mardi 15 novembre 2022

Souvenirs du futur

Sigismund Krzyzanowski - Souvenirs du futur - Verdier - Slovo

 

 

 

Sous l’action du Temps et de l’inconscience des hommes, les glaciers reculent, révélant les restes d’anciennes expéditions en haute montagne. En littérature aussi le Temps restitue des œuvres oubliées où dont on soupçonnait l’existence, comme récemment les derniers manuscrits de Céline. Plus rarement un auteur fait surface. C’est le cas de Sigismund Krzyzanowski, romancier et dramaturge russe d’ascendance polonaise qui vécut à Kiev et Moscou dans la première moitié du XXe siècle : « Un jour, un historien décrira les années que nous vivons actuellement et dira « C’était le temps où l’aveugle et gluant suffixe « -isme » rampait partout, se collant comme une ventouse à la fin des mots » ». Faute de trouver des éditeurs, il s’orienta vers la traduction, le théâtre et les livrets d’Opera. Il mourra dans la précarité et l’oubli en 1950.

 

Quelques quarante ans après, ses romans et nouvelles paraissent, notamment en France chez Verdier. On découvre des textes fantastiques et expérimentaux déconcertants. Dans un des plus ardus, Le Club des tueurs de lettres, des personnages se réunissent périodiquement dans une bibliothèque vide. Chacun est amené à imaginer une histoire. L’un d’entre eux réécrit une pièce de Shakespeare avec des demi-personnages … Souvenirs du futur, plus accessible, raconte dans la tradition de Wells, l’odyssée d’un voyageur du temps. Au-delà des explications pseudo-scientifiques plutôt évocatrices d’une philosophie de la perception du Temps, le récit montre un scientifique tenter d’échapper à l’étroitesse de son époque au sens propre du mot. Krzyzanowski a vécu comme nombre de moscovites dans un appartement de moins de dix mètres carrés. Le héros d’une de ses nouvelles applique une pommade de « Superficine » pour agrandir sa chambre. Sterer, lui, doit résister au Temps avant de le dompter. Enrôlé dans le premier conflit mondial, il apprend à son retour des camps que l’héritage de son père a été confisqué par le pouvoir soviétique. Qu’importe, il tente de trouver des financements, propose une nouvelle forme de tourisme et finit par achever la construction de son engin dans un dessous d’escalier.

 

On n'en apprendra pas plus sur les excursions temporelles du voyageur. Qu'a-t-il vu, qui a-t-il rencontré ? Est-ce un rêve ? Les premières pages sont délicieuses. Le père de Maximilien Sterer raconte à son enfant l’histoire de Tic et Tac, les deux fils de l’Horloge.  Un jour ils s’échappent et depuis lors elle ne cesse de les appeler, tic-tac, tic-tac. Et si les Russes étaient passés à côté d’un Passe-Muraille, d’un Marcel Aymé ?

 

78 commentaires:

Christiane a dit…

Passionnant ce retour à un auteur -Sigismund Krzyzanowski -dont le roman précédent "Le club des tueurs de lettres" nous avait laissés perplexes et même divisés.
En attendant de me risquer dans ce nouveau roman, je regarde une fiction ambigüe : "Le prix du danger" d'Yves Boisset. Un film de 1984.
Un chômeur, sélectionné pour participer à un jeu télévisé dans l'espoir de toucher une forte somme d'argent accepté d'être la proie d'une chasse à l'homme filmée en direct.
Piccoli et Cremer redoutables, Marie
France Pisier ambigüe . Gérard Lanvin très crédible dans le rôle de la proie qui n'a pas du tout envie de mourir.
Intéressante problématique du droit de tuer si accord des participants du risque encouru. Réflexion passionnante sur les émissions de télévision et leur envie de faire parfois du chiffre en se moquant de l'éthique.

Soleil vert a dit…

Inspiré d'une nouvelle d'un recueil dont je parlais ici :)

https://soleilgreen.blogspot.com/2022/03/le-temps-des-retrouvailles.html

Christiane a dit…

Remarquable chronique et remarquable film . Les deux dénoncent aussi le goût ambigu du public, très semblable à celui de la Rome antique où l'on se pressait dans les arènes pour assister aux mises à mort violentes. Et plus tard les exécutions publiques, les bûchers. Quel gouffre dans le psychisme de l'être humain, parfois, par cette recherche du spectacle interdit, de la violence sur un écran ou dans un roman.
Et ces créateurs qui utilisent ces questions sans réponse pour écrire un roman, tourner un film.
Vous êtes passionnant, Soleil vert, car vous ouvrez les portes de l'inconscient par la présentation de ces romans de science-fiction ou non, qui autorisent à l'imagination bien des spéculations et à la pensée d'interroger sans fin ce monde et nous-mêmes.
Votre fiche est passionnante. Je vais la relire. Merci.

Christiane a dit…


Oui, c'est tout à fait cela :.

"L’un d’entre eux est devenu immortel : « Le prix du danger » paru en 1958. Sheckley, peut-être inspiré par « The Most Dangerous Game » de Richard Connell, inventait la téléréalité et poussait aussitôt le concept dans ses derniers retranchements en décrivant une chasse à l’homme télévisée en direct. « La septième victime »."

Christiane a dit…

Dans votre fiche sur "Souvenirs du futur", vous écrivez :
""Souvenirs du futur" raconte dans la tradition de Wells, l’odyssée d’un voyageur du temps. Au-delà des explications pseudo-scientifiques plutôt évocatrices d’une philosophie de la perception du Temps, le récit montre un scientifique tenter d’échapper à l’étroitesse de son époque au sens propre du mot.(...) Sterer doit résister au Temps avant de le dompter."

