Les fins d’années étant propices aux récapitulatifs, voici quelques coups de cœur qu’il me faut expliciter. Tout d’abord les ouvrages chroniqués dans ce blog sont, à mon avis et à de rares exceptions près, de bons voir de très bons recueils ou romans. Ils constituent en quelque sorte une présélection. Ensuite, j’ai pris la mauvaise habitude de ne pas me focaliser sur l’actualité littéraire, aimant relire quelques vieux classiques ; des rééditions parues en 2024 figureront dans ce panier. Enfin seul l’imaginaire est pris en compte.
Numéro 1 : La Sonde et la Taille de Laurent
Mantese chez AMI. Personnellement j’aurais titré Affreux, Sales et Méchants
ce requiem pour Conan rédigé dans une langue festive, qui s’autorise tout et domine la quasi-totalité des publications françaises de l’année,
mainstream compris.
Numéro 2 : Karin
Boye - Kallocaïne - Folio SF, le grand livre d’une poétesse scandinave
paru en 1940, traduit en 1947 et précurseur de 1984.
12 commentaires:
Nothing is forever.... Rien n'est éternel.... Mais la promesse demandée est belle. Spleen des Cure...Chanson bouleversante comme les deux autres.
Merci pour les idées cadeaux.
https://picturesofcure.fr/alone-and-nothing-is-forever-endsong-i-can-never-say-goodbye-les-nouveaux-titres-de-the-cure/
Pour faire écho à ce billet, la troisième strophe du Voyage de Baudelaire et le début de la quatrième :
III
"Etonnants voyageurs! quelles nobles histoires
Nous lisons dans vos yeux profonds comme les mers!
Montrez-nous les écrins de vos riches mémoires,
Ces bijoux merveilleux, faits d'astres et d'éthers.
Nous voulons voyager sans vapeur et sans voile!
Faites, pour égayer l'ennui de nos prisons,
Passer sur nos esprits, tendus comme une toile,
Vos souvenirs avec leurs cadres d'horizons.
Dites, qu'avez-vous vu?
IV
«Nous avons vu des astres
Et des flots, nous avons vu des sables aussi;
Et, malgré bien des chocs et d'imprévus désastres,
Nous nous sommes souvent ennuyés, comme ici.
La gloire du soleil sur la mer violette,
La gloire des cités dans le soleil couchant,
Allumaient dans nos coeurs une ardeur inquiète
De plonger dans un ciel au reflet alléchant.
Les plus riches cités, les plus grands paysages,
Jamais ne contenaient l'attrait mystérieux
De ceux que le hasard fait avec les nuages.
Et toujours le désir nous rendait soucieux!...."
"Sous le sapin".... Ces trois mots pour ouvrir une mémoire d'enfance. Des lumières, la nuit, l'attente. Un Père Noël qui doublait par sa présence imaginaire l'annonce des crèches où une naissance paraissait la plus belle à cause de l'âne, du boeuf, des moutons des bergers, des santons, d'un nouveau-né sur un lit de paille entre un père et une mère étonnés et ravis. La semaine suivante s'en venaient les rois mages et la galette et la fève. Un enfant sous la table pour décider de la distribution des parts. De qui serait le roi ou la reine. Des guirlandes dans les rues. Des chants. L'église pour certains. La messe de minuit, irréelle... qui racontait une autre histoire, celle d'une lignée.
Et le sapin, des vrais sapins et l'odeur des résineux qui flottait dans les appartements
Et les cadeaux emballés avec amour. Et ce moment tant attendu : déchirer le papier et découvrir l'objet rêvé, souvent un jouet.. parfois un pull tricoté avec patience et souvent un livre...( Alors la joie était différée. Elle viendrait plus tard quand l'histoire découverte saisirait le jeune lecteur avec ses images, ce langage qui va durer, laisser son empreinte dans la mémoire surtout si la première lecture était offerte par un être aimé comme une caresse.) Mais il y avait ce besoin de toucher un objet, un jouet. Peluche, laine ou bois, mecano ou poupée, petits soldats ou indiens et cowboy pour de futures batailles, petites voitures.
L'objet-livre deviendrait le cadeau idéal, plus tard.
Il me semble que quelque chose a traversé le temps.
Chaque Noël porte sa brume de visages disparus... Et l'accueil de ceux qui sont passés de l'enfance à l'adolescence ou à l'âge adulte.
Noël ,alors, accueille la présence de la mort. Et l'enfant de la crèche dévoile ce passage incompris, inimaginable quand nous étions enfant.
C'est dans cette béance , Soleil vert, que vous avez choisi ces trois livres et les paroles de cette chanson enfouies dans le lien musical.
Vous n'êtes vraiment pas prévisible et "c'est ça le cadeau" : votre présence... comme à la fin du si beau film, "Le pont des espions et ce courageux homme debout qui regarde dans la nuit froide s'éloigner cet espion, cet homme prisonnier pour lequel il s'est battu. Il dit : je n'ai pas de cadeau, presque confus et il entend cette réponse merveilleuse : "Mais vous êtes là. C'est ça votre cadeau". Il découvrira dans l'avion du retour son cadeau : son visage peint par le prisonnier....
https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Pont_des_espions
Je crois que je me contenterai de La Vie Parisienne reaccommodee par le Palazetto Bru Zane, et de l’ Opéra la Sorcière de Camille Erlanger, père de Philippe. On verra bien ce que valent ces versions…
Cher Soleil vert, vous faites écho sur la RdL à cette note (« Aujourd’hui les mots n’ont plus de sens. ») par cette remarque :
"A ceci s’ajoute un autre problème : Le temps nécessaire pour réfuter du baratin est beaucoup plus important que celui qui a permis de le créer. C’est la loi de Brandolini.
