Yoshiharu Tsuge - L’Homme sans talent - Atrabile
Publié en série dans la revue Comic baku, une
vingtaine d’années après Les Fleurs rouges, L’Homme sans
talent (Munō no hito) est la dernière
œuvre de Yoshiharu Tsuge. Il l’a conçue sur la demande de son éditeur, au
sortir d’une période difficile marquée par un séjour en hôpital psychiatrique
et une tentative de reconversion dans le domaine de la vente d’appareils
photographiques.
Les mésaventures de Sukezo Sukegawa, héros de l’histoire
relèvent pour une grande part de l’autobiographie. Comme Tsuge, le personnage
délaisse son activité principale, le manga, afin d’exercer différents métiers
pour lesquels il n’a aucune compétence. Marié, père d’un enfant, il ne doit la
survie de son foyer qu’à l’activité inlassable de sa femme, dont la fidélité et
la patience relèvent au choix, de l’inconscience, de la soumission, de
l’abnégation, de la sainteté. Ce qui aurait pu donner lieu à un remake dramatique
du Gervaise de Zola, est traité ici avec humour, l’épouse ne cessant de se
moquer des entreprises chimériques de son époux. Les postfaciers soulignent
l’analogie de L’Homme sans talent avec le récit « La Famille de
M Lee » - inclus dans Les Fleurs rouges - dont il
pourrait être le développement. La fascination de l’auteur pour la marginalité
trouve d’ailleurs son aboutissement dans le dernier chapitre où s’opère la
fusion symbolique de Sukezo Sukegawa et du poète Seigetsu.
On peut renoncer au dessin et rester artiste dans l’âme. L’avatar
de l’auteur est saisi tout d’abord d’une frénésie de collectionnite de pierres.
Hélas, loin de constituer des spécimens d’exception, ses cailloux proviennent
de la rivière toute proche. Il les met en vente sous un chapiteau de fortune,
affublés de noms ou de qualificatifs aléatoires : vent, âme, nuages. Il y
a des rencontres magiques, comme cet oiseleur qui se souvient d’un Homme-oiseau,
ou le souvenir du poète et rônin Seigetsu. C’est mélancolique, drôle, pittoresque,
le tout présenté dans une édition soignée.
58 commentaires:
Quelle beauté que ce billet et comme il sait exprimer la charge poétique de ce beau livre. Longtemps après l'avoir refermer, ses dessins et cette invraissemblable quête d'un sens de la vie me reviennent.
Rien ne manque dans
votre écriture, Soleil vert , cette brume de misère, cette grisaille du desespoir. Magnifique dessin de couverture. Merci de l'avoir mis dans ce billet.
Je relis votre billet. Il permet la percée et la traversée du monde de Yoshiharu Tsuge. Sa singularité, sa vibration musicale. Un chant qui humanise le désespoir de Sukezo Sukegawa, le héros fragile et démuni de l’histoire. Cet "homme sans talent" accompagne maintenant mes rêveries avec la mémoire des pierres du torrent à vendre pour transmettre leur beauté inutile, la rivière à traverser à dos d'homme pour aller plus vite que le train... L'écriture gagnant les pages de gauche dissipe l'écriture précédente par le truchement de la parole et du dessin..
Et encore l'ombre et la lumière magnifiées dans certaines planches.
Ma première belle expérience de la découverte d'un manga.. je l'ai offert à mon grand petit-fils. Il est émerveillé....
Je suis vraiment heureuse de découvrir votre chronique.
Yoshiharu Tsuge semble, écrivant cette histoire, être sans cesse dans l'insuffisance des tentatives maladroites de son héros. Lueur transfigurante de sa quête, de celle de l'homme oiseau.
Quelle pertinence ce lien avec le roman inachevé de Musil et cette autobiographie rocambolesque d'Amélie Nothomb. J'ajouterai volontiers Le voyage d'hiver de Schubert.
Le pouvoir indomptable d'une voix et d'un dessin. Poète, livre et paysage respirent ensemble.
Ce billet est scintillant. Merci. Merci. Merci.
Pour le plaisir...
https://www.manga-news.com/index.php/actus/2020/02/16/Retour-en-photos-sur-lexposition-Yoshiharu-Tsuge-a-Angouleme
Yoshiharu Tsuge a été accueilli en personne à Angoulême avec une espèce de vénération.