Il semble que l'interrogation se porte encore sur le temps. (Merci pour le croquis.)
Une des façons d’échapper à l'Histoire surtout dans ce pays où des disparitions inquiétantes, des morts subites, des déportations dressent un bilan sombre des volontés de puissance de régimes tyranniques qui se sont succédés où la liberté de pensée est très risquée... un cauchemar qui s'inscrit dans une géographie aussi.
J'ai encore en mémoire les "Récits de la Kolyma" de Varlam Chalamov et le terrible et douloureux "Météorologue" d'Olivier Rolin.
Le mystère de ce qu'on nomme le temps est d'ailleurs une des pistes possibles du livre que vous aviez chroniqué de Sigismund Krzyzanowski : "Le club des tueurs de lettres".

Christiane a dit…

Dans votre croquis le gouffre est dans la verticale. C'est là où l'on se perd...

Soleil vert a dit…

V2- 16/11/22

Christiane a dit…

??????

Christiane a dit…

Ceux qui tombent sur l'Ukraine comme ceux envoyés par Hitler sur l'Angleterre ?

Christiane a dit…

https://www.techno-science.net/definition/10194.html

Et l'horreur recommence....

Christiane a dit…

Quelques lignes du "Météorologue" d'Olivier Rolin. C'est avant la déportation, avant l'assassinat d'Alexeï Féodossiévitch. Peut-être alors, la force qui lui a permis de là-bas, du bagne, d'envoyer des dessins, des herbiers, des devinettes à sa fille, Éléonora, venait du souvenir de ces paysages.
"Il me plairait de penser qu'Alexeï Féodossiévitch sentit naître en lui une curiosité pour les météores en regardant rouler les nuages au-dessus de la plaine infinie. Peintres et écrivains ont maintes fois décrit ce paysage de la campagne russe ou ukrainienne. Profondeur vertigineuse de l'espace, vastitude où tout semble immobile, silence que ne trouvent que des cris d'oiseaux, cailles, coucous, huppés, corbeaux. Champs de blé ou de seigle, étendues d'herbes bleues piquées de fleurs jaunes d'absinthe, entre lesquels file un chemin creusé d'ornières. Bosquets de bouleaux et de peupliers graciles, les toits d'un village, parfois l'éclat mince d'une rivière : c'est le paysage de la "steppe" de beaucoup de récits de Tchékhov, le paysage de la poésie d'Essenine, des tableaux de Lévitan. (...)
J'aimerais imaginer, donc, qu'Alexeï Féodossiévitch a songé un jour, allongé dans l'herbe comme l'Arseniev de Bounine : "Quelle bouleversante beauté ! Monter sur ce nuage et s'envoler, voguer dans ces hauteurs effrayantes, dans l'immensité des airs..." D'ailleurs, peut-être l'a-t-il songé."

Anonyme a dit…

Disparitions en Russie. Je possède la brochure d’un Musée de l’ Athéisme, communisme des grandes heures, qui semble bel et bien avoir disparu en tant que Musée. Revanche de Marx pour qui l’Infrastructure commande la superstructure ? En tous cas Beau travail cartonné, d’aspect constructiviste, qui laisse pensif. Dans le même genre , êtes vous parvenu à la fin d’ Aelita, le roman de SF russe bonne époque de Tolstoi ( Alexis!) . Il en existe une traduction française pour membres du PC en villégiature à Moscou ! Rêvons sur les livres…même les plus improbables… Bien à vous. MC


Soleil vert a dit…

Aelita : je ne connaissais pas.
Merci de la découverte.

Christiane a dit…

Les premières pages de "souvenirs du futur" de Sigismund Krzyzanowski sont vraiment épatantes pour suivre dans l'imaginaire du petit Max l'apparition d'une question : qu'est-ce que le temps. J'aime vraiment beaucoup et le conte et le démontage de la pendule. Ce père est formidable et Max aussi.

Christiane a dit…

Ah, je dévore le roman. Quel talent, mais quel talent !

Christiane a dit…

Ce Max est étonnant "tentant de mesurer l'intervalle séparant la fin du passé du commencement du futur."
Il vit dans ses pensées en continu. Il sait que le temps n'est pas linéaire.
Roman ? Poème ? Mathématiques ?Métaphysique ? Gaité à la Prévert ?
C'est tout cela mais c'est aussi une vraie aventure, c'est aussi de l'amitié.
J'aime les couvertures jaune d'or de Verdier. Impression d'ouvrir un bouton d'or...

Christiane a dit…

Je suis contente de lire ce roman sur papier et pas sur la liseuse. Le temps n'est pas le même pour les deux supports. Tourner les pages d'un livre, le tenir dans ses mains mêlent le corps à la lecture par la vue, le toucher, la mémoire visuelle. Les mots sont comme accrochés à un espace de la page. Oui, certainement un rapport avec la conscience du temps dans l'acte de lire.
Max est maintenant soldat, enfin prisonnier, ce qui lui laisse du temps pour penser à la machine qu'il veut inventer.
Il ne voit pas les autres, ni l'espace, ni la guerre. Il semble vivre dans sa tête.
La rêverie est une machine trés performante aussi pour habiter un temps non linéaire.
Si j'avais rencontré Max (Sterer) j'aurais aimé en parler avec lui.
Voilà, errance de la science-fiction !

