Joël Houssin - Argentine - Folio SF
Le dégoût de vivre ne supprime pas la peur de mourir
De Joël Houssin, pourtant pur produit du Fleuve Noir, on se
souvient surtout du temps du twist et d’Argentine deux incursions
chez Présence du futur en forme d’uppercuts, pour rester dans l’accroche à la
Philippe Manoeuvre du 4eme de couverture. Un ton, une écriture qui valurent à
l’auteur d’être primé à de multiples reprises, de rencontrer un succès
commercial considérable pour son cycle policier Le Doberman et de
scénariser plusieurs épisodes de séries télévisée grand public, Navarro,
Commissaire Moulin, Les bœufs carottes…
Dans une cité prison égarée au milieu d’un désert
infranchissable vivent quelques communautés humaines essentiellement sud
américaines, lointaines descendantes de prisonniers politiques. Oubliées les
luttes d’antan, les combats se bornent désormais à des guerres de quartier, des
affrontement claniques, comme un exutoire à l’impératif de survie, dans
l’attente hebdomadaire des livraisons de nourriture avariée. La drogue fournit
des passerelles aléatoires à qui ne supporte plus la violence, la présence des
milices et plus généralement l’existence dans un univers sans passé, sans
futur.
Diego alias Le Golden Boy est l’un de ces anciens meneurs de
bande, devenu célèbre pour une incursion dans le Quartier Sud. Depuis il a raccroché
les armes, supportant la présence d’un père dégénéré et essayant de dissuader
son jeune frère Jorge à la tête des Enragés de suivre son exemple. Face à la
pénurie, il accepte néanmoins de mener quelques expéditions dans l’espoir
secret de retrouver sa sœur Gabriella.
Argentine pourrait
n’être qu’un roman de jungle urbaine de plus avec flingue, blouson et moto. Il
échappe pourtant à ce poncif de jeu vidéo grâce tout d’abord à la mise en place
d’un monde clos et schizophrénique dont l’argumentaire science-fictionnesque évoque
Le monde inverti de Christopher Priest et Le désert du monde de
Jean-Pierre Andrevon. Autour de ce récit du début des années 90 flottent aussi
le souvenir des prisons argentines et des dictatures sud-américaines. La cité ghetto
devient alors la métaphore des tyrannies qui s’auto-entretiennent et
engloutissent sans encombre espoirs et utopies.
Ces sombres réflexions
en forme de post romantisme désespéré culminent superbement au début du
chapitre 31 alimentées par une écriture en feu de bengale. Vingt cinq ans après
le texte n’a pas pris une ride. L’horreur économique et le fanatisme religieux
ont simplement pris la place des juntes militaires.
Yep! C'est du bon. Tu devrais essayer "Blue".
RépondreSupprimerUbik
...et hop dans la pile ...
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