Joe
Haldeman - La guerre éternelle - J’ai lu
Les guerres peuplent les
récits de science-fiction, plus peut-être que dans toute autre littérature. Une
tradition héritée de l’Iliade, père hypothétique du genre et mère de
tous les romans. Mieux, les auteurs franchissent quelque fois le pas entre
fiction et réalité. Une nouvelle (1) d’ Arthur Clarke servit dit-on de support
de cours au MIT. Robert Heinlein fut conseiller de Ronald Reagan pour « la
guerre des étoiles », projet militaire défunt dont le nom renvoie à un
célèbre cycle cinématographique. Sans compter la légion d’auteurs US ayant
émargé à l’armée ou à la CIA.
Si la science-fiction
c’est la guerre, peu d’écrivains en dénoncent l’absurde violence. Un pas derrière Kurt Vonnegut (2), Joe Haldeman fait entendre une voix relativement discordante dans le
tintamarre belliqueux des space opera. En 1974, cet ancien du Vietnam rédige un
texte qui quarante plus tard n’a pas pris une ride. Patrick Imbert en propose
une nouvelle traduction agrémentée de la version originelle des chapitres 22 à
25.
Au cours de son expansion
stellaire, la Terre bute sur les Taurans, une race d’extraterrestres logée dans
la constellation du Taureau. Un conflit interminable s’engage alors. Le roman
raconte l’odyssée et la carrière de Mandalla militaire d’élite au QI
vertigineux et aux convictions molles. Le Vietnam quoi … joints compris mais sans les putes des bases indochinoises. Les troufions hommes
et femmes se débrouillent désormais entre eux.
L’écrivain ne
s’embarrasse pas de considérations stratégiques. Sa vision reste celle du
soldat confronté à un quotidien de combat, de mort, de blessures. De
l’ennemi on ne sait rien. Le premier contact est souvent le dernier. Plus
terrible encore, les dilatations temporelles générées par des déplacements à
des vitesses relativistes distendent et rompent tous les liens affectifs.
Sur Terre la situation
n’est guère enviable. Les nations s’adaptent à une économie de guerre. Les
permissionnaires découvrent le rationnement alimentaire dans les villes, la violence
récurrente des campagnes. Dans cet Iliade moderne, Haldeman glisse néanmoins une
histoire d’amour intemporelle.
Hasard des lectures, le
mandala de la couverture renvoie à un autre de Limbo, représentant des jambes ou des prothèses. Bellicistes et pacifistes
fous se rejoignent. A par ça, La guerre éternelle
reste un page-turner intelligent, un classique de la science-fiction.
(1) « Superiority »
(2) sans oublier le tout nouveau Phare 23 de Hugh
Howey
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