Christiane a dit…

Ah, qu'est-ce que c'était bien. Je me suis régalée. J'ai beaucoup pensé au "Passe-muraille" de Marcel Aymé. Qui, lui, est resté coincé dans un mur.
C'est un roman qui se vit comme un rêve. Ce voyageur du temps ne peut regagner le temps d'où il est parti. Ne pouvant plus aller ni vers le futur ni vers le passé. Figé . Il semble qu'une lacune dans son passé ait désaccordé son voyage.
Son temps ne coïncidant pas avec celui de ses auditeurs ( conférence), ceux-ci partent dépités, l'accusant de bluff. Mais son temps se déroulait à une autre vitesse que le leur.
Il retrouve ce désaccord de la pendule quand il avait inversé les aiguilles des heures et des minutes et les roues crantées du mécanisme de la pendule et que son père ne comprenait plus l'écoulement du temps.
C'est un superbe roman. Merci Soleil vert. Si vous en avez d'autres, n'hésitez pas, je suis preneur !

Christiane a dit…

Sigismund Krzyzanowski , par son écriture, aborde un monde de possibles qui n'est pas palpable, qui nous cerne comme une ombre, comme de la poésie. Un monde où Max devient la doublure de lui-même, un fantôme, un nomade captif du temps. Max s'engage ainsi dans de multiples devenirs venus soit du passé soit du futur sans être dans la succession de ces temps de vie. Comment le futur peut se retrouver là, dans sa mémoire ? Où se conserve le souvenir ? Et pourtant la raison du lecteur y trouve son compte.
Votre croquis (billet) est épatant.
Le monde de cet écrivain se tient tout entier à l'intérieur de sa pensée, dans un temps virtuel.
Il est étrange que l'amnésie de son personnage concerne les années de souffrance et de faim, de terreur aussi pendant la guerre. Tout se trouve écrit en même temps mêlant possible et impossible. L'écriture devient ce qui fait le réel.. Avec des mots on peut tout créer.
Il déchire le temps, le coupe.
Mais Max n'a pas d'origine, ni de mort. Il a déjà quatre ans quand le roman commence puis il disparait. Sa vie est chimérique, vertigineuse, bien avant d'inventer sa machine.
Je sens que MC va évoquer Borges.

Soleil vert a dit…

Merci.
Parfois on tombe sur un bon livre ...

Christiane a dit…

Souvent !

Christiane a dit…

Ce qui est passionnant c'est le sort réservé au compte-rendu de Max Sterer écrit en 1928 sous le titre "Souvenirs du futur" et dévoilant l'avenir jusqu'en 1957. Il est détruit par l'éditeur à qui il faisait peur. Y a-t-il un témoin qui prouve ces faits ? , pensait-il car les faits étaient le seul témoignage de Max - et non des prophéties.
Un peu la réaction que nous avons devant les romans de science-fiction, aujourd'hui.
Mais s'il se produisait que dans toutes ces fictions se soit glissé un témoin de ces faits revenant du futur ? Le croirions nous ? Ou dirions-nous, c'est du bluff...

Christiane a dit…

https://fr.wikipedia.org/wiki/Contact_(film,_1997)

Dans ce film, "Contact", le final réserve une surprise : l'enregistrement (plein de parasites) a bien duré 18 heures, alors que les scientifiques observant la sphère s'écrouler n'ont eu conscience que de quelques minutes.
Ce final m'est revenu en mémoire quand j'ai lu les réactions des "clebs" incrédules et moqueurs (écrivains assistant à la réunion où Max Sterer tentait de les convaincre de son voyage dans le temps).

Auriez-vous un dossier, Soleil vert, sur les avancées scientifiques d'interrogation sur le temps, la durée ? ( Pas trop difficile à comprendre).

Christiane a dit…

https://inexplore.inrees.com/articles/le-temps-une-illusion

J'en suis là mais il n'y a que des questions...

Soleil vert a dit…

Sur le Temps :

https://www.radiofrance.fr/franceculture/etienne-klein-le-temps-existe-t-il-4418278

Christiane a dit…

Ah merci je vais écouter cela quand le film sera terminé. (Casino / 1995 / Scorsese/ De Niro / Sharon Stone)

Anonyme a dit…

Sur le Club des Tueurs de Lettres, cela fait penser au grand érudit Roger Chartier, qui consacra un livre à une pièce disparue de Shakespeare,Cardenio. Pas question de refaire la pièce, mais de collecter toutes les informations possibles. Bien à vous. MC

Christiane a dit…

Étrange film. J'ai pensé au Mépris de Godard à cause des rouges, de l'éclatement de l'histoire qui commence par la fin. Ce personnage interprété par de Niro choisit lucidement un destin qui va le broyer. Mais le pire c'est sa solitude et la trahison. Film excessif et terrible. Magnifique.
Bien j'écoute Étienne Klein.

Christiane a dit…

Le cheminement de votre pensée, imprévisible m'étonnera toujours, MC.

Christiane a dit…

Etienne Klein...
Je n'ai pas tout compris. C'est très abstrait leur dialogue.
Néanmoins, j'ai retenu de jolies choses :
Le présent impossible à appréhender puisqu'il se transforme tout le temps dès qu'on cherche à le saisir
L'univers qui a existé longtemps sans nous
Les jumeaux, un sédentaire, l'autre qui voyage et leur temps ne sont plus synchronisés
Le temps des physiciens, le temps des philosophes... Je préfère le deuxième
Et si le temps n'existait pas... (Dernière proposition)
Enfin, je pense à un rêve récent.(je ne sais combien de temps il a duré). Je quittais pour quelques temps des proches puis désirant les rejoindre je me trouvais dans un paysage connu et inconnu. Le temps semblait l'avoir modifié partiellement mais moi je n'avais pas vieilli ni rajeuni. Quelques changements troublants. Je cherchais à rejoindre les miens mais j'étais fascinée par ce paysage impossible à faire coïncider totalement avec celui que j'avais quitté. Des gens inconnus parlaient la même langue mais ne pouvaient répondre à mes questions. Pour eux les repères que je cherchais n'avaient jamais existé. C'était très troublant pas vraiment effrayant. Juste troublant.