Cela a dû être une belle rencontre qui a dû lui faire chaud au cœur car sa vie est chaotique et mélancolique. Vous avez mis une très belle photo de lui sur votre site.
Elle me rappelle un livre que je continue à relire, souvent : "Trois huttes" de Christian Doumet ( Fata Morgana). Connaissez-vous ?
"Connaître en toute habitation terrestre le passager, le périssable ; savoir qu'aucune ne ressemble à notre tombe, que vivre est au prix d'incessants déménagements - cette sagesse."
Un livre poetique, philosophique qui se noue autour de trois personnages.
Le dernier, Bashô, le poète, est très proche de Yoshiharu Tsuge. On visite encore, aux environs de Kyôto, l'une des huttes du poète Bashô.
"Légèreté idéale d'un souffle perdu, cause à la fois de tristesse et d'illumination. Les huttes elles aussi divaguent dans la ramure du temps.. Façon d'éluder le partage du dehors et du dedans, d'accueillir l'arrivant, de l'abriter sans l'assigner à demeure..."
La photo c'est dans le billet d'avant, Les fleurs rouges. ( Lien bleu).
Surprise....
https://www.facebook.com/festivalBDangouleme/videos/la-visite-%C3%A9mouvante-du-ma%C3%AEtre-yoshiharu-tsuge-laur%C3%A9at-du-fauve-dhonneur-%C3%A0-lexpos/470172683868424/
Adalbert ou Aldebert? Plus connu quand même pour Ondine…ce serait comme réduire Eichendorff à ses « Chevaliers de Fortune », me semble-t-il,….
Ce qui est bien dans la répétition c'est qu'un court instant on est dans l'à -venir. Tout se superpose très exactement sauf introduction du hasard.
Sukezo Sukegawa, le héros de l’histoire, ne se révolte jamais. Il laisse couler le temps. Il ressemble à de l'eau ou du sable.
Je ne crois pas qu'il s'identifie au poète Seigetsu, pas plus qu'au meneur d'oiseaux.
Il attend sans bouger, effleurant des métiers improbables mais il ne sait pas ce qu'il attend dans sa hutte de guingois. Il est fatigué, las d'errer loin de ses encres, de sa plume. Il est comme une toupie immobile dans son tournoiement.
Et l'enfant dit : - Viens papa rentrons à la maison.
Mais la maison a changé.
Je crois qu'il aime vraiment les cailloux, l'eau, les étoiles.
"(...) il ne doit la survie de son foyer qu’à l’activité inlassable de sa femme, dont la fidélité et la patience relèvent au choix, de l’inconscience, de la soumission, de l’abnégation, de la sainteté."
Pas du tout d'accord sur abnégation et sainteté. C'est une femme méchante, moqueuse, méprisante. Elle ne voit en lui qu'une "larve". Drôle de sainte !
Le dernier paragraphe de votre note de lecture exprime la beauté de ce livre à part. Une écriture de soi étrangement estompée de rêves.
Je crois que pour l'épouse vous racontez une autre histoire...
Moi je vois les prospectus qu'elle distribue tous les jours, pendant que son mari baille aux corneilles …
Il ne baille pas aux corneilles, pas du tout. Il regarde les corneilles, les nuages, les étoiles. Il souffre. Regardez la couverture, quel dessin extraordinaire !
La femme ne le comprend pas, ne l'aide pas, ne l'écoute pas. Et puis au XXe siècle les femmes travaillent comme les hommes.
Que le gamin travaille c'est plus gênant, surtout qu'elle est loin d'être aimante avec lui. Ce n'est pas une femme, c'est un cactus !
J'aime les cailloux qu'il "met en vente sous un chapiteau de fortune, affublés de noms ou de qualificatifs aléatoires : vent, âme, nuages. Il y a des rencontres magiques" dans ce beau livre
Écoutez donc Soleil vert monsieur le faiseur de "saintes" : "C’est mélancolique, drôle",
poétique, poignant...
Bref, j'ai aimé ce poète funambule qui rate tout et son bambin.
Écoutez donc Soleil vert monsieur le faiseur de "saintes"
ah ah ah
Bon week-end
Idem !
Mais j'ai oublié presque tout le texte, pas les images. Bonheur de voir juste les dessins dans cette expo a Angoulême. Bonheur de voir Yoshiharu Tsuge dans l'Expo s'arrêtant devant ses dessins, pointant du doigt tel ou tel détail.
