Robert
Charles Wilson - La cité du futur - Denoël Lunes d’encre
Dans les plaines de
l’Illinois au sud de Chicago surgissent en 1876 deux tours géantes que le monde
va connaître sous le nom de Futurity city. Construite pour cinq ans par un
magnat industriel du XXI e siècle, qui a découvert le voyage dans le temps, la cité
devient un site touristique pour les hommes du XIXe siècle et leurs descendants.
Contre de l’or les premiers peuvent visiter la Tour no 2, vitrine technologique
du futur. Les seconds sont hébergés dans la Tour no 1 qui abrite aussi le
personnel administratif. Ils découvrent à leur tour l’Amérique d’alors.
Jesse Collum, un des
employés de la région chargé de la sécurité, sauve la vie du président Ulysse
Grant venu admirer les édifices. Apprenant que le tueur autochtone disposait
d’une arme sophistiquée de son époque, August Kemp, propriétaire de Futurity
city, charge Collum d’enquêter sur un trafic de contrebande en compagnie d’une
femme du XXIe siécle
Après le très bon Affinity, Robert Charles Wilson livre un
thriller assez traditionnel, situé dans l’Illinois et l’ Ouest Américain,
notamment à San Francisco où s’affrontent les gros bras de la pègre. Jesse
Collum est issu de cette ville. Fils d’un père alcoolique employé comme videur
dans un lupanar, il passe son enfance en compagnie de prostituées chinoises.
Malgré les apparences Earl Collum inculque à son rejeton quelques valeurs
morales et surtout a la bonne idée de confier son éducation et celle de sa
soeur Phoebe à leur tante, Abigaïl Hauser. Au fil des années, s’il n’a pas
oublié les leçons de la rue, Jesse devient un homme intelligent et prudent,
hanté par un passé violent.
Elizabeth DePaul est
attirée par le mélange de force et de fragilité de son binôme. Cette militaire
mère d’une petite fille fuit un mariage foireux et un mari taulard. Une
histoire d’amour naît entre les deux héros et fournit un second fil conducteur
à un récit qui en a bien besoin. Le thriller est tout de même un peu convenu et
sans surprises avec quelques séquences de bagarre façon Gangs of New York.
L’écriture sauve le tout.
Wilson sait construire un roman, épaissir des personnages. Pour s’en convaincre
on relira les dix premières pages du chapitre 8. Collum est envoyé par Kemp à
la recherche de touristes fugitifs. L’ensemble forme une nouvelle comme
enchâssée dans l'ouvrage. On croirait le départ d’une uchronie.
Le mythe du Progrès prend
ici un sérieux coup. Sa dénonciation outrancière aussi. Finis l’éblouissement
et l’apocalypse. On mesure le chemin parcouru par les auteurs de
science-fiction avec le constat en demi-teinte dressé par Robert Charles Wilson. Le passé et le futur
soldent le compte de leurs désillusions et de quelques avancées. L’illustration
vespérale de la couverture rend bien compte de cette ambiguïté : s’agit il
de monuments ou de pierres tombales ?
Les humains dépeints par
Wilson, oscillent souvent « entre
deux mondes incertains ».Chacun des protagonistes tente ici comme
Roméo et Juliette de s’affranchir de son
propre univers pour rejoindre l’autre. On n’oubliera pas le superbe travail
d’Aurélien Police qu’on aurait bien vu illustrer les J’ai Lu de
l’époque Sadoul. Après tout les voyages dans le temps sont fait pour cela.
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