleterre en passant par le Mexique : un récit planétaire où l'on croise des syndicalistes aux prises avec le grand capital, de jeunes aéronautes échappés de Jules Verne, des fabricants d'anamorphoses, des dynamiteurs de voies ferrées, des cow-boys en goguette et mille autres personnages sidérants, parmi lesquels des chiens qui lisent des romans de Henry James (dans l'espèce de "montgolfière" mécanique des trois apprentis aéronautes, notamment !). En filigrane, on note toujours une réflexion profonde sur le temps, l'Histoire et la lumière, lumière omniprésente à travers des boules de feu, de l'électricité, des étincelles, des explosions, des réfractions fractales... - jusqu'à la chute finale ouvrant sur la clarté céleste et la grâce. Etincelantes, un peu aveuglantes parfois, comme quand on passe du noir au plein soleil, toutes les métaphores sur la lumière peuvent s'appliquer à "Contre-jour". A noter surtout une histoire liée au spath d'Islande, cette calcite très pure qui divise en deux le rayon qui la traverse. Vues au travers la petite fumée de ce cristal de roche (et l'on comprend bien l'estime de Soleil Vert pour cet auteur (rajout en NDLR-), les images se dédoublent, comme se démultiplient à l'envi les ramifications de cette somme en trompe-l'œil et ses jeux de miroirs dont il n'est pas possible qu'une seule lecture épuise le sens. On dira que c'est le grand roman de la lumière écrit depuis l'obscurité du grand Pynchon, c'est probable, qui doit bien se marrer de nous autres, ahuris par la beauté de son clair-obscur /// j j-j ///

et comprenne qui pourra... Voilàj !

Christiane a dit…

Alors là, je suis baba ! Quel beau portrait. Merci.

Christiane a dit…

Pour Pynchon, ce portrait est somptueux. Un ermite passionné d'écriture et de méditation.entre deux plans, l'un terrestre, l'autre, ailleurs, indéfinissable.
Vous donnez envie de le lire. Soleil vert a raison, c'est comme une ascension. Une âme taillée comme un diamant noir. C'est un homme secret et c'est un prisme traversé par la lumière. Il m'étonne. Le rapport à Gould est éclairant.