Ma passion des images fait que j'oublie l'histoire en mots mais pas en images. Elles remplacent un temps la réalité. La réalité devient celle de l'image. Et dans ce jeu du manga une image remplace l'autre. Les images me servent de mémoire, parlantes jusqu'à leur silence et ça c'est l'Expo ou mes arrêts dans le livre..
Je vous charriais pour cette "sainte" femme (l'épouse) parce que pour moi elle est secondaire. L'itinéraire de Sukezo Sukegawa est essentiel. Il pourrait avoir le même sans femme et sans enfant. Un combat avec la création. Ce temps terrible de la mort de l'inspiration, de l'empêchement de créer. Un homme douloureux. Paniqué. Alors il se perd ailleurs, dans d'autres dédales. Il vend des cailloux... Il tremble d'être là. Dans l'informe. Il vient de loin. Il titube dans un vertige. Il prend la fuite de lui-même. Il est dans un état de privation, d'empêchement. Plein d'obscurité. Dans les ruines d'un grand refus . Traqué. Yoshiharu Tsuge peint la nuit dans le cœur de Suseko qui lutte contre les ténèbres . Sabotant ainsi toutes ses chances de bien-être. Parfois le rire éclate devant cette énorme absurdité. Un livre comme une charpente d'ombre....
« La Sainte de l’Abime est plus chère à mes yeux »
Celle du livre ?
Hors ce livre, beaucoup de compagnes d'artistes, d'écrivains ont des vies compliquées, oui... Je pense à Schiele et sa femme, à Nolde, à Modigliani...... L'inverse est certainement tout aussi difficile.
Mais dans ce livre, la femme n'est ni une mère attentive et aimante ni une compagne soutenenant son compagnon dans une passe difficile.
Lui-même semble indifférent à leur présence.
Parfois les livres nous entraînent ailleurs que dans le livre...
La citation est , vous l’avez reconnue, de Nerval .
Sinon voir aussi les Femmes d’ Artistes de Daudet, misogyne, mais bien informé…
Non, je ne la connaissais pas. Je ne connais rien de la vie de couple de Nerval.
Oui, un vaste domaine intime que nous ignorons souvent quand on se plonge dans l'œuvre d'écrivains, d'artistes que nous aimons.
Mais il y a aussi de faux-semblants comme Bonnard et sa femme...
Le couple est une aventure périlleuse. Peu s'en sortent avec une harmonie tendre. Que de solitudes, de ruptures, de rencontres imprévues qui font exploser les couples.
L'amitié est reposante qui ne se blesse pas des absences, des silences. L'amour c'est une merveille entre les mains de pyromanes....
Parler
De vie de couple de Nerval est pour le moins aventureux. Il a idolâtré Jenny Colon. Cela me semble-t-il s’arrête là, sauf à considérer cet amour quasi mystique comme un tremplin de sa création. Nerval vit dans l’adoration qui lui est aussi nécessaire que l’air qu’il respire. L’adoration d’autrui, bien sûr. Les Chimères participent en partie de cette quete à la fois inquiète et admirative. Ce qui n’en releve pas tient du syncrétisme orient-Occident. Les deux sonnets sur la Bayadère Amany, ou d’autres en rapport avec sa genealogie mythique ( « ce roc voûté par Art, etc ») sur laquelle croit, fantasmee, une Franc-Maconnerie d’Artiste( Voyage en Orient, etc). Bien à vous en espérant que Paul Edel nous en parle. C’était dans ses projets il y a quelques années….MC
Merci, M.C.
Comme cette passion lui ressemble -enfin ressemble à son écriture...
C'est une passion tellement intense qu'elle devait submerger l'être aimé de qualités imaginaires.
Pourtant la vérité d'un être modeste et imparfaite est certainement source d'une tendresse infinie... Ce grand romantique, un peu mystique avait certainement besoin de pouvoir aimer ainsi. Brûler... Se consumer...
Oui, ce serait passionnant si Paul Edel, un jour, nous aidait à comprendre l'imaginaire de ce pêcheur d'étoile. Merci pour ce très beau commentaire.
Ce poème, à l'état de promesse, "Une allée du Luxembourg" peint un Gérard de Nerval tout occupé de ses rêves.