Dans le roman de Krzyzanowski quelques jolie choses aussi :
L'enfant demande : - Et si le temps tombe en panne, on le réparera aussi ?
Mon temps est pris par le temps
Et pendant ce temps le temps gagne du temps
Mon passé est encore plus passé que le vôtre
Le petit matin ne se levait pas coincé entre le jour et la nuit...

(Il y a aussi le passage du temps dans vos poèmes et dans ceux de Raymond)

Pour
en
revenir
à Casino, le couple de Niro/ Sharon Stone m'évoque celui de Piccoli/ Bardot. De la passion, du mépris, de la désillusion. Une envie de liberté pour la femme qui meurt chez Scorsese autant que chez Godard. Et la mort est violente.

Bon, il est temps de rêver... Peut-être le paysage mouvant va revenir. J'aimerais bien savoir où il mène...

Bonne nuit aux couche-tard

Christiane a dit…

Mais le temps est inexplicable.

Christiane a dit…

https://www.cairn.info/revue-d-histoire-moderne-et-contemporaine-2015-4-page-168.htm?try_download=1

Pourquoi pas ? Des réécritures ouvrant à l'exploration d'un texte connu, par lui désacralisé.
Mais comme pour Soleil vert, c'était un chapitre obscur.
Tout le livre est obscur, déroutant. Quelques inventions plus passionnantes que d'autres. J'ai du mal à me souvenir de ce livre un peu confus alors que "Souvenirs du futur" est un court roman convaincant.
( Mais cette opinion dépend plus des goûts de la lectrice que je suis que de la comparaison étayée des deux textes. Je ne connais pas assez cet écrivain. Deux livres, ce n'est pas assez pour juger, surtout que l'angle science-fiction éclairait les deux lectures.)
Certains romans et auteurs choisis par Soleil vert dans ce domaine SF m'ont marquée durablement comme ceux de Ray Bradbury, de Kurt Steiner, de Marcel Theroux, de Karinthy, de Priest, (le début de "Ou ce que vous voulez" deJo Walton,) celui de De Filippo, de Seignol...
Deux m'ont paru impénétrables dans la durée : "Galeux" de Graham Jones et "Le monde du fleuve" deP.Jose..
Et le plaisir de découvrir ou relire des grands classiques.
Cela en fait des heures de lecture palpitantes...

Christiane a dit…

https://soleilgreen.blogspot.com/2019/07/curiosite_1.html
Étonnant !
J'ai découvert cet article alors que parcourant la colonne de droite je faisais mémoire de tous les ouvrages que vous avez présentés et qui ouvrent à tant de dialogues.
Quel beau blog ! Une bibliothèque infinie...

Christiane a dit…

https://www.fabula.org/colloques/document4717.php

Et le lien dans l'article est tout aussi étonnant.
Nous revoici dans une méditation sur le temps !!!

Christiane a dit…

Que de surprises ici et quelles ouvertures au monde de la littérature . Retrouver Proust si bien approché dans son rapport au temps dans La Recherche. C'est une joie immense. J'ai passé tant d'heures à le lire, à le relire, à surligner ces enroulements autour d'un mot , d'une pensée puis à admirer comment murissait la phrase, comment elle sinuait entre les pages. Oui, le temps, le voyageur du temps, tellement ailleurs quand lui prenait le besoin d'écrire.

Christiane a dit…

Alberto Manguel, dans son essai "La bibliothèque, la nuit", (Babel / essai traduit de l'anglais par Christine Le Bœuf ) écrit dans un avant-propos :
"Le point de départ est une question.
Hors la théologie et la littérature fantastique, il ne fait guère de doute que les traits principaux de notre univers sont la pénurie de sens et l'absence de tout objectif discernable. Et cependant, pleins d'un optimisme stupéfiant, nous continuons d'assembler sous forme de rouleaux, de livres et de microprocesseurs, sur les étagères de bibliothèques matérielles, virtuelles où autres, les moindres fragments d'information que nous pouvons récolter, avec l'intention pathétique de prêter au monde un semblant de sens et d'ordre, tout en sachant très bien, si fort que nous désirions croire le contraire, que nos entreprises sont hélas vouées à l'échec. (...)
Les bibliothèques, la mienne ou celles que j'ai partagées avec un large public de lecteurs, m'ont toujours paru des lieux d'une agréable folie et, si loin que remonte ma mémoire, elles m'ont séduit par leur logique labyrinthique, qui suggère que la raison règne sur une cacophonie de livres. J'éprouve un plaisir d'aventurier à me perdre entre les rayonnages encombrés avec la conviction superstitieuse qu'une hierarchie établie de lettres ou de chiffres me mènera un jour à une destination promise. (...)
Aujourd'hui (...) , je vis entouré d'un nombre toujours croissant d'étagères chargées de livres dont les limites deviennent floues et commencent à se confondre avec celles de la maison. Le titre de ce livre aurait dû être "Voyage autour de ma chambre". Malheureusement, voici plus de deux siècles, le grand Xavier de Maistre l'a trouvé avant moi."

