Scott Westerfeld - Succession
- Pocket
L’affrontement entre civilisations humaines et machines a donné
matière à de mémorables space-opera comme le cycle Berseker de Fred
Saberhagen, le cycle du Centre galactique de Gregory Benford, Le cycle des Inhibiteurs
d’ Alastair Reynolds et peut-être au meilleur d’entre eux, Succession de
Scott Westerfeld. Composé de seulement deux volumes, Les légions immortelles
et Le secret de l’Empire chez Pocket, il a été publié en France il y a
une vingtaine d’années et comme le Reynolds, n’est disponible que sur le marché
de l’occasion. Editeurs, sauvegardez le patrimoine !
Un autocrate dirige d’une main de fer un Empire de
quatre-vingt mondes. La clef de son pouvoir réside dans le secret puissamment
gardé de l’immortalité dont il bénéficie en compagnie d’une aristocratie. Face
à lui un Sénat tente de préserver un semblant de démocratie dans la gouvernance
de cette vastité. Les deux parties font néanmoins front commun contre les Rix,
une secte de cyborgs qu’ils ont déjà affronté par le passé. Cette fois l’ennemi
expédie un commando sur la planète Legis pour s’emparer d’Anastasia la sœur de
l’empereur. Le commandant Laurent Zaï, héros du récit, tente à partir de son
vaisseau le Lynx de neutraliser l’attaque. Malheureusement les Rix bénéficient
de l’apport d’une IA qui en s’emparant de l’infostructure et des données de
Legis va d’une part contrarier l’entreprise de sauvetage et d’autre part parvenir à un degré
de conscience supérieure, une IA composite, un Dieu en quelque sorte. Mais
affronter le courroux d’un Empereur et d’une Entité cosmique, est-ce suffisant
pour décourager un officier valeureux et amoureux de surcroit ?
Six cent soixante-dix pages plus tard un constat s’impose,
le lecteur a passé un bon moment. Comment expliquer ce ressenti ? Tout d’abord
par une densité d’action évoquant dans un autre genre le film de Brian G.
Hutton Quand les aigles attaquent, densité entretenue grâce au découpage
d’arc narratifs portés non pas par des chapitres mais par différents
personnages ce qui a pour effet, cinématographiquement parlant, de multiplier
les angles de vue tout en ne rompant pas la séquence ; par le tour de
force d’avoir majoritairement concentré le cœur du récit dans le Lynx,
unité de lieu autour de laquelle gravitent des narrations secondaires comme les
conseils de guerre ou les scènes d’intimité entre Laurent Zaï et Nara Oxham. Le
vertige technologique et scientifique contribue bien sûr à l’effet de saisissement :
attaques de drones intelligents, millimétriques et multiformes, édification d’une
résidence à partir d’une simple graine dont les appendices - des roseaux
pensants (!!) - partent à la recherche des matériaux nécessaires à sa
construction, découverte de la « gravitation splendide », particule
et nouvelle source d’énergie, toutes inventions délirantes grâce auxquelles
dirait Joseph Altairac la science-fiction surpasse le surréalisme.
Succession c’est aussi l’histoire de la lutte contre
l’emprise d’un pouvoir mortifère symbolisé par sa caste de « morts ressuscités »
contre laquelle lutte le mouvement séculariste porté par la sénatrice Nara Oxham.
Le sécularisme prône le rétablissement du cycle naturel de la vie et de la mort,
seul chemin de progrès et de renouvellement. D’autres voix se font entendre au
sein du Sénat et du Conseil de guerre présidé par l’empereur, les utopiens, les
expansionnistes, et l’Axe de la Peste, membres rescapés d’une politique
eugénique impériale.
Mort de Brian Wilson. Enfer.
RépondreSupprimer"Love and mercy that's what you need tonight"
Il va m'en falloir ce soir.
« Quand les Aigles attaquent », oui. « Les Berserkers « également..
RépondreSupprimerMC
RépondreSupprimerPauvre Brian. La musique était son refuge.
RépondreSupprimerDans la série Bersekerienne, cf le Sourire du Berserker….
RépondreSupprimerMC
RépondreSupprimerVous imaginez, Soleil vert, votre blog comme une gare de Monet avec plein de fumées bleues sous la verrière. Vous êtes le chef de gare comme au temps de l'enfance. C'est vous qui faites partir les trains, annoncez les retards ou les approches. Quand je monte dans un de vos trains, après avoir mis ma valise dans le filet j'attends avec impatience le départ, la jouissance du départ, les crissements de métal des roues sur les aiguillages. Le bonheur s'annonce mais il est encore à venir. Il faut d'abord quitter les abords de la gare, les perturbations des voyageurs qui passent dans le couloir, cherchant une place libre
RépondreSupprimerou réservée. Et puis tout commence à se calmer. Je regarde quelques scènes offertes par les vitres de votre train. Donc, je suis dehors plus que dedans. Ça va venir... Quoi ? Cette sensation d'immobilité dans ce qui bouge : le train, le paysage. C'est le bonheur le plus grand du monde : être bien à l'intérieur de soi, laissant les mots du livre glisser sur la mémoire qui, elle joue un printemps précoce. Ça s'en vient cette mémoire des mots par ricochets. Toc toc toc. Ligne droite réussie jusqu'à atteindre l'autre rive qui guettait, entre ses pages sagement closes, un torrent de prose. L'auteur arrive par là : des mots et un rythme, une musique. Mais c'est un passager clandestin. Vite, il s'efface pour une balade imprévue dans le temps d'avant celui du seul avenir possible.
Je n'ai pas pris votre train du jour. Je reste encore avec plein de Calvino en feuilles douces et l'envol final et la chute dans la mer, volontaire ou pas. On ne sait...soit Icare soit Boutès.
J'aime votre gare, Soleil vert comme les fumées bleues de la gare Saint-Lazare peintes par Monet. La gare de mon enfance. Ma gare de triage. Et ces trains, ces trains toujours en partance vers l'immobilité souveraine.
Waou ! Merci. SV
RépondreSupprimerPauvre Boutes…. MC
RépondreSupprimerRetour à la bibliothèque de science-fiction de Soleil vert. C'est ainsi qu'il parle vraiment.
RépondreSupprimerUne expérience onirique. Cet espace c'est autre chose que le monde, un vide sans limite. L'espace à travers ces romans, c'est un vacillement, un vertige, dos à dos avec le néant car l'humanité y disparaît progressivement, la Terre aussi, le soleil...
Le Temps comme dans un rétroviseur souvent en arrière, très loin, accessoire. Alors vient le temps des métamorphoses, de l'aventure intersidérale...
Et de l'autre côté du temps, une littérature classique. Poètes et romanciers des siècles passés . Beaucoup de solitudes, d'incertitudes. Un monde qui sent l'approche de la mort. Le mystère de la mort...
Des analyses psychologiques très fines. L'Histoire et les désastres du XXe siècle. De très grands auteurs. Une littérature raffinée européenne, américaine. Des romanciers analytiques, psychologiques, inquiétants souvent car ils cherchent la finalité de l'espèce humaine.
Souvent des Nouvelles. Une galerie de personnages inoubliables dans un monde qui viennent nous visiter comme des ombres d'un passé chaotique, tous travaillés par des interrogations philosophiques. Le souffle de l'humanité.