"Elle a passé, la jeune fille
Vive et preste comme un oiseau
À la main une fleur qui brille,
À la bouche un refrain nouveau.
C’est peut-être la seule au monde
Dont le coeur au mien répondrait,
Qui venant dans ma nuit profonde
D’un seul regard l’éclaircirait !
Mais non, – ma jeunesse est finie …
Adieu, doux rayon qui m’as lui, –
Parfum, jeune fille, harmonie…
Le bonheur passait, – il a fui !"
Gérard de Nerval ? Avait-il la patience de laisser place à l'autre ? de lui permettre d'exister pour ce qu'il c'est et non l'obliger à porter son rêve de perfection ?
Votre commentaire nocturne n'en finit pas de me troubler. Je cherche Nerval. Pourquoi préférait il ses rêves de femmes aux femmes réelles ? Il aurait pu tomber amoureux de plusieurs femmes pourvu que son rêve s'adapte à leur apparence. Peut-être avait-il peur des femmes comme Baudelaire. Les imaginer, les rêver lui permettait peut-être d'être certain de ne pas les rencontrer. Hâte, il avait de les perdre pour s'abandonner à son soleil noir de la mélancolie. Il aime sa plainte. Il la déroule à l'infini, s'y complait. Il s'emmure dans ses fantasmes. (Et écrit de merveilleux poèmes et récits de voyages.)
Votre citation a donné naissance à une asphodèle.
"La Sainte de l’Abime est plus chère à mes yeux »
"Dans la mythologie grecque, le pré de l’Asphodèle ou prairie de l’Asphodèle est un lieu du royaume des morts grecs. C’est l’endroit où séjournent la plupart des fantômes des morts, qui y mènent une existence in-substantielle et sans objet."(W)
Pour en revenir à "L'homme sans talent", Soleil vert, note un lien avec L'homme sans qualités de Musil.
C'est vraiment intéressant. Il l'avait d'ailleurs suggéré dans un des commentaires sous le billet des "Fleurs rouges".
J'interroge ce lien.
Ulrich comme Suseko créent autour d'eux un vide étrange. Comme si le monde réel était la manifestation d'un des possibles.
Des actions inabouties ou déviées de leur fonction habituelle créent des disfonctionnements. On entre dans un ordre poétique du monde. Un décalage. Quelque chose d'Innocent lié à une grande souffrance.
Cela renvoie à un texte ou
aux … violets, Fleur de ste Gudule, /as-tu cherché ta croix dans le désert des Cieux ?»( Ste Gudule etant la. Cathédrale de Bruxelles!) Ceci passe effectivement au dessus de la tête deJenny Colon, mais n’empêche pas Gerard de concevoir une Reine de Saba pour elle, de porter le livret à Halevy, l’auteur de La Juive , livret dont on perd la trace et dont je me demande si Ma Reine de Saba de Gounod n’incorpore pas quelques éléments au moins, bien que signe Barbier et Carré. A part ça,rébellion de la machine qui n’admet plus mon code, d’où impuissance d’avoir accès à mes textes ! Du K Dick de vie courante, en somme!
" A part ça,rébellion de la machine qui n’admet plus mon code, d’où impuissance d’avoir accès à mes textes ! Du K Dick de vie courante, en somme !"
Un bon début de science-fiction ! "M.C. contre l'entité qui sévit sur les ordinateurs"
Prochain article, je citerai John Von Neumann.
Votre discussion n'en est pas loin
Hum... Nous allons nous régaler. J'ai hâte de découvrir votre dernière trouvaille.
"János von Neumann (...): à six ans, il converse avec son père en grec ancien et peut mentalement faire la division d'un nombre à huit chiffres. (...)à huit ans, il a déjà lu les quarante-quatre volumes de l'histoire universelle de la bibliothèque familiale et les a entièrement mémorisés : Il aurait été capable de citer de mémoire des pages entières de livres lus des années auparavant."
Une enfance qui baigne dans une étrangeté et une curiosité intellectuelle passionnée mais aussi peut-être une grande solitude. Un lien très fort entre le père et le fils. La mère n'est pas évoquée dans cette notice de wikipédia.
Hâte de connaître le livre que vous avez choisi.
Un peu comme Turing, non ?
Mathématique et ordinateur. (Il aurait résolu le problème de M.C. en un clin d'œil !)