Christiane a dit…

De Xavier de Maistre, justement, mais d'un autre ouvrage, cette évocation délicieuse d'un lien de fraternité ( ou d'amitié) :
"Mon frère et moi, nous étions comme les deux aiguilles d'une montre : il était la grande, j'étais la petite, mais nous marquio s la même heure, quoique d'une manière différente."

Christiane a dit…

Et ce passage du "Voyage autour de ma chambre" sur je relis toujours en souriant :
"Lorsque vous lisez un livre, monsieur, et qu'une idée plus agréable entre tout à coup dans votre imagination, votre âme s'y attache tout de suite et oublié le livre, tandis que vos yeux suivent machinalement les mots et les lignes ; vous achevez la page sans la comprendre et sans vous souvenir de ce que vous avez lu. "

Un tout petit livre. 50 pages mais vraiment délicieux, . Écrit au XVIIIe siècle (1794).
Xavier était consigné a la chambre car officier en garnison, en Italie, une malheureuse affaire de duel le fit mettre aux arrêts pendant quelques jours. Ne pouvant quitter sa chambre, il écrivit sur un cahier des impressions sur le temps qui passe et comme il le passait.
Le comte Joseph de Maistre, son frère, trouva ce cahier intitulé "Voyage autour de ma chambre", original et d'une réelle valeur littéraire. C'est vraiment un petit chef-d'oeuvre de style et de simplicité . À l'insu de son frère il décida de le faire éditer.
J'ai surligné pour le plaisir maint petits passages. Un régal.

Christiane a dit…

Un dernier passage pour accueillir la nuit paisiblement. Et puis, elles vont bien à ce blog.
"Un bon feu, des livres, des plumes, que de ressources contre l'ennui ! Et quel plaisir encore d'oublier ses livres et ses plumes pour tisonner son feu, en se livrant à quelque douce méditation, ou en arrangeant quelques rimes. Les heures glissent alors sur vous, et tombent en silence dans l'éternité, sans vous faire sentir leur triste passage."

Christiane a dit…

Ce qui dans le roman de Sigismund Krzyzanowski fait basculer le lecteur dans une dimension d'étrangeté se tapit parfois dans la notation très précise des pensées et des gestes de Max Sterer alors qu'il est presque parfaitement immobile, enfin ralenti par une plongée dans la naissance d'un raisonnement .
Ainsi, après la traversée des 700 jours du "désert de la faim" dont il ne dira rien ("son biographe la passe sous silence"), il y a le chapitre VII. Le coeur du roman. Sa bascule.
Moscou. Max est le passant qui marche sur le trottoir.
"Ses pas étaient lents.(...)
Ce qui arriva, c'est qu'un léger choc de l'arête d'une planche contre son genou coïncida avec un obstacle logique auquel sa pensée s'était heurtée dans sa progression. Les semelles s'arrêtèrent d'un coup, et le penseur ne prit pas conscience immédiatement, loin s'en faut, de la planche, ni du cri : "Hé ! Attention où tu mets les pieds ! " Comme le cri gênait sa réflexion, il fallait s'en écarter. Le passant fit un pas, mais le pas fut manquent : le sol se cramponnait à sa semelle et l'empêchait d'avancer. Un coup d'œil, et Sterer vit sur son pied droit était enfoncey jusqu'à la cheville dans de l'asphalte molle, en train de refroidir. Il tira plus fort - son pied de libéra, emportant avec lui une vilaine gangue qui le chaussait comme une énorme botte.
Sous les injures des ouvriers et les sifflements joyeux des gamins attirés par l'aventure, Sterer continua son chemin, mais la sensation du déséquilibre de ses pieds s'immisçait dans l'enchaînement des prémisses et rompait l'équilibre de ses pensées."

Ce passage est d'une puissance rare. On ne peut échapper à l'étrangeté de ce corps dissocié de ce qui se passe dans le cerveau de Max.
Et si la science-fiction prenait ses aises dans cette dissociation ? Ce qui est d'une continuité limpide dans l'aventure de ce personnage c'est sa pensée qui traverse le roman et les aventures de son corps et du temps dans une sorte de ouate où tout naît et disparaît et réapparaît sans heurts, avec même une sorte d'indifférence. Il semble dormir dans la réalité pour suivre son rêve : une machine qui couperait le temps. Car pour lui, si les gens se déplacent dans l'espace, il faut pouvoir le faire aussi avec le temps. Et cette obsession détourne son attention du temps lui-même.
Un voile d'irréalité fige peu a peu le temps et le mouvement de toutes les horloges. Comme un blanc dans l'existence du monde. Une collision avec le temps. Un choc silencieux.
C'est tout-à-fait extraordinaire.

Christiane a dit…

manqué - enfoncé

Soleil vert a dit…

Et si la science-fiction prenait ses aises dans cette dissociation ?

C'est un thème qui revient assez fréquemment en SF; exemple, la nouvelle "Gamma Sud" du recueil Les Galaxiales de Michel Demuth, peut-être "l'été étranger" du même volume.

