George
R. R. Martin - Une chanson pour Lya et autres nouvelles - J’ai Lu
L’exploration dans ce
blog des oeuvres de George R. R. Martin écrites en périphérie du cycle du Trône
de fer a donné lieu à d’heureuses surprises. En témoignent le recueil de
nouvelles Dragon de glace publié aux Editions Actusf ou le roman
collaboratif Le chasseur et son ombre édité chez Folio SF. La lecture d’Une chanson pour Lya paru chez J’ai lu freine en partie cet enthousiasme, en attendant
d’autres découvertes.
Les dix récits qui
composent l’ouvrage ont été rédigé entre 1969 et 1973. Ceci explique cela.
Nous avons affaire ici à un écrivain qui cherche ses marques au sein d’un genre
peuplé par les géants littéraires de l’époque. Il en résulte un recueil de
qualité inégale où à côté de quelques pépites comme « Au matin tombe la
brume » et « Chanson pour Lya » apparaissent des
textes de science-fiction carrément désuets tels « Il y a solitude et
solitude », « Le héros »
ou pire « VSL ». Les autres narrations flottent entre deux
eaux.
On pourrait
illustrer « Au matin tombe la brume » par deux vers du poète Patrice de la Tour du Pin:"Tous les pays qui n’ont
plus de légende/Seront condamnés à mourir
de froid..." Sur
Spectremonde, une planète envahie par une brume perpétuelle, un milliardaire a
installé un hôtel-restaurant au sommet d’une montagne dominant les nuages
pourpres. Les clients guettent les spectres qui dit t’on hantent les plaines.
Un savant fraîchement débarqué vient enquêter sur cette curiosité locale.
Qu’est ce qu’un monde sans question et sans mystère ? Tel est le sujet de
cette belle et mélancolique nouvelle.
Dans la station spatiale
Cerbère à dix millions de km de Pluton, un astronaute attend son remplaçant.
« Il y a solitude et solitude » est un huis clos spatial à la
fin un peu attendue qui accuse son âge. Plus intéressant, « Pour une
poignée de volutoines » met en scène des ouvriers manipulateurs de
cadavres à la recherche de pierres précieuses sur une planète étrangère. Un
vague air de ressemblance avec Les yeux électriques de Sheppard avant la
lettre.
Deux autres textes de
science-fiction « Le héros » et surtout « VSL »
sentent la poussière. D’inspiration militaire (comment recycler un soldat
d’élite pour le premier) ils auraient pu être rédigés par le Robert Heinlein
des « Juveniles ». En revanche la nostalgie des étoiles exprimée dans
« Diaporama » convainc davantage, avec une histoire
d’astronaute cloué au sol.
Faisons l’impasse sur « L’éclaireur »
et « Le run aux étoiles »,
donnons un gage d’estime à une road story «La sortie de San Breta » sous genre auquel Matheson (« Duel »),
Etchison et Zelazny donnèrent leurs lettres de noblesse et précipitons nous sur
la novella « Une chanson pour Lya »,
torrentiel récit d’amour et de solitude. Lyanna et Robb, deux télépathes sont
envoyés sur une colonie humaine peuplée par une très ancienne civilisation, les
Ch’kéens. Ce peuple pratique une forme de suicide collectif par l’intermédiaire
d’un parasite qui les amène à un état de fusion mentale. Plus inquiétant, un
nombre croissant d’êtres humains se soumet au rite. L’administrateur de la
planète fait appel aux deux héros du récit pour résoudre l’énigme de cette hécatombe. Au delà d’une
enquête ethnologique sur une pratique sectaire « Une chanson pour Lya » est un long poème sur la solitude
absolue et l’amour impossible.
De facture inégale, Une chanson pour Lya comporte au moins
deux très bonnes nouvelles mais aussi de la quincaillerie SF. Soulignons la
belle couverture de Marc Simonetti.
Je partage tout à fait ton avis sur ce recueil, assez moyen malgré quelques perles.
RépondreSupprimerJ'avais été très déçu par "Des astres et des ombres", nettement en dessous.
Par contre, je reste très enthousiaste pour "Les rois des sables", où Martin arrive à pleine maturité. La nouvelle éponyme est juste magnifique, assez mathesonienne !
Mais LE grand livre de l'auteur reste, pour moi, Armagedon ragg. Le meilleur livre sur le rock selon Roland Wagner, un bijou d'introspection sur l'échec de la contre-culture, qui rappelle parfois "Substance mort" de Dick, pour son regard assez pessimiste sur les USA de l'époque.
Olivier.
Merci !
RépondreSupprimerLes deux sont dans ma liste. Je crois que K2 avait du les chroniquer d'ailleurs.Sinon j'ai un Perutz encore à lire et quelques japonais.
Salut camarade,
RépondreSupprimerPar un étrange phénomène de mimétisme intellectuel, je partage la même opinion que toi sur ce recueil que j'ai chroniqué sur mon blog. Deux pépites et un ramassis de textes dispensables. La récolte est bien maigre. Suis les conseils d'Olivier, il parle d'or. "Armageddon Rag" et le recueil "Les rois des sables" sont deux points culminants dans la biblio de Martin. A découvrir de toute urgence...
Boujou,
Ubik
Je me permets une parenthèse.
RépondreSupprimerEs-tu au courant de la réédition du Seigneur des ténèbres de Silverberg ?
U
Non, je cours me renseigner (Pégase nous manque !). Je possède pour ma part une belle édition en deux volumes parue en 1996 chez Denoel.
RépondreSupprimerL'ouvrage est hautement recommandé par Eric Holstein (...qui a disparu des écrans radar à mon grand regret)
Merci en tout cas pour tes remarques.
ça vient tout juste de sortir chez Anne Carrère en un seul volume
RépondreSupprimerMoi je reste très partagé concernant Armageddon rag, pas que ça soit mauvais, mais j'en avais entendu tellement de bien que finalement j'en suis ressorti sur ma faim. Le coup des idéaux déçus et dévoyés, mouais bon, c'est bien vu mais ça ne suffit pas à faire de ce bouquin un chef d'oeuvre.
RépondreSupprimerDans le genre SF et musique, j'avais nettement préféré Fugues de Lewis Shiner.