Je crois qu'il aime penser.
Pas sûr hélas ! L’ordinateur de Turing nous paraîtrait un dinosaure aujourd’hui….
Nom de code toujours inopérant ? Avez-vous essayé "sésame" ?
Je crois plutôt que je vais essayer le cyber-cafe…
Par curiosité j'ai lu quelques pages de "Femmes d'artistes" d'Alphonse Daudet. Que d'idées reçues bien misogynes. Et bien-sûr pas de femmes artistes ! Il les choisit sottes, vaniteuses, ne comprenant rien a la création, à la littérature. Déplorable ! Poubelle !
Je préfère garder de lui ses contes...
Le commentaire précédent s'adressait à M.C. qui conseillait :
"Sinon voir aussi les Femmes d’ Artistes de Daudet, misogyne, mais bien informé…"
Ce type de portrait est trop répandu à l’époque pour ne pas être au moins partiellement vrai. Il y a par ailleurs des clés pour certaines. Non, c’est du bon Daudet journaliste, je ne m’attendais pas à cela.
Connaît-on Beuve, aujourd’hui? J’entends Paul. Cet homme de peu de moyen eut dans sa vie une grande idée : collectionner tous les objets , nous dirions les produits dérivés, qui se rattachaient à Hugo. Les fleurs creees, ( sur catalogue!) le papier à cigarettes, les images, les faïences, tout un kitsch monstrueux réalisé entre la mort du poète qui déjà de son vivant avait ouvert les vannes, et 1902, date de la réalisation d’un bouquin illustré avec les moyens de l’époque, intitulé « Victor Hugo par le Bibelot ». C’est une promenade dans l’hugolatrie fort amusante, ou le bon goût est mis à rude épreuve, et très révélatrice du culte hugolien de la fin du Dix-Neuvieme siècle. On trouve encore des choses chez les bouquinistes, qu’on se le dise! MC
Peu de moyens!
Je dois signaler d’ailleurs que Julia Daudet achevant une œuvre de son mari n’est pas plus tendre à l’égard d’ une certaine Alexandrine Zola ! A une certaine époque , il ne fallait pas les mettre dans le même salon
Mais des eau-fortes de A.Gill.
Oui, vous avez raison de les situer dans ce XIXe siècle.
Daudet aimait bien se montrer dans les cenacles.
Il ne parle guère de son épouse qui fut aussi sa collaboratrice.
En cherchant je découvre qu'il était antisémite virulent comme son fils.
Il est mort rongé par la maladie, assez jeune. La clinique du docteur Blanche...
Elle est loin mon enfance où mon oncle gardien du Moulin de Fontvieille me racontait les secrets de maître Cornille et la petite chèvre de monsieur Seguin.
Il est bon comme journaliste de théâtre . Son compte rendu de la représentation de Hernani est enthousiaste et il évoque finement le jeu de Sarah Bernhard dans le filet de Dona Sol. De Ruy-Blas aussi, une excellente critique. Des portraits de comédiens sont savoureux.
Dans le rôle de Dona Sol
Pour Ruy Blas C’est la reprise de 1878 qui laisse un goût de trop peu aux hugoliens car ils savent que le Maître s’est rapproché considérablement rapproché de son Interprete au point d’ ecrire en Espagnol dans ses carnets ; « l’enfant ne sera pas fait ».
Qu’aurait donné un enfant de Victor Hugo et de Sarah Bernhardt?!
Hernani ce doit etre la reprise de 1867 ou la seule voix dissonante est celle d’ Alexandre Weil in « La Méprise d’´Hernani. » ou W imprime son’texte sur une feuille format journal. Weil, aussi appelé le Prophète du Faubourg St Honore, qui a fait beaucoup pour la propagation d’un certain antisemitisme, ceci dit sans justifier celui de Daudet, surtout cause par l’Affaire Dreyfus. Là dessus les Memoires de Daniel Halevy qui s’étonne qu’on trouve brusquement infréquentables des gens qu’on voyait, dans son milieu, tous les jours! MC
Je chercherai demain. Il y a, réunis, beaucoup de ses papiers sur les pièces qu'il allait voir. Pour l'antisémitisme, cette affaire Dreyfus aura bien diviser. Je chercherai aussi.