Christiane a dit…

Merci, Soleil vert.
Pour l'instant, je n’ai pas terminé ce roman de S.Krzyzanowski, c'est-à-dire, d'y revenir pour retrouver les espaces qui m'ont ébranlée. Ces passages où une lecture raisonnée se laissait envahir par une distance, une douceur, comme de retrouver l'obstination de l'enfance à s'évader des limites, une incertitude... La réalité use nos rêves et absorbe lentement l'enfant que nous fûmes.
L'éternité et la mémoire ? Il faut que quelque chose se retire pour grandir. Je choisis le chemin inverse.
Avant que Max Steirer disparaisse, S.Krzyzanowski écrit dans son roman, presque achevé : "Le silence moelleux des flocons étendit ses couches blanches sur les pavés à peine poudrés. En chutes régulières, la neige se hâtait de préparer, tant que les rues étaient désertes et que les rêves ne s'étaient pas métamorphosés en vies, un paysage hivernal fragile comme de la porcelaine".
Stynski ne le reverrait jamais. Il ne lui restait que quelques feuilles éparses où Sterer, l'auteur du coupe-temps, avait noté quelques pensées, des morceaux de sa vie avant le départ de la machine, dont cette phrase : "Ici, il est dangereux de traverser le temps."

Christiane a dit…

Mes détours par Alberto Manguel ( merci Passou) et X. De Maistre ne sont qu'une façon d'approfondir ma lecture de "Souvenirs du futur" comme votre variation sur Proust et le temps ou le lien Fabula.

Christiane a dit…

Je lis lentement, je rumine ( remache les mots de l'auteur, les oublie, les laisse me hanter). Quelque part dans le livre se trouvent les réponses, alors j'y retourne.
Parfois, je relis tout le livre, complétant ainsi une première expérience.
"Au commencement était le Verbe"...
L'esprit critique s'incline devant l'univers poétique, le langage du rêve. L'ambiance du roman de S.Krzyzanowski permet à la lectrice de faire rêver le langage, de le faire germer. Les mots deviennent des cerfs-volants. Rupture féconde avec le temps...

Christiane a dit…

Soleil vert, avez-vous présenté ce recueil de nouvelled : "Les Galaxiales" de Michel Demuth ?

Anonyme a dit…

Non, en cours de lecture.SV

Anonyme a dit…

On suppose que la «  grande aiguille » plaisamment évoquée par Xavier est Joseph de Maistre, ce qui rend assez bien compte en son temps de l’écrasement du second par le premier. Il faut la fin du dix-neuvième siècle et desderniesx chances de la Monarchre pour que Joseph s’efface et que Xavier émerge avec le Voyage, souvent couplé avec « La Jeune Sibérienne ».il semble de nos jours que cette comète s’efface de nouveau, avant un enieme retour?

Anonyme a dit…

Lu le Priest . Un côté un peu conte de fees, malgré tout. (Les voyages dans le temps )Le parti-pris de fonder un couple de jumeaux à partir de l’affaire Beck déséquilibre ledit couple. On comprend assez vite ce qui est en jeu. Le côté roman climatique vieillit mal.On a connu plus tragique.-Wessex Project- plus étrange et plus tendu ( Inverted World,Thé Adjacent) que ce roman sage et assez linéaire. Un Priest , oui, mais de second rayon.

Christiane a dit…

Oh, merci, M.C, je me demandais quelle différence on pouvait faire entre l'importance de ces deux aiguilles ?
S'il n'y avait que la grande (les minutes), le temps tournerait en rond avec un retour à zéro toutes les soixante secondes, alors que celle des heures, la petite, aurait une révolution plus longue ( 12 heures).
Ce qui nous ramène au roman de S. Krzyzanowski. Pour étonner son père ou lui faire perdre sa superbe, Max, enfant, démonte le mécanisme de la pendule et relie la petite aiguille à la roue dentée de la grande et inversement.
Le père regardant la pendule pendant le souper est perplexe !
"Quand on se mit à table, Sterer l'Ancien regarda le cadran et lut : deux heures trois. "Il est bien tard", grommela-t-il en se dépêchant d'attraper sa cuiller. Au regard suivant, entre la soupe et le plat de resistancet, l'horloge répondit : quatre heures deux. "Qu'est-ce que c'est que ce zum Teufel ? Nous n'avons quand même pas mis deux heures à la manger, cette soupe !" Sterer le jeune ne disait rien, ne levait pas les yeux ; quand on quitta la table les aiguilles avaient atteint sept heures cinq, et le temps que le domestique ramène l'horloger qui habitait tout près, l'horloge avait déclaré qu'il allait être minuit, bien que le soleil brillait à la fenêtre."
Quant à Joseph de Maistre, je n'ai jamais lu ses "Lettres d'un royaliste savoisien". La renommée du comte eut moins de postérité que celle de son cadet !

Christiane a dit…

Ah, un conte de fée sage et assez linéaire... Alors ne lisez pas "Souvenirs du futur", c'est de "la même farine"!
Mais cœur j'aime ces contes poétiques...
Je me lance dans du cruel venu du futur avec les nouvelles du recueil "Les Galaxiales" de Michel Demuth où se glisse néanmoins une adorable fillette rousse qui compte les tâches de soleil sur le visage de Paul Ciaggi.

Christiane a dit…

comme plutôt que cœur !

Christiane a dit…

"L'été étranger" tient en haleine tout en étant prévisible. Le danger est parfois plus imaginaire que réel....
"Gamma-sud" est plus pervers puisqu'on greffe à un homme ce qui fera de lui une arme redoutable, puis on effacera sa mémoire.
Ces deux nouvelles sont glaçantes et pessimistes mais très très bien écrites pour maintenir un mystère.
Je préfère l'univers de S. Krzyzanowski ou celui de Priest.

