China Miéville - Les
Scarifiés - Pocket Fantasy
Les Scarifiés constitue le deuxième volet d’un cycle de fantasy
consacré à la cité de Nouvelle-Crobuzon. Le présent ouvrage a certes pour cadre
une ville franche, maritime, nommée Armada, mais la fameuse métropole, objet de
ressentiment pour les uns, lieu nostalgique pour les autres, parcourt en
filigrane les pages du livre et fournit le point de départ de l’intrigue, voir son
aboutissement pour un des personnages. Ce triptyque, achevé avec Le concile de fer a en tout cas placé
China Miéville au rang des tous meilleurs écrivains du genre et le désigne
comme le maître de l’Urban fantasy.
Bellis Frédevin, linguiste
de renom, fuit Nouvelle-Crobuzon. Plus ou moins mêlée aux événements décrits
dans Perdido Street Station, elle
embarque dans le Terpsichoria. Mais des pirates arraisonnent le bateau et évacuent les passagers, au nombre desquels figurent des esclaves - les
Recréés - dans une ville flottante, conçue à partir d’un assemblage de navires
(1). Les bannis intègrent avec reconnaissance Armada, dont l’organisation
sociale s’inspire des sociétés de pirate des mers caraïbes. Tous ne partagent
pas cet enthousiasme, à commencer par Bellis et Silas Fennec, un espion à la
solde de Nouvelle-Crobuzon. Armada est dirigée par un couple de flibustiers
« Les scarifiés » secondés par un guerrier quasi-invincible Uther
Dol. Ils entraînent leur communauté dans un périple mystérieux au bout du monde.
Le
plaisir, ici, sera différent. L’intrigue, plus cohérente malgré un coup de mou en milieu de volume, donne lieu à une
véritable épopée s’étalant sur plus de 800 pages. Les personnages marquent
durablement l’esprit. En cela Les
Scarifiés dépasse Perdido Street
Station. Avec Bellis, Miéville campe un être introverti, observateur, qui
contient impitoyablement ses émotions. Les événements vont balayer cette
forteresse mentale et projeter la linguiste au cœur de la mêlée. Sa nostalgie
de Nouvelle-Crobuzon l’oppose à Tanner le Recréé. Celui-ci s’est pris d’affection filiale pour le jeune
Shekel, un ado qui fut son geôlier dans le Terpsichoria. Leur destin final
arrachera des larmes au lecteur. Plus distants, Les Scarifiés et Uther Dol
gardent leur mystère.
Illustration de l'Ile à hélice de Jules Verne |
Cette fois les monstres ne surgissent pas du ciel mais des fonds des mers. Les escales
ne sont pas non plus sans danger. Dans le genre « Eve cherche Adam »
voici le début de l’attaque de la Femme Moustique : « … la première des Anopheliae émerge du couvert des arbres. Au
pas de course. On dirait une femme pliée en deux, et repliée encore contre le
grain de ses os, tordue, nouée en une position subtilement mauvaise. La nuque
tournée trop loin, trop durement, les longues épaules osseuses ramenées en
arrière, la chair d’un blanc de ver de terre, et des yeux immenses ouverts
très grands. »
Vous
lirez la suite dans Les Scarifiés, un
roman extraordinaire.
(1) Pour
l’anecdote, le plus gros de ces bateaux, le Grand Esterne, siège du pouvoir des
Scarifiés, évoque irrésistiblement un navire ayant réellement existé, The Great
Estaern, dont Jules Verne s’inspira pour rédiger Une Ville flottante et peut-être L’île
à hélice.
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