Le temps des réseaux sociaux c’est le temps des âneries."
Pour accompagner votre pensée, je relis un livre d'Olivier Rolin qui m'avait plu , "Extérieur monde".
Il écrit page 61 :
"Vieillir, c'est faire l'expérience de cet éloignement : comme une côte vue d'un bateau qui prend le large, le paysage lentement s'estompe. La langue elle-même, certains de ses territoires vous sont étrangers - cependant que celle que vous pratiquez, qui vous semble pure comme le cristal, à d'autres est devenue obscure. Je lis dans Le Monde, quotidien qui se faisait autrefois remarquer par son style à la monsieur de Norpois, des phrases du genre "Facebook fait le pari des chatbots. Le réseau va permettre aux entreprises d'utiliser ces robots de conversation sur Messenger". Une langue éventuelle de la planète Mars ne me serait pas sensiblement moins intelligible. ( Écrivant cela, c'est autant et même plus de moi que je me moque que du quotidien du soir.)"
Et il termine ce sous-chapitre sur le langage par une citation du Journal de Jules Renard :
"Par les soleils couchants, il semble qu'au delà de notre horizon commencent les pays chimériques, les pays brûlés, la Terre de Feu, les pays qui nous jettent en plein rêve, dont l'évocation nous charme..."
Cette contrée fabuleuse, je la trouve souvent dans vos lectures .
Dans le même récit, alors qu'il est sur la glace bleutée de la banquise, au chaud dans son lit de camp, Olivier Rolin ouvre encore "Les Misérables" et souligne une phrase.
(page 75) :
"On est à la fin. Chapitre six du livre neuvième de la cinquième partie : "Il y a, au cimetière du Père-Lachaise, aux environs de la fosse commune, loin du quartier élégant de cette ville des sépulcres, loin de tous ces tombeaux de fantaisie qui étalent en présence de l'éternité les hideuses modes de la mort, dans un angle désert, le long d'un vieux mur, sous un grand if auquel grimpent les liserons, parmi les chiendents et les mousses, une pierre."
Et Olivier Rolin ajoute : "Comme c'est beau, ce sujet rejeté en toute fin de phrase, tombant comme une pierre, comme c'est latin !"
L'épitaphe de Jean Valjean est notée : "Il dort. Quoique la vie fût pour lui bien étrange / Il vivait. Il mourut quand il n'eut plus son ange; / La chose simplement d'elle-même arriva / Comme la nuit se fait lorsque le jour s'en va" .
Ainsi , Olivier Rolin a fini Les Misérables au pôle Nord !
Bien sûr, plein de petits carnets pour prendre des notes !
O.R. écrit : "Prendre des notes : ce qui compte, c'est de trouver (d'essayer de trouver... ) quelques mots justes pour pincer l'impression."
Olivier Rolin écrit page 126, un peu de vous, Soleil vert, tel que vous m'apparaissez à travers vos chroniques litteraires.
"Franchir la limite, la grande bordure des terres, quitter pour un instant sa part du monde, ne plus "avoir les pieds sur terre", ne plus marcher. Entrer dans un autre règne, s'aventurer, (...) avoir le sentiment d'être minuscule, fragile dans un espace immense. Voler, lentement, gauchement, mais voler, être porté, ne plus peser. Rêver, l'eau est le lieu des images sans suite, desaccordées, des songes décousus, des bribes de vies possibles, des ravissements, du vague, de l'inconstant (...) et peu importe que ce ne soit qu'illusion.
Michaux : "L'âme adore nager."
Donc, ces trois livres, nous les avons partagés ces derniers mois. Douceur de relire nos échanges.
Deux romans en cours, celui d'Olivier Rolin , "Extérieur monde", et celui de Miguel Bonnefoy, "Le rêve du jaguar".
"La Montagne dans la mer" de Ray Nayler m'a plu et il me reste à butiner les "textes retrouvés" de Jorge Luis Borges en attendant votre retour.
J'ai aussi un peu évoqué l'art du silence sous le billet -uppercut - de Pierre Assouline.
Avez-vous pu caser vos livres ?
Plus de nouvelles de JJJ. .. C'est triste.
J'ai mis un extrait de poème de Raymond Prunier, là-bas pour évoquer cet artiste inclassable, Tàpies.
Je viens de revoir "Premier contact " , le film de Denis Villeneuve adaptaté de la nouvelle "L'Histoire de ta vie" (Story of Your Life) de Ted Chiang, parue en 1998.
Voilà ,parmi les livres que vous m'avez fait découvrir, celui qui m'a fait faire un bond en avant dans la science-fiction. Merci, Soleil vert.
Cette nouvelle mériterait d'être au pied du sapin.
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