Sur ce je retourne sous la couette. La nuit est fraîche. J'éteins toujours le chauffage la nuit. J'aime que le jour et la nuit soient différents. Encore une mémoire d'enfance. Mon père allumait le poêle le matin. J'aimais ce rite, cette façon de construire le feu. Papiers, bûchettes et charbon. Puis le rougeoiment des flammes à travers le mica. Et plus tard ce chant de la bouilloire posée sur le poêle. Et le tisonnier qui remuait les braises. Dans l'immeuble tous avaient un poêle à charbon. Le gars qui livrait les sacs de charbon dans les caves pliait sous le poids des sacs. Son visage était couvert de cette matière noire. Pour le bois , nous les enfants allions chercher des ligots de bois chez le bougnat, marchand de vins. La tireuse , ça c'était un spectacle ! Et la trappe de la cave toujours ouverte. Les boutiques rendaient le quartier si vivant. La crèmerie et ses mottes de beurre couvertes d'une gaze fine. Le fil à couper le beurre qui laissait de belles ondulations dans le morceau emballé de papier sulfurisé. C'était le bonheur. J'aimais ce quartier populaire, ses bruits, ses habitants. Un vrai village...
Bon, voilà que je me réveille en écrivant. Il ne faut pas . Bonne nuit.
J'ai bien aimé cette recherche d'objets ayant appartenu à Hugo. Hugo n'aimait pas le vide ni dans les décors de ses maisons ni dans l'écriture.
Lucien Daudet dans un avant-propos écrit que ces critiques dramatiques, une cinquantaine, sont parues au Journal officiel de 1874 à 1880 entre sa trente-quatrieme et sa quarantième année. Il a fait un choix.
Donc, "Hernani".
C'est la reprise au Théâtre Français de novembre 1877.
"Briante, émouvante" malgré, écrit-il, quelques maladresses théâtrales voulues par le poète. Il loue l'interprétation de Sarah Bernhard :"Des vers que chacun connaît, que toute la salle murmure avant elle (...) "Vous êtes mon lion superbe et généreux." qu'elle lance avec un incroyable entrain de jeunesse, de joie, de passion naïve et débordante." (...) "Les vers sont admirables ; mais quel charme l'actrice leur prête encore !"
De Mounet-Sully il écrit "superbe et fougueux comme toujours. Peut-être s'échappe-t-il, s'emporte -t- il un peu trop ; (...) mais, dans toute la partie lyrique et amoureuse, il est hors de pair." Et ça dure encore une dizaine de pages...
Puis il passe aux "Misérables" au Théâtre de la Porte-Saint-Martin en avril 1878. Et la reprise de Ruy Blas , encore à la Comédie Française, en avril 1879. "Un régal " dit-il. Appréciant l'interprétation de Coquelin Aîné. Il cite les vers que Mounet-Sully déclame au cinquième acte : "Je m'appelle Ruy-Blas et je suis un laquais " où il le trouve " touchant, violent, terrible, soulevant les applaudissements à la pointe de chaque rime". Enfin revient à "sa" Sarah Bernhard toujours aussi enthousiaste.
D'autres critiques concernant les pièces adaptées des oeuvres de Dumas, jules Verne, Zola, Labiche, Maupassant....
Enfin, j'ai aimer lire dans l'histoire de ses livres, cette reconnaissance :
"C'est ma femme qui a le plus supporté ces redites du travail parlé (...) Ah ! pauvres femmes d'artistes ! Mais la mienne tellement artiste elle-même, a pris une telle part à tout ce que j'ai écrit ! Pas une page qu'elle n'ait revue ou retouchée ." Collaboration mystérieuse. Où commença-t-elle ? Où finit- ? Comment est-elle intervenue dans la rédaction des écrits de son mari ?. Dans "Notes d'une Parisienne, elle montre une plume alerte Quand il se sentit mourir il lui confia la charge d'achever son oeuvre.
De grands lecteurs aussi.
j'ai aimé
Intéressant :
https://www.lefigaro.fr/livres/2013/01/24/03005-20130124ARTFIG00633-la-saga-de-la-famille-daudet.php
Découvrant l'antisémitisme de Léon Daudet, je m'étonne de ne pas l'avoir repéré dans le seul livre (essai) que j'ai de lui..
Drôle de famille....
Qui sait...
Kafka monte au cœur de Passou...
Rose,
Il y avait un chat...
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