Christiane a dit…

Quant à la dissociation du personnage Max Sterer dans le roman, elle n'est pas de même nature que celles subies par le personnage de Gama-sud qui lui est métamorphosé en animal. Max est distrait de façon passagère. Son esprit est préoccupé par autre chose que par les contingences matérielles, ici le chantier. Il pense au temps et à sa machine coupe-temps. Son absence de réflexes face à ce danger n'est donc pas le signe de l'intervention d'une entité extraterrestre qui l'aurait transformé physiquement ou psychiquement mais une simple distraction.
C'est un monde onirique, subtil.
Son quotidien n'aurait pas été transformé sans cette machine qui lui permit, chaotiquement, de se déplacer dans le temps.
Pour la deuxième nouvelle, "L'été étranger", des "Galaxiales" de Michel Demuth , je n'ai pas trouvé de dissociation mais plutôt une perte de repères due à l'accident. Le personnage ne sait plus où il est et projette du danger sur les silhouettes des machines qu'il ne reconnaît pas (nuit) et qu'il suppose être des monstres extraterrestres. Ce n'est pas une dissociation, c'est un environnement non reconnu par un être blessé et choqué. Perte aussi de la notion de temps à cause du voyage dans l'espace qui devait durer plusieurs années.

Christiane a dit…

Néanmoins dans la nouvelle "L'été étranger" plusieurs détails m'intriguent :
- La date 1920 sous le titre
- Un petit texte de prologue de quelques lignes faisant état d'une tombe où est gravé le nom du personnage au centre de cette nouvelle.
Mais, il est indiqué qu'il n'y a personne dans la tombe et que cette tombe est au cœur d'une jungle sur la planète Sirius.

De plus, à la fin de la nouvelle, ce capitaine qui paraît être un terrien, portant l'insigne de la Commission Internationales de l'Espace.
Il dit : - Il se croyait arrivé sur un des mondes de Siriuset évoque le tracteur, l'hélicoptère, la jeep... Autant de véhicules familiers sur terre.
Il évoque aussi le Langevin II, son vaisseau, qui se serait écrasé dans le Sud saharien juste après son départ.
Pourriez-vous, cher Soleil vert, éclaircir ce pataquès vous qui analysez si facilement tous ces ouvrages de SF.
Car enfin, avant de mourir ce voyageur... Immobile lit sur une pancarte : Département de la Nièvre - Gien s/ Cure 8 km.

Si le vaisseau n'est pas parti de la Terre a cause de l'accident, comment son existence est connue sur Sirius au point de graver son nom sur la stèle d'une tombe vide ?
Ce Grégory était-il donc un habitant de Sirius ?
Et le titre ?

A vous. Vous avez l'antenne !!!!

Christiane a dit…

Imbroglio plutôt que Pataquès

Soleil vert a dit…

Ma référence c'est L'Etranger de Camus

Christiane a dit…

Ah ça c'est dingue, je le relisais hier.
Là oui, il y a dissociation. Il ne sait pas pour quelles raisons il ne pleure pas où pourquoi quand l'éclat de soleil frappe la lame, il tue. Il est toujours ailleurs dans sa tête, cohérent, pas tiraillé du tout par des questions sans réponse même pendant son procès. Il passe au milieu des autres incompris, solitaire, ailleurs.
Très chouette réponse.
Bonne soirée

Anonyme a dit…

Ce sont les Soirées de Petersburg qui furent très lues, et peuvent l’être encore. Mais le Du Pape valut à son auteur une lettre du Vatican comme quoi Mr le Comte n’avait vraiment rien compris à la papauté. Au chapitre des lettres, signalons vers 1856 une édition remaniée pour plaire à Cavour fut- ce de manière posthume… Bien à vous. MC

Christiane a dit…

Je connais peu la vie mouvementées de ces deux frères et les écrits de Joseph qui suivirent ses perigrinations sur fond de révolution française.
Mais ce "Voyage autour de ma chambre" de Xavier de Maistre m'a laissé un souvenir délicat. Je l'ai évoqué pour son pouvoir imaginaire d'évasion, alors que je lisais cet étrange livre "Souvenirs du futur."

Christiane a dit…

Ecoutez. C'est magnifique.

https://www.google.com/url?sa=t&source=web&rct=j&url=https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/serie-les-exiles-du-soleil-correspondance-entre-albert-camus-et-maria-casares&ved=2ahUKEwjdn6yw6cj7AhXBTKQEHUDfCuIQFnoECAsQAQ&usg=AOvVaw0f_wkneagkdcZvVthSoqZL

Anonyme a dit…

Merci pour la découverte de Le météorologue ”d’Olivier Rolin.
Son destin est poignant.
Je poursuis avec Port-Soudan”,non moins poignant. Très bien écrit.

Christiane a dit…

Ah, Olivier Rolin, j'aime vraiment beaucoup ses livres, son écriture, sa droiture. J'ai acheté les deux tomes contenant son oeuvre (Circus 1 et 2, Seuil) car ils donnent accès , outre ses romans à des récits, des articles intéressants. "Port Soudan"... Une merveille, le premier livre que j'ai lu de lui.
Jacques Pierre Amette a écrit de belles pages en lisant ses livres.
Sur le Point où il fut critique littéraire, il intitula en 2002 un article sur lui : "Une génération blessée". C'était à propos de "Tigre en papier".
(Une longue confidence, une nuit,dans ce roman à Marie, la fille d'un ami mort.)
JPA écrit : "L'ancien militant raconte tout ça à sa petite Lolita lovée dans la vieille DS (...) Que de portes à franchir, pour retrouver ce passé, goudron, asphalte, jungle, néons, poisseuse mémoire, cette nuit est hantée... C'est une réunion de fantômes. Rolin se souvient à perte de vue. Il creuse les décombres, remonte vers Haiphong ou Malraux, passe par Sarajevo, abat les cartes du temps (...) Olivier Rolin solde son passé, descelle ses souvenirs. (...)
Les fils ont voulu être à la hauteur des pères. Cette génération a voulu gérer l'impossible théâtre de l'Histoire..."
Ces mots m'avaient donné envie de lire ce grand roman désabusé. ( L'article est dans ces Circus).
Heureuse de votre découverte.

Christiane a dit…

A la fin du livre ("Le météorologue") il y a les dessins qu'il envoyait à sa fille. Là, j'ai craqué...

Christiane a dit…

De "Port Soudan" - il faudrait que je le relise - je garde quelques souvenirs très précis. Un coin d'Afrique de misère et de trafic de jeunes femmes vouées à la prostitution et à l'esclavage dans des maisons de nantis. Une belle et énigmatique personnalité, celle de cette femme de ménage qui raconte l'ami disparu puisque de lui "d.c.d" il n'a reçu qu'une lettre presque vide avec ces mots "cher ami". J'avais aimé les dialogues entre elle et le narrateur encore qu'elle soit assez taiseuse. Il l'observe beaucoup. Et puis ces grands bateaux échoués dans l'eau huileuse du port, tout rouillés.
Bon je vous laisse lire.
Un récit émouvant ( Le météorologue) et maintenant un roman magnifique. Parfois très proche de l'humeur de certains de vos poèmes... Mais vous écrivez avec d'autres mots cette traversée melancolique de la vie.
Bonne lecture.

Christiane a dit…

Rimbaud et Conrad rôdent dans la solitude de A. , Son ami, avant sa mort...
Cela devrait vous plaire...

Christiane a dit…

Mais ce dont je ne veux pas me souvenir, c'est que ces deux hommes ont été brisés, chacun, par la trahison d'une femme aimée.
Parce que la trahison c'est pire que la mort pour chacun d'eux.
Il y a un train, comme dans un de vos poèmes mais c'est la femme qui part et l'homme qui reste sur le quai, le coeur broyé par les grincements des roues du train qui s'éloigne.
Mais le narrateur était jeune, il a survécu à ce chagrin. L'ami, lui, a vécu cet abandon trop tard.
Un si beau roman....

Christiane a dit…

Si beau roman car une amitié forte, invincible, se dévoile au fil des pages entre ses deux hommes, si proches que parfois on ne sait plus s'il s'agit de A. ou de son ami qui va à sa rencontre au-delà de la mort volontaire qu'il s'est donnée.
Et puis, Paris des années 60... Quel bonheur...

Christiane a dit…

J'évoquais pour vous les critiques littéraires de haute volée de Jacques Pierre Amette à l'époque de ses rendez-vous dans l'hebdomadaire Le Point. Voilà que son frère de plume, le lumineux Paul Edel vient d'offrir un billet bouleversant sur André Hardellet. Je ne connaissais que "Le bal chez Temporel", le parolier de cette chanson que j'aimais tant. Je découvre en lisant le billet de PE. l'écriture fine de l'écrivain André Hardellet. C'est un grand bonheur.
C'est le temps des découvertes....

Christiane a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
Christiane a dit…


Et sa mue vers la chanson que nous avons fredonnée : Bal chez Temporel.

"Si tu reviens jamais danser chez Temporel
Un jour ou l'autre
Pense à ceux qui tous ont laissé leurs noms gravés
Auprès du notre
D'une rencontre au bord de l'eau
Ne restent que quatre initiales
Et deux cœurs taillés au couteau
Dans le bois des tables bancales
Si tu reviens jamais danser chez Temporel
Un jour ou l'autre
Pense à ceux qui tous ont laissé leurs noms gravés
Auprès du notre
Sur le vieux comptoir tu pourras
Si le cœur t'en dit boire un verre
En l'honneur de nos 20 carats
Qui depuis se sont fait la paire
Si tu reviens jamais danser chez Temporel
Un jour ou l'autre
Pense aux doigts qui tous ont laissé quelques "je t'aime"
Auprès du nôtre
Dans ce petit bal mal famé
C'en est assez pour que renaisse
Ce qu'alors nous avons aimé
Et pour que tu le reconnaisses
Si tu reviens jamais danser chez Temporel
Un jour ou l'autre
Pense aux bonheurs qui sont passés là simplement
Comme le nôtre."
(Paroliers : Andre Leon Georges Hardellet / Guy Isidore )



Christiane a dit…

L’année suivant la sortie de l’album de Béart, c’est Patachou qui immortalisera sa propre version de la goualante, accompagnée à l’accordéon par Joe Rossi.

Christiane a dit…

J'ai supprimé la première version erronée. André Hardellet avait intitulé son poème "Au Tremblay". Guy Béart a préféré "Bal chez Temporel".

Christiane a dit…


Une belle vie féconde...

https://www.lemonde.fr/disparitions/article/2022/11/25/hans-magnus-enzensberger-poete-et-auteur-allemand-est-mort_6151596_3382.html

Christiane a dit…

De Hans Magnus Enzensberger je ne connais que "histoire des nuages - 99 méditations" traduites par Frédéric Joly et Patrick Charbonneau.

Christiane a dit…

Ce lien met en regard le poème d'André Hardellet et le texte de la chanson de Guy Béart. Et explique un peu l'évolution du poème.
Oui, il y a des différences...

https://www.richardjeanjacques.com/2010/05/andre-hardellet-le-bijoutier-poete.html

Christiane a dit…


Et pour finir, ce très beau lien d'un site que vous aimez :

https://www.espritsnomades.net/litterature/andre-hardellet-le-promeneur-des-jardins-caches-des-reves/

Soleil vert a